La Centrafrique, de la rébellion Séléka aux groupes anti-balaka (2012-2014). Usages de la violence, schème persécutif et traitement médiatique du conflit
Résumé
Cet article explore les dynamiques historiques, politiques et sociales
des violences qui font rage en République centrafricaine. Le conflit
centrafricain (2012-2014) oppose des groupes issus de l’ex-rébellion
Séléka, qui avait pris le pouvoir en Centrafrique par un coup d’État
le 24 mars 2013, et des formations d’auto-défense dites anti-balaka,
qui s’en prennent aux communautés musulmanes et mettent en scène
une violence extrême sur le corps de leurs victimes. Derrière le clivage
religieux qui opposerait des combattants « musulmans » et des
formations armées « chrétiennes » – un clivage sur lequel insistent, sans
grande distance critique, les médias internationaux – l’article analyse
la complexité des relations qui, depuis le XIXe siècle, caractérisent les
échanges et les heurts entre les populations établies sur le territoire
centrafricain et celles qui proviennent de la région tchado-soudanaise.
Plus récemment, les relations complexes entre le gouvernement
centrafricain et ses États frontaliers, Tchad en tête, ainsi que les
revendications de groupes armés établis dans les régions frontalières
entre les deux pays, ont contribué à la détérioration du climat politique
et à l’émergence de revendications d’autochtonie dans une partie de
la population centrafricaine
This article explores the historical, political and social dimensions of violence in
the Central African Republic (CAR). The current conflict in CAR (2012-2014) opposes
groups from the former Séléka rebellion, who took power in a coup on March 24th 2013,
and so-called anti-balaka self-defence groups, who take on to Muslim communities
while staging extreme violence against their victims’ bodies. Moving beyond a
simplistic perspective that sees the conflict as the result of a cleavage between
“Muslim” fighters and “Christian” armed groups – a vision that international media
have been propagating rather uncritically –, the article analyses the intricate links that
have shaped exchanges and clashes between populations established on the Central
African territory and those originating from the Chad-Sudan region since the
19th Century. In recent years, the complex relations between the Central African
government and its neighbouring states, Chad especially, as well as the grievances
by armed groups established in the border areas between the two countries have
contributed to the deterioration of the political climate. It is also in this context that
claims to autochthony have emerged within the Central African population
Domaines
Anthropologie sociale et ethnologie
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