Prosodie et émotions chez des patients dysphoniques : quand la voix et la parole s’en mêlent
Résumé
Qu’en est-il de la manifestation vocale des émotions, de leur perception et de leur ressenti chez des personnes dysphoniques (avec des troubles de la voix) ? L’état émotionnel d’un locuteur affecte les composantes de la production vocale de tout individu que sont la fréquence fondamentale, l’intensité, le timbre et la durée. Ainsi, Selon Murray et Arnott (1993), Scherer et Johnstone (2000), Scherer (2003), Juslin et Laukka (2003), la joie et la colère reflètent un degré d’activation émotionnel fort, et présentent un accroissement de la fréquence fondamentale (F0), de l’intensité ainsi qu’une diminution de la durée de la production et donc une parole accélérée. A l’inverse, des émotions avec un degré d’activation faible, comme la tristesse, voient leur F0 et leur intensité diminuer au cours de la production, avec une parole ralentie et des modifications de la qualité vocale.
Exprimer ainsi les émotions suppose donc un grand degré de liberté dans l’utilisation de l’appareil vocal et articulatoire, ce dont certains patients dysphoniques peuvent être dépourvus. Dans cette présentation, nous illustrerons la présence d’altérations de F0 chez des enfants et adultes souffrant de troubles vocaux. Il existe des liens entre ces altérations, leur perception et leur ressenti par ces patients. La réduction de la plage de variation de F0 et la diminution de F0 maximale de phrases produites avec différentes émotions par ces patients, par rapport à des sujets non dysphoniques, montre que leur prosodie, et donc leur parole, est également impactée par leur trouble vocal. Ces résultats illustrent ce qu’Elisabeth Lhote affirme dans son ouvrage La parole et la voix : « toute parole, hormis la parole artificielle, ne peut se concevoir sans le support d’une voix » (Lhote 1982 : 230).
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Linguistique
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