" Détestables écoles d'ethnographie ". Littérature interdite, poésie censurée
Résumé
Cet article s'interroge sur les choix, les stratégies d'écriture de Paul Rivet pour relater sa mission en Equateur (1901-1906), après la découverte dans ses papiers personnels de plusieurs textes inédits qui obligèrent sa biographe à réviser ses analyses sur la conception de l'altérité véhiculée dans les travaux équatoriens de Rivet. Jeune médecin militaire en progressive reconversion professionnelle vers la carrière d'anthropologue, il garda sous le boisseau plusieurs textes, dont deux petits poèmes qui évacuaient de façon très sensible ce que la contemplation des Indiens opprimés lui inspirait. Il s'agit d'essayer de comprendre pourquoi il ne divulgua pas ces poèmes. Si, dans ses articles scientifiques, il pouvait à bon droit décrire l'Indien acculturé comme un homme déchu, appartenant à un monde et une humanité en sursis, il s'interdit de l'évoquer comme un indigent, broyé par le servage, soumis à des conditions d'exploitation économique et sociologique effroyables. Ce constat permettra de mettre en lumière les conditions d'accréditation professionnelle du métier d'anthropologue au tournant du XXe siècle en France, un débutant ne pouvant espérer pénétrer les réseaux de la sociabilité savante s'il ne se défiait pas tout à la fois des considérations sociales, de la littérature de voyage et de ses impressions personnelles.
Origine :
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