VIH, stigmatisation et honte aux îles Fidji - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Thèse Année : 2020

HIV, stigma and shame in Fiji

VIH, stigmatisation et honte aux îles Fidji

Résumé

This dissertation examines the stigma associated with HIV in Fiji, in the South Pacific. It analyzes the forms taken by stigma associated with the infection, the moral universe in which it takes place and the social and cultural logics underlying it in the Fijian society. It also examines how people living with HIV experience this stigma and the strategies they use to cope with it. The analyses presented draw on a 16-month fieldwork research carried out in Suva, the capital of Fiji, between 2007 and 2013. They are based on the life stories of 28 HIV-positive men and women with whom I had long-term exchanges. Drawing on Arthur Kleinman’s theoretical framework that considers stigma as an essentially moral issue in which a stigmatized condition threatens what is most at stake for actors in a local moral world, I show that HIV is, for most Fijians, a symbol of the multiple threats (sexuality outside of marriage, sexuality between people of the same sex, etc.) that endanger today, in their view, the religious and customary institutions of family and marriage. Fijian's stigmatizing attitudes towards HIV-positive people—and primarily gossips—can thus be seen as attempts to preserve these institutions that are the very foundation of the Fijian social order. For people living with HIV, the infection puts at risk what they value most, i.e. to be seen as a valuable person in the eyes of their family, lineage, clan and village, and to maintain appropriate and unstrained relationships with them. Shame is therefore the dominant emotion underlying the experience of most HIV-positive people. An important dimension of the work of managing HIV for HIV-positive people in Fiji, as I argue in this dissertation, is thus to negotiate stigma and shame and to try to avoid its spread and/or to minimize its effects on their loved ones. To do so, they employ different strategies, notably trying to keep their condition secret, distancing themselves from the image of immorality associated with HIV by converting to a Pentecostal church or embracing an “HIV-positive identity” by joining a support group for people living with HIV. However, I show that the level of stigma experienced by HIV-positive people in Fiji, as well as their capacity to respond to it, is not the same for everyone. Three main factors influence the way HIV-positive people experience and cope with stigma and shame: morality, gender and socioeconomic level.
Cette thèse porte sur la stigmatisation associée au VIH aux îles Fidji, dans le Pacifique Sud. Elle examine les formes prises par la stigmatisation liée à l’infection, l’univers moral dans lequel elle prend forme et les logiques sociales et culturelles dont elle procède dans la société fidjienne. Elle analyse également la façon dont les personnes atteintes du VIH font l’expérience de cette stigmatisation et les stratégies mises en œuvre par celles-ci pour y faire face. Les analyses présentées dans cette thèse se fondent sur une recherche de terrain de 16 mois réalisée dans la ville de Suva entre 2007 et 2013 et analysant l’expérience de vie et de maladie des personnes atteintes du VIH. Elles s’appuient plus particulièrement sur des récits de vie recueillis auprès de 28 hommes et femmes vivant avec l’infection. En m’inspirant de l’approche théorique d’Arthur Kleinman qui envisage la stigmatisation comme un enjeu moral dans lequel une condition stigmatisée menace ce qui est fondamentalement en jeu pour les acteurs sociaux dans un monde local, je montre que le VIH constitue, pour la plupart des Fidjiens, un symbole des multiples menaces (sexualité hors mariage, sexualité entre personnes de même sexe, etc.) qui guettent aujourd’hui, selon eux, les institutions religieuses et coutumières de la famille et du mariage. Les attitudes stigmatisantes dont ils font preuve à l’égard des personnes séropositives – et au premier chef les commérages – peuvent donc être envisagées comme des tentatives pour préserver ces institutions qui sont au fondement de l’ordre social fidjien. Pour les personnes atteintes du VIH, l’infection met en péril ce à quoi elles attachent le plus d’importance, soit être considérées comme des personnes de valeur aux yeux de leur famille, de leur lignage, de leur clan et de leur village et maintenir des relations appropriées et non tendues avec eux. La honte constitue dès lors l’émotion dominante sous-tendant l’expérience de la majorité des personnes atteintes. Une dimension importante du travail de gestion du VIH par les personnes séropositives, comme je le soutiens dans cette thèse, consiste ainsi à négocier la stigmatisation et la honte pour elles-mêmes et à tenter d’en éviter l’extension ou d’en minimiser les effets pour leurs proches. Pour ce faire, elles mettent en œuvre différentes stratégies, notamment celles qui visent à conserver leur condition secrète, à se distancier de l’image d’immoralité associée au VIH en se convertissant à une Église pentecôtiste ou encore à cultiver un soi « (séro)positif » en adhérant à un groupe de soutien pour personnes atteintes. Je montre toutefois que le niveau de stigmatisation vécu par les personnes séropositives aux îles Fidji, ainsi que la possibilité qu’elles ont d’y répondre, ne sont pas les mêmes pour tous et qu’ils varient en fonction de trois facteurs principaux : la moralité, le genre et le niveau socioéconomique.
Fichier non déposé

Dates et versions

tel-03096493 , version 1 (05-01-2021)

Identifiants

  • HAL Id : tel-03096493 , version 1

Citer

Fabienne Labbé. VIH, stigmatisation et honte aux îles Fidji. Anthropologie sociale et ethnologie. EHESS, 2020. Français. ⟨NNT : ⟩. ⟨tel-03096493⟩
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