A. and B. Epoque, les salons sont une instance de consécration des artistes et

. Indiennes-»-mêlées-d-'odeurs-vanillées-et-de-la-douceur-parfumée-de-la-rose-thé, La nostalgique image de l'île maternelle a pu se substituer à celle du salon « tendu de damas rouge » où flottait « une grande impression d'intimité, d'hospitalité pacifique et harmonieuse [née] d'un accord parfait entre le confort et la beauté. 701 » Aux yeux de Paul-Jean Toulet, tout n'y fut que « luxe, calme et volupté », les meubles, les objets d'art et les bibelots 702

. Mis-À-leur-coeur, il se livre entièrement dans ces lignes en se démarquant des faux semblants habituels de son entourage ? Le symbole du masque est intéressant à explorer si l'on songe au propos de Jean-Louis Vaudoyer qui prétendit que pour Madame Bulteau seule, Toulet « dénoua son masque. » Toujours est-il qu'il lui fera ses adieux à la veille de s'embarquer avec Curnonsky, pour l'Indochine, Si j'avais la prétention que mes lettres puissent vous émouvoir en quelque façon, je voudrais que celle-ci ne vous attristât pas comme m'ont fait les deux vôtres. En vérité, n'avez-vous pas à tout prendre assez de causes de bonheur pour vous en jouer la comédie à vous-même ?, Et puis ne devez-vous pas aux gens qui vous aiment qu'ils soient assurés que vous ne transformez pas en souffrance l'indifférent ou le superflu, p.722

C. Madame and . Choix-que-j-'ai-fait-de, mon plus beau papier vous prouvera tout de suite que j'ai laissé ma rancune dans les eaux d'Asie ? quoique ne pas m'avoir écrit depuis mi-décembre avouez que c'est un peu vif [?] Mais enfin je songe que je vais vous revoir dans quelques jours, et le plaisir 721 Ibid, p.1209

P. Toulet-adresse-À-augustine-bulteau-sont-troublantes, fait une brève allusion à ses amours perdues, et lui dit « adieu » pour la première fois en évoquant « les diverses faultes de santé, d'argent, de tendresse qui sont comme le sel de [sa] vie », prenant soin d'ajouter, comme un ultime aveu, « je vous aime toujours autant. 731 » Quelle fut la nature exacte de cette relation ? Sans doute Toulet conçut-il à l'égard de cette femme de sept ans son aînée, un sentiment confus mêlé de tendresse et d'amitié amoureuse auquel la séduction n'était pas étrangère. La sollicitude de Toche « qui regardait en vous avec les yeux de l'âme 732 », ses conseils avisés, ses reproches, Joe Guillemin

. Banville, . Bourget, and . Verlaine, Il rencontra les poètes symbolistes, travailla sur un livret de Catulle Mendès, Rodrigue et Chimène, d'après le Cid de Corneille, rencontra Mallarmé qui lui demanda d'adapter un projet théâtral autour de l'Après-midi d'un faune Pelléas et Mélisande. L'ensemble de son oeuvre musicale est associé à l'oeuvre littéraire et poétique de son époque, et la correspondance échangée avec Paul-Jean Toulet y fait très souvent référence. Ils se passionnent l'un et l'autre pour leur création respective et s'admirent, partageant la même perception de l'art et du monde. Ils envisagèrent d'ailleurs de créer une oeuvre commune qui ne vit malheureusement pas le jour. Durant la période parisienne de Toulet (1898-1912), les deux hommes se virent fréquemment et s'écrivirent souvent ; soixante seize lettres ou billets parfois de quelques lignes ont été échangés durant cette période, entre l'avenue du Bois de Boulogne (résidence de Claude Debussy) et la rue de Villersexel, il écrivit des musiques sur des textes de Musset, puis sur des poèmes de Gautier Puis il découvrit Edgar Poë et Maeterlinck qui fit représenter au théâtre des Bouffes du Nord, 1912.

C. Debussy, 1862-1918) était le fils de commerçants ; très jeune, il fut confié à une élève de Chopin

L. Formules-sont-explicites-«-mon-cher-ami, ». , and ». Et-les-formules-de-politesse-ne-varient-pas, excusant de cette « sentimentalité » qui peut être jugée excessive Pourtant le ton est donné, chaleureux, enjoué, attentionné ; hormis quelques interruptions, il ne se démentira jamais jusqu'en La grande majorité des lettres débutent par l'expression affective et croyez-moi votre ami », ou « en toute amitié [?] je vous conserve ma sûre amitié [?] affectueusement [?] je vous affirme ma solide et imperturbable amitié [?] je suis toujours votre ami [?] votre sincère et amical [?] bien amicalement [?] respects et amitiés. » De temps à autre, l'épistolier associe ses proches aux formules finales, ce qui laisse penser que les relations s'étendaient à l'ensemble de la famille et témoigne de l'étroitesse des liens. Ainsi, Claude Debussy précise-t-il souvent, « meilleurs souvenirs des miens [?] affectueuses pensées des miens [?] affectueux souvenir de tous [?] affectueuses pensées de ma femme et de Chouchou (la fille de Debussy 747 ) [?] Chouchou est très sensible à votre souvenir, Madame Debussy vous envoie son plus gracieux sourire, Miss Dolly 748 aussi. » De temps à autre, les deux amis font preuve d'une amusante familiarité et signent leur lettre en alternant des phrases en anglais telles que yours sincerely ou ys, most devoted, ou se désignent comme « votre amicalement cacochyme Toulet [?] son vieux dévoué Debussy [?] son vieux ami invalide » ou s'appellent « chère vieille figure. » Il arrive qu'une querelle vienne assombrir la légèreté de ton de cette correspondance Lettres de P.-J. Toulet et de Claude Debussy, pp.746-1223, 1918.

. Claude-emma and . Chouchou, est la fille de Claude Debussy et d'Emma Bardac Moyse que Debussy a épousée en 1908, mais avec qui il vivait depuis 1904, p.748, 1919.

M. Dolly-est-la-fille-d-'emma and . Debussy, 1862-1934) par son premier mariage avec Henri Bardac Elle deviendra Madame de Tinan et mourra en 1985. d'Emma Debussy et il écrira : 750 En, 1905.

. Le and . Le-musicien-ressent-avec-lucidité-le-malaise-de-son-ami, qui choisira finalement de fuir la capitale en 1912 pour se réfugier à Guéthary, et auquel il écrira en 1913 Je ne suis pas encore habitué à ce départ de vous, qui ressemblait à une fuite de tout, et du reste ! Je ne vous ai jamais dit ce qu'il me paraissait cacher de sentiments froissés, de sensibilité meurtrie, car ce sont là des instants particuliers où les conseils aussi bien que les consolations ne servent plus à grand-chose ; ils peuvent même paraître indiscrets, ou hypocrites ! Pour avoir le droit de dire à quelqu'un qu'il ne marche pas dans le droit chemin, il faut pouvoir lui offrir, immédiatement

. Au, ne vous pensez pas indiscret en me parlant de ma façon de vivre. Tout le monde y danse ; et il y a heureusement d'autres chambres beaucoup plus secrètes

. Ibid, vous, tout le premier, avez l'entrée, parmi les unhappy few, pp.1248-1249

. Ou-encore, Le mépris de son propre corps périssable est une chose héroïque et belle. Pourtant, ne croyezvous pas que vous avez poussé à l'extrême cette double vertu ?, p.767

». Midi-d-'un-faune, . Au, and . Siechiari, Londres -faisant face à un succès grandissant (Pelléas sera créée en Allemagne et à New York) Debussy reste proche du poète et attentif à ses productions littéraires. Il vante ses dons journalistiques en 1902 : « j'avais encore de vos nouvelles ces derniers temps ? Dieu sait de quelle merveilleuse manière ? par la Vie Parisienne, 769 » ou lui dit son admiration à la publication des Ombres Chinoises en 1908 : « vous n'aimez pas beaucoup écrire ? excepté dans une Grande Revue où vous montrez des « Ombres Chinoises » purement adorables. » Leur art, leur amitié se trouvent ainsi consacrés par leur échange épistolaire, et Debussy en fait un sujet de leur correspondance. Dans L'Epistolaire, Geneviève Haroche- Bouzinac 770 évoque la destination parfaite, et soulignant entre les parties qui se sont choisies l'existence d'un pacte épistolaire tacite relève le propos de Bernard Bray : Les exigences d'un sentiment réciproque, l'échange d'une certaine sorte d'informations sollicitées de part et d'autre avec précision, Bien que très occupé par sa création et ses nombreux déplacements -il se rend à Saint-Pétersbourg

L. Lettres-de-paul-jean, . Toulet, and C. De, Debussy ont une valeur artistique et sensible ; elles sont à l'image de leurs auteurs et des dialogues qu'ils ont pu échanger lors d'une conversation amicale. Elles constituent le prélude à ce qu'aurait pu être leur projet d'une création commune et l'ébauche d'une partition à deux mains. Leur relation épistolaire fut idéale, motivée aussi de temps à autre par le manque, la nécessité, sentiments qui se manifestèrent à diverses reprises sous la plume de Claude Debussy. Il se confiait alors, p.1497

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