La territorialisation de la régulation économique dans l'agglomération lyonnaise (1950-2005). Politiques - Acteurs - Territoires - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Thèse Année : 2006

Territorialization of the economic regulation in the urban area of Lyon (1950-2005). Policies - Actors - Territories

La territorialisation de la régulation économique dans l'agglomération lyonnaise (1950-2005). Politiques - Acteurs - Territoires

Rachel Linossier

Résumé

This thesis analyses the emergence and the settlement process of the economic policy in the urban area of Lyon, during the last fifty years. It develops an interdisciplinary approach of the territorial public action for economic development, on the basis of an economical and a political reading of the theory of regulation.
During the period of economic growth (1950-1975), the central state carried out the economic regulation for the national territory and conceived the necessary tools. Since the crisis, the state delegates responsibilities concerning economic policy to the local level. The thesis combines three points of view for analysing economic policy in both periods: the global economy and its frame of references that may guide public action; the technical and operational forms of economic policy implementation; the modes of governance of economic regulation, with a focus on the relationships between economic and politic spheres in the systems of actors.
The objective of this thesis is to show how the Greater Lyon authority takes on the political leadership for territorial economic regulation in the local system of actors. It shows how the integration of the interests of private firms in public policies is done to the detriment of the traditional role of economic actors such as chambers of commerce. Furthermore, the engagement of the Greater Lyon authority in the competition for economic attractiveness might compromise the respect of the general interest in local public action.
Cette thèse analyse le processus d'ancrage de la politique économique dans l'agglomération lyonnaise, sur une échelle de temps d'une cinquantaine d'années. Le travail privilégie une approche pluridisciplinaire et diachronique de l'action publique territoriale en faveur du développement économique, à partir d'une double lecture économique et politique de la théorie de la régulation. Celle-ci met en évidence le nouveau statut actif du territoire en matière de développement économique, ainsi que le rôle du système d'acteurs local dans la conduite de la politique à partir de la notion de la gouvernance. L'hypothèse centrale de ce travail réside dans l'existence d'une dynamique de territorialisation de l'action publique qui s'accompagne d'une prise en charge politique de la défense de l'intérêt des entreprises par le niveau local depuis la survenue de la crise.
Les Trente Glorieuses correspondent à une période de forte croissance économique, durant laquelle l'Etat central organise la régulation économique sur le territoire national et met en place les leviers financiers, opérationnels et spatiaux nécessaires à son organisation. Cette politique économique étatique s'inscrit dans le cadre du Plan et repose sur le principe de l'économie dirigée, consacrant la prise en charge du portage de l'intérêt des entreprises par les pouvoirs publics centraux au nom de l'intérêt général. Elle accorde une place importante au volet spatial de l'intervention publique, notamment à travers l'aménagement du territoire et l'urbanisme. Elle est déclinée dans l'agglomération lyonnaise de façon relativement autoritaire par la technocratie étatique, qui met en œuvre les objectifs industriels et tertiaires de développement économique des grands groupes nationaux par le biais de la politique des métropoles d'équilibre. Le rôle traditionnel des organismes patronaux et des acteurs économiques locaux dans la conduite de la régulation économique territoriale est passablement remis en question et éclipsé par l'attitude hégémonique des services de l'Etat. La création de la Communauté urbaine de Lyon et de ses bras exécutants opérationnels (Atelier d'urbanisme, Société d'économie mixte d'aménagement) renforce d'autant plus la mainmise étatique sur l'expertise et la conduite politique en matière d'intervention économique.
Avec la pérennisation de la crise économique à partir de 1975, l'Etat se décharge progressivement de la responsabilité de la politique économique sur le niveau local. Son action a toutefois permis de moderniser et de développer la base économique lyonnaise, grâce à l'aménagement de vastes zones industrielles dans les communes de banlieue et au lancement d'un important programme d'immobilier de bureaux autour du centre directionnel de la Part Dieu à Lyon. Le relatif échec de l'intervention centrale sur le territoire local, destinée à promouvoir les intérêts des grands groupes industriels et tertiaires nationaux, favorise cependant la réémergence des acteurs économiques et des structures patronales dans la gestion économique de l'agglomération lyonnaise, aux côtés des autorités publiques communautaires. Ceux-ci se chargent notamment de reprendre en main la défense de l'intérêt des entreprises, en introduisant la culture managériale et stratégique dans la conduite de la régulation économique territoriale.
Ce processus de territorialisation de l'action économique est confirmé et renforcé par la Décentralisation depuis les années 1980. La période récente est ainsi marquée par la montée en puissance politique et institutionnelle des pouvoirs publics locaux dans la gestion économique de l'agglomération lyonnaise. Celle-ci résulte d'une mutation profonde du cadre référentiel qui guide l'organisation de la régulation économique à l'échelle des territoires. La concurrence et la compétitivité économique se déplacent en effet de l'échelle nationale au niveau des territoires locaux, parallèlement à l'affirmation de la mondialisation économique. Elles deviennent les valeurs centrales dans la définition des nouvelles politiques urbaines. Cette évolution majeure du contexte d'ensemble se traduit par l'appropriation politique de l'impératif économique par les autorités lyonnaises, qui en font l'enjeu dominant de la politique de développement territoriale de la métropole. Les importantes évolutions de l'organigramme du Grand Lyon reflètent également le développement de la compétence économique au sein des services techniques communautaires et la volonté politique d'affirmer le rôle des pouvoirs publics locaux en matière de régulation économique territoriale.
Le management stratégique et la démarche de projet sont érigés en modalités privilégiées de la conception comme de la mise en œuvre de la politique économique locale. Appliquées à la planification territoriale, à l'urbanisme et à l'aménagement de l'espace, ils permettent une instrumentalisation renforcée de ces champs d'action publique au service de l'impératif de développement économique. Ils favorisent plus globalement une logique d'intégration fonctionnelle des politiques urbaines locales à des fins de compétitivité économique du territoire. La recherche de transversalité et de mise en cohérence des volets urbain et économique de l'intervention de la collectivité bute cependant sur les tentations d'intervention trop stratégiques et spécialisées des services économiques communautaires, qui souffrent d'une relative inadéquation entre leurs ambitions d'action sur les filières économiques ou le volet technologique, et leurs réelles capacité d'expertise ou d'action sur le territoire local.
Sur un plan plus politique, l'émergence du Grand Lyon au centre du système d'acteurs local de la régulation économique contraint les organismes à vocation économique à reconsidérer leur positionnement dans la défense et la promotion de l'intérêt des entreprises par le biais de l'action publique territoriale. La gouvernance économique lyonnaise est en effet dominée par les autorités communautaires, qui tendent à tisser des liens plus nombreux et directs avec le monde des entreprises, et à prendre en charge de façon plus ou moins explicite et légitime l'intérêt économique des acteurs privés.
Pour chacune des deux grandes périodes – 1950-1980 et 1980-2005 –, la démonstration combine donc trois angles d'analyse : le fonctionnement de l'économie les référentiels qui guident l'action publique ; les modalités techniques et opérationnelles de mise en œuvre de la politique économique ; l'organisation politique et institutionnelle du système d'acteurs et le mode de gouvernement de la régulation. Une attention particulière est en outre portée aux relations entre les sphères politique et économique, ainsi qu'au rôle du niveau local par rapport à celui de l'Etat central. L'objectif de ce travail est de mettre en évidence la prise de leadership politique du Grand Lyon au sein du système d'acteurs local en matière de régulation économique territoriale. L'intégration du portage de l'intérêt des entreprises par les pouvoirs publics locaux se réalise au détriment du rôle historique des acteurs économiques et au risque de la représentation démocratique. Elle interroge les limites de l'engagement de l'intérêt général local dans le jeu de la concurrence économique et de la course à l'attractivité selon la nouvelle logique libérale.
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Dates et versions

tel-00356525 , version 1 (27-01-2009)
tel-00356525 , version 2 (04-05-2009)

Identifiants

  • HAL Id : tel-00356525 , version 1

Citer

Rachel Linossier. La territorialisation de la régulation économique dans l'agglomération lyonnaise (1950-2005). Politiques - Acteurs - Territoires. Géographie. Université Lumière - Lyon II, 2006. Français. ⟨NNT : ⟩. ⟨tel-00356525v1⟩
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