Lettre à l'Insensé (II). Prendre d'assaut le malentendu d'écrire - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2019

Lettre à l'Insensé (II). Prendre d'assaut le malentendu d'écrire

Résumé

Il y a trois ans, c'est ainsi que je commençais ma lettre, ami insenséc'était au théâtre de la Criée, octobre déjà, nous étions rassemblés à Marseille par la critique (sa question : son inquiétude : sa critique ; et la Criée pouvait être le lieu idéal pour, en jetant ce mot en l'air, le voir tristement flotter et retomber lentement parmi nous), et la critique y était alors un « art de la rencontre 2 » et je tentais d'esquissais ces lignes de frictions entre critique et action, suivant l'appel de Marx pour qui « l'arme de la critique ne peut remplacer la critique des armes 3 ». Je l'avoue, ce motcelui de rencontrecontinue de me rendre perplexe quant à son efficacité et son rôle. Depuis, j'ai appris qu'on ne rencontre pas seulement des amis, mais aussi son adversaire. Et si on rencontre les êtres dans ce qu'ils font, plutôt que par ce qu'ils sontdisait à peu près Deleuze-, on les rencontre aussi par ce qu'ils nous font et par ce qu'ils défont. Et ce monde défait plus qu'il ne tisse. Rencontre : mot qui continue donc de me rendre fébrile quant à sa promesse, même si c'est au nom de la fébrilité, parce qu'elle demeure inconnaissable avant de l'éprouver, qu'on prend des trains Inouï(s) qui ont trahi les grèves. Et qu'on écrit, dans le souci d'affronter l'adversité, peutêtre ? Le lieu de l'écriture serait finalement comme la Criée : la faveur du silence en plus. Il y a trois ans, je finissais l'écriture de cette lettre dans le désir, maladroit comme savent l'être les désirs informulables, de se préparer : si nous sommes liés par la critique, et si la critique nous liait au monde, c'était parce qu'elle était ce lieu d'appui, comme une planche d'appel avant le grand saut dans le monde, et qu'il nous fallait armer notre corps et notre intelligence pour s'y jeter, avant de s'y jeter et de l'affronter même, pourquoi pas. Ainsi donc, la critique comme outil, comme levier, comme espace de la préparation : chambre d'appel, lieu qui précèdenon qui succède à l'objet d'art. Pratique seconde dans la mesure où c'était aussi une anacrouse, une levée. Et le spectacle : non pas forme devant quoi on se tient, achevée et achevant l'expérience, mais processus qui lance l'écriture, que l'écriture va prolonger, faire trembler, selon la logique de la réplique théâtrale et sismique. À cette nécessité de la préparation, je mesure bien pourtant les failles et les dangers. Parce que le monde n'attend pas, qu'il déborde sans cesse, qu'il nous prend par surprise : c'est sa nature. La critique, dans l'isolement où sans doute je la tenais trop, s'armait dans la solitude du monde : et cette solitude, je ne voyais pas que c'était le monde lui-même qui l'avait aménagé pour organiser la séparation de la pensée et de l'action : qu'ainsi pouvait peser sur la solitude la menace de la complicité.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-03168142 , version 1 (12-03-2021)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-03168142 , version 1

Citer

Arnaud Maisetti. Lettre à l'Insensé (II). Prendre d'assaut le malentendu d'écrire. Écrire l'inouï. La critique dramatique dépassée par son objet, Oct 2019, Lyon, France. ⟨halshs-03168142⟩
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