Résumé : Le corpus des Lettres de Phalaris relève de l’épistolographie fictive. Son ou ses auteurs sont inconnus et sa datation est débattue. Le corpus comprend 148 lettres de longueur variable attribuées à Phalaris, le tyran sicilien du VIe siècle avant J.-C, devenu l’archétype du gouvernant cruel. Les lettres, rédigées à la première personne, sont adressées soit à des individus (famille, amis ou ennemis), soit aux peuples de différentes cités ; elles construisent un portrait moral du tyran.
Dans le cadre d’une réflexion sur le thème « conseiller, diriger par lettres », il nous paraît intéressant d’étudier ce cas paradoxal : que se passe-t-il lorsque le donneur de conseils n’est pas un personnage respectable mais un tyran haï ? Quels types de conseils, d’avertissements, d’exhortations donne-t-il ? Comment comment construit-il son autorité ? Que valent finalement ses conseils ?
Le discours prescriptif est très présent dans les Lettres de Phalaris : conseils, exhortations, mises en garde assorties de menaces abondent. Ils concernent des domaines très différents (politique, morale, philosophie) en fonction des destinataires auxquels les lettres sont adressées. Ainsi, Phalaris se présente à travers ses lettres comme une figure d’autorité : il affiche sa supériorité et se pose en homme de pouvoir et d’action, mais aussi en homme qui connaît ses semblables et est à même de les juger. Mais les conseils de Phalaris sont-ils bons à suivre ? Le regard porté par l’auteur sur son personnage principal semble en effet porteur d’une ironie qui met à mal l’autorité de Phalaris.