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Chapitre d'ouvrage Année : 2020

"Le dieu touche, le patient voit : jeux sensoriels et sensuels dans les iamata d’Epidaure"

Résumé

Les récits de guérisons divines rédigés à partir du ive siècle av. J.-C. dans les sanctuaires d’Épidaure sont un curieux mélange de religiosité matérielle et d’expériences multisensorielles. Aujourd’hui encore, on qualifie souvent les interventions d’Asclépios de miracles (« miraculous healing » en anglais) mais l’épiphanie du dieu est tout sauf miraculeuse. D’abord parce qu’elle est souhaitée par les patients qui venaient dormir à Épidaure dans l’espoir d’être guéris ; ensuite, parce que le comportement d’Asklépios, dans ces récits, est loin de celui d’une divinité immanente et inaccessible et suscite ainsi des émotions variées de la part des patients, qui vont au-delà de la simple reconnaissance après guérison. Venir à Épidaure quand on est malade, c’est accepter d’avoir ses sens en alerte : le dieu joue avec les nerfs, au propre comme au figuré, et c’est là un des grands paradoxes de ces récits : la guérison intervient lors de l’incubation, c’est le principe de ces traitements divins1 : le patient vient s’allonger dans la salle réservée à cet effet à côté de l’abaton, s’endort, et voit le dieu dans son rêve. Le lendemain, il se réveille guéri, selon la formule habituellement inscrite. Le dieu est donc censé ne faire qu’une apparition onirique et le patient de ne pas être éveillé, ne pas voir, ne pas entendre, ne pas sentir, ne pas ressentir ; le paradoxe, c’est que les récits épidauriens transgressent le mode de fonctionnement habituel des thérapies asclépiéiennes dans les autres sanctuaires et nous livrent un dieu qui touche, qui parle, qui écoute, et des malades qui voient, qui entendent, qui sursautent, bref, qui réagissent par tous leurs sens aux soins administrés par Asclépios. La mise en scène des sens ici sert les intérêts du sanctuaire en allant pourtant à l’encontre de toutes les règles rhétoriques de ce genre d’inscription.
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Dates et versions

halshs-03041126, version 1 (04-12-2020)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-03041126 , version 1

Citer

Clarisse Prêtre, Béatrice Caseau. "Le dieu touche, le patient voit : jeux sensoriels et sensuels dans les iamata d’Epidaure". Béatrice Caseau Chevallier & Elisabetta Neri. Rituels religieux et sensorialité (Antiquité et Moyen Âge), pp.69-75, 2020. ⟨halshs-03041126⟩
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Dernière date de mise à jour le 21/04/2024
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