;. Walter and . Walker, Un indice frappant à l'appui de la convergence de /?/ vers /ö/ est, en effet, le trait arrondi du premier dans une large partie du domaine francophone, qui reste d'ailleurs à déterminer 20 . Ce trait, qui ne peut être qu'emprunté aux voyelles lexicales /ø/ et /oe/, est récent en tant que propriété du schwa 21 . Du moins ne semble-t-il pas encore attesté dans les ouvrages, Martinet 1974 : 159), pp.51-52, 1977.

, On en est encore loin. C'est sans doute le cas à la finale, comme on vient de le voir : dans lis-le, sur ce, etc., on s'attend à trouver une voyelle systématiquement arrondie, y compris, notons-le, là où, comme en Belgique (cf. n. 20), le schwa ne l'est pas toujours 22 . Néanmoins, que le schwa se soit arrondi ou pas, il existe toujours une différence, en position interne, entre un /ö/ stable (par exemple, celui de ameuter) et un /ö/ instable (amener, acheter ~ am'ner, ach'ter), à la variation phonologiquement conditionnée ou "libre" : cf. je me dis, une pelouse ~ la p'louse pour le premier cas, la pelouse ~ la p'louse pour le second 23 . Si neutralisation il y a, elle se réduit, en termes autosegmentaux, à l'aspect mélodique, soit aux traits, mais ne touche pas à l'aspect positionnel. Le /ö/ instable du français moderne serait un segment hybride. Il n'est plus vide : comme le /ö/ stable, il possède les trois éléments vocaliques fondamentaux I (antériorité), U (arrondissement) et A (aperture) (cf. Kaye et al. 1995) 24, 1994.

. Bürki, Sur la variabilité phonétique du e muet, cf. Martinet (1945 : 63 et suiv.), Pleasants, p.286, 1956.

, ce sont soit des voyelles centrales vides de traits -notées /?/ ou /?/, celles qui sont souvent appelées "schwas" (français classique) -, soit des voyelles antérieures -typiquement /i/ ou /e/ (portugais brésilien, espagnol) -, soit des copies de la voyelle lexicale voisine (somali) -ce qui renvoie au premier cas : la voyelle vide est simplement remplie par propagation des traits adjacents, Et insolite. Les langues du monde attestent trois grands types de voyelles neutres (c'est-à-dire épenthétiques ou transparentes dans les processus harmoniques

, Une autre neutralisation aurait lieu, dans les variétés à schwa arrondi, là où

, Ce dernier cas est naturellement lié à la variation dialectale (cf. références n. 20), mais probablement aussi à la fréquence lexicale : toutes choses égales par ailleurs, le e de pelouse doit plus souvent tomber que celui de pelage

, Du point de vue d'une théorie des primitives phonologiques, il est intéressant de relever la similitude acoustico-perceptive entre la voyelle qui n'a rien (le /?/) et celle qui a tout (le /ö/), l'une étant l'intersection des trois phonèmes vocaliques primaires -/i/ = {I}

, flottant : il n'a pas de position squelettale propre et reste soumis aux contraintes sur la syllabation générant la seule alternance productive -ö / zéro -en français moderne (cf. § 1.2). Bref, ce schwa-là apparaît comme un noyau flottant non vide

, également spécifiées -/?/ et le /ö/ flottantqui alternent selon l'allomorphe sélectionné. À noter que, le /ö/ instable étant plus fréquent que le /ö/ stable, certains /ö/ étymologiquement stables tendent à devenir instables : ainsi on entend souvent déj'ner, comme on dit ach'ter, am'ner. On relèvera que l'allomorphie lexicale n'accompagne pas ce phénomène : personne, me semble-t-il, ne dira *je déj[?]ne. Une telle irrégularité serait difficilement possible si l, Dans ces conditions, on comprend d'autant mieux que l'alternance schwa/è soit devenue supplétive : on a là deux voyelles

, Mais surtout on comprend aussi la façon dont cette alternance a été lexicalisée. À l'instar de formes comme [?oemdi] (je me dis) ou [moef] (meuf < femme), la forme virtuelle je [moen] a été rendue phonologiquement licite par la dérive de l'opposition classique /?/ ~ /ö/ : la contrainte interdisant la réalisation [C?C] de /C.C./ est toujours active

. De-/cöc, La migration de /?/ vers /ö/ aura ainsi joué en français le même rôle que l'affaiblissement de *[VCC#] en polonais dans la lexicalisation de l'allomorphie. En polonais, le [?] épenthétique de [VC?C] a été phonologisé en se confondant avec le /?/ lexical de la langue

. Le, sans qu'aucune de ses contraintes syllabiques ait changé, la "coloration" du schwa y aura suffi. Le mécanisme à l'oeuvre a opéré sur la marque dans le premier cas, sur la forme sous-jacente dans le second : s'il tend toujours à occuper des noyaux flottants

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