"Le sucre du voiturier, le café du négociant et le chocolat du marquis. Itinéraires et consommations des produits exotiques dans les villes de l'arrière-pays de Saintonge-Angoumois au XVIIIe siècle" - HAL Accéder directement au contenu
Communication dans un congrès Année : 2019

"Le sucre du voiturier, le café du négociant et le chocolat du marquis. Itinéraires et consommations des produits exotiques dans les villes de l'arrière-pays de Saintonge-Angoumois au XVIIIe siècle"

Résumé

L’arrière-pays de Saintonge-Angoumois forme une périphérie océane de professions maritimes, d’émigration ultra-marine et de circulations négociantes étroitement associée aux ports atlantiques de La Rochelle, Rochefort et Bordeaux. Dans le cadre de la réalisation d’une histoire maritime de l’arrière-pays de Saintonge-Angoumois, l’approche de la culture matérielle entre la fin du XVIIe siècle et la fin du XVIIIe siècle apparaît comme le prisme incontournable d’une perception de l’impact de l’intégration de l’arrière-pays aux dynamiques atlantiques. En s’appuyant sur le mémoire de la généralité de La Rochelle de l’intendant Bégon, sur de rares livres de comptes comme celui du comte de Jarnac, sur la correspondance des négociants cognaçais ou angoumoisins de la vallée de la Charente avec Bordeaux, on peut esquisser une restitution des itinéraires de l’acheminement, fluvial ou routier des denrées exotiques entre les ports et les villes de l’intérieur. Les procès-verbaux constatant la non-conformité des marchandises établis à la livraison devant notaire laissent également entrevoir les modalités de l’approvisionnement. Ainsi, entre le port et la demeure, l’arrière-pays de Saintonge-Angoumois est impliqué dans une aire de chalandise portuaire atlantique que l’intendant du Limousin Turgot cherche à agrandir pour lier sa généralité à l’Océan. Un négociant rochefortais envisage même dès 1777 d’installer une raffinerie à sucre sur les bords de la Charente pour approvisionner l’Angoumois, le Périgord et le Limousin en sucre des Antilles. L’itinérance des denrées constitue le premier axe contextuel des chemins de l’exotisme de l’arrière-pays étudié. A partir des inventaires après décès recensés dans les villes riveraines de la Charente, depuis Saint-Savinien, l’approche de la culture matérielle tant des demeures des élites que celle des boutiques des marchands et négociants livre une gamme de modalités de consommation des denrées coloniales (le thé, le café, le sucre et très exceptionnellement, le cacao). En confrontant la localisation domestique des denrées avec les ustensiles qui leur sont associés ou encore avec le mobilier des pièces les abritant, il est possible d’envisager les moments et les sociabilités qui étaient l’occasion de consommer ces denrées, entre l’espace de représentation du salon ou de la salle à manger et l’espace intime et privilégié de la chambre ou du cabinet. Au-delà des denrées coloniales, les bois exotiques du mobilier, la présence de tabac sont des éléments indiquant le raffinement des arts de vivre. L’absence de ces éléments complémentaires atteste d’une consommation de ces denrées selon des modalités plus simples. L’intérêt porté aux matériaux des cafetières, des théières, des tasses et des cuillères, des sucriers ou des sorbetières, du fer blanc à la porcelaine de Strasbourg, en passant par la terre de pipe ou la faïence d’Angleterre, rend possible une approche diversifiée de la consommation de ces produits, relativement peu étudiée pour les terres de l’intérieur. La description de cette culture matérielle associée aux denrées constitue un second axe d’analyse, permettant d’appréhender une histoire sociale de la consommation. Mis en relation avec le profil des consommateurs, les denrées coloniales sont aussi révélatrices d’une société élitaire formée par la petite noblesse d’offices des élections, la noblesse de robe du présidial, du siège royal ou du Parlement, ou encore les commissaires des guerres ou chef des forges de la Marine dans l’arrière-pays. Le profil des officiers de justice ou de la Marine envisagé dans un troisième temps suppose de restituer des trajectoires biographiques justifiant cette consommation de produits coloniaux dans l’arrière-pays. La denrée coloniale fournit ainsi l’occasion de renouveler l’approche des périphéries portuaires intérieures en les hissant au rang de l’histoire impériale, globale, connectée. Elle permet de dépasser et d’enrichir une histoire de l’Angoumois qui s’est longtemps résumée pour l’époque moderne à l’approvisionnement de l’arsenal de Rochefort en produits des forges de l’arrière-pays.
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Dates et versions

halshs-02946097, version 1 (22-09-2020)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-02946097 , version 1

Citer

Jean-Christophe Temdaoui. "Le sucre du voiturier, le café du négociant et le chocolat du marquis. Itinéraires et consommations des produits exotiques dans les villes de l'arrière-pays de Saintonge-Angoumois au XVIIIe siècle". La Nouvelle Aquitaine et les Outre-Mer: le métissage des cultures matérielles, NAOM (Michel Figeac, Caroline Le Mao, Oct 2019, Bordeaux, France. ⟨halshs-02946097⟩
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Dernière date de mise à jour le 07/04/2024
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