, Pour Chateaubriand, auteur selon ses propres termes d'une apologie 30 , il fallait prendre la plume parce que la religion était attaquée -il fallait bien répondre à des attaques (donc prendre la peine de les considérer, ce à quoi seul un laïc pouvait s'employer). Quand, d'une même plume, Chateaubriand parle de la « sublime apologie du christianisme » de Pascal, on notera d'abord qu'il ne donne pas le titre d'un ouvrage, mais qu'il désigne une entreprise : Pascal s'est lancée dans une apologie. Deuxièmement, cette apologie implique des attaques préalables, même si celles-ci sont moins importantes à l'époque de Massillon qu'à celle de Chateaubriand. En revanche, lorsque V. Cousin emploie le même terme d'apologie, il n'a plus en vue une opération défensive, christianisme peuvent bien s'offusquer d'une pratique aussi littéraire, l'auteur y voit la seule réponse appropriée aux moqueries et aux sarcasmes

, Entre la double apologie de Chateaubriand -apologie du christianisme (1802) et apologie de sa propre apologie (1803) -et la qualification donnée par V. Cousin aux Pensées de Pascal (1842), le terme d'apologie connaît un glissement de sens

. Originellement and . Chateaubriand, apologie est une excuse, une défense consécutive à une attaque ; pour V. Cousin, le mot a pris la signification, qu'il conserve pour nous aujourd'hui, d'une entreprise de promotion. Lorsqu'on fait l'apologie de quelque chose

. +/+/+,

, Il est temps de résumer les enseignements de notre enquête et d'énoncer les principaux points établis -sans préjuger d'éventuels éléments nouveaux qui viendraient s'ajouter au dossier : 1/ À l'époque de Pascal

, Il s'applique essentiellement à des personnes. La première utilisation du mot d'« apologie » pour désigner les Pensées date de 1803 et de Chateaubriand

. /-c', est en 1842, dans son célèbre Rapport, que Victor Cousin adopte ce vocable, mais en le prenant dans un sens qui n'est plus celui de Chateaubriand. Le philosophe est donc bien l'introducteur de cette nouvelle notion dans la critique pascalienne

, Apologie implique pour lui incertitude spirituelle et renonciation à la philosophie : « une foi sombre et mal sûre d'elle-même 32 », remède désespéré à un scepticisme invincible. La perspective d'une apologie exclut notamment l'idée de grandeur humaine et l'usage de la raison -deux axes essentiels des Pensées

, Chateaubriand parle de son Génie du Christianisme comme d'une apologie. C'en est une désignation alternative. Cf. « L'auteur du Génie du Christianisme, obligé de faire entrer dans le cadre de son apologie quelques tableaux pour l'imagination?, p.23

C. , Il lui conseille de traduire apologia par « excuse ». On notera que ce sens d'excuse, 1547, écrit à M. de Falais que « le mot d'apologie n'est pas usité en français » (OC, éd. Cunitz?, 1863, vol.12

. Victor-cousin, Rapport à l'Académie Française? (1843), op. cit, p.163

/. V. , Cousin fait subrepticement remonter son appellation à des temps antérieurs de son oeuvre (1829), pour lui attribuer l'évidence qui va de pair avec la patine

, / Dix ans après le Rapport de 1842, la cause est entendue et l'opération cousinienne couronnée de succès : le terme d'Apologie est devenu le titre même de l'oeuvre de Pascal

, Pascal était à sa mort occupé à écrire une Apologie de la religion chrétienne, dont il ne nous reste que des bribes, publiées sous le nom de Pensées. C'est ce dont nous informe, Dorénavant, dans tous les esprits, et selon les manuels d'histoire littéraire

, L'apologie est une réponse à des reproches généraux, à des bruits vagues, comme ceux que l'on faisait courir contre les premiers chrétiens, et est ordinairement spontanée : les Pensées de Pascal devaient, dans l'esprit de l'auteur, p.33

, auteur ») et l'on connaît le titre qu'il avait choisi pour son oeuvre ! La proposition discutable d'un philosophe hostile s'est insensiblement transformée en élément objectif d'information. V. Cousin ne manque certes pas d'arguments à l'appui de sa thèse, mais son intention n'est pas neutre et la terminologie qu'il impose entend servir une lecture particulière

L. Définitions-de-nom and ». , Acceptons que le travail de Pascal, interrompu par la mort, puisse recevoir le titre d'apologie. Mais retenons en même temps l'avertissement qui fait suite : « Il faut seulement prendre garde qu'on n'abuse de la liberté qu'on a d'imposer des noms, en donnant le même à deux choses différentes 35 . » Peut-être Pascal travaillait-il à ce que nous appelons aujourd

E. Mesnard and O. C. Iii, , vol.7, p.394

. Ibid,