À. Urbaines and . Partir-des-xi-e--xii-e-s, comme le corps et l'âme chez l'être humain ? 34 Ce rapport « binomial » est-il d'ailleurs strict, exclusivement binaire, ou devrait-on prendre en considération d'autres formes spécifiques d'organisation sociale ? Certains ajoutent en effet la seigneurie, faisant cependant de la [373] paroisse et de la seigneurie des structures de domination de la communauté -une domination depuis l'extérieur 35 . La même chose prévaut dans la perspective communaliste, qui fait de la communauté une forme d'organisation, disons, « horizontale », destinée à contrebalancer la domination seigneuriale, et qui conduit B. Kümin à voir dans la paroisse l'un des trois idéaltypes de ce qu'elle choisit d'appeler « communauté locale » : la ville, le village et la paroisse, qui certes, « à première vue apparaissent plutôt distincts mais qui -dès qu'on se penche sur les structures sous-jacentes, les activités collectives et les valeurs culturelles -ont également beaucoup de choses en commun » 36 . Et quoique ses racines soient ecclésiastiques, la paroisse a pour B. Kümin sull'alto medioevo, 33 Mais alors, de quelle nature est ce rapport : de juxtaposition, d'inclusion, de composition -c'est-à-dire que chacun des éléments serait pensé comme un composant spécifique mais indissociable du tout, pp.380-395, 1982.

, Une telle structuration identique (ou du moins homologique) éventuelle de la personne et des formes sociales ne serait pas une chose inouïe : on l'observe dans d'autres sociétés. H. Lefebvre, La production de l'espace, pp.225-236, 1974.

A. Guerreau, ». Occidente-medievale-:-struttura-e-dinamica-di-uno-'spazio'-specifico, D. E. Castelnuovo, G. Sergi-;-et-«-corps, J. L. Goff et al., envisage également la réalisation spatiale du binôme chair/esprit ; J. Baschet, « Âme et corps dans l'Occident médiéval : une dualité dynamique, entre pluralité et dualisme », Archives de Sciences sociales des religions, rappelle à ce propos le cas des villages tzeltals, au Mexique, présentés par P. Pitarch Ramón, Ch'ulel : una etnografía de las almas tzeltales, vol.112, pp.230-245, 1996.

C. Casagrande and S. Vecchio, Atti del V Convegno di studi della Società Italiana per lo Studio del Pensiero Medievale (Venezia 25-28 sett. 1995), Florence, Sismel, 1999 ; J. Baschet, « Âme et corps? », art. cité. ; id., Corps et âmes. Une histoire de la personne au Moyen Âge, 2016.

. Dans-le-recueil-les-communautés-rurales, . Iv?, and . Le-questionnaire-de-base, estime aussi possible d'examiner les communautés paysannes à travers trois types de « rassemblements institutionnels » : « la paroisse, la seigneurie, l'espace jouissant d'un texte de franchise », et surtout les deux premières, qui « sont bel et bien deux éléments qui structurent à la fois la surface territoriale et l'espace relationnel des dépendants, vol.10, pp.7-8, 2003.

/. Palgrave and . Macmillan, , pp.1-2, 2013.

, Europe préindustrielle étaient les villes, les villages et les paroisses » -le « type "classique" » étant également qualifié p. 40 comme « "type idéal" ». On reviendra plus loin (dans la section IV.) sur les enjeux théoriques de ce travail, mais la perspective « communaliste » (revendiquée par B. Kümin dans The communal Age?, p. 6, 40) et le risque téléologique inhérent à cette approche ont été territoire paroissial dans le bas Maine au Moyen Âge », dans B. Merdrignac et alii (dir.), La paroisse, elle insiste sur le fait que « les trois types "classiques" de communautés locales dans l, pp.369-402

A. Derville, « Les communautés villageoises? », art. cité, pp.222-223

V. Corriol and . La, Identification et dénomination de l'individu dans la, pp.53-69

N. Carrier and F. Mouthon, Paysans des Alpes. Les communautés montagnardes au Moyen Âge, pp.102-103, 2010.
URL : https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-00805638

. Cf and . Supra, Chap. 6, ainsi que M.H. Gelting, « Between Prince and Peasant? », art. cité. 99 . Cf. supra, Chap. 5. 100 . Cf. supra, pp.36-39

B. Kümin, The Shaping of a Community?, op. cit. Cf. aussi « The English Parish? », art. cité, qui replace la paroisse anglaise dans un cadre européen plus large et fournit de ce fait un bon panorama de la recherche sur la paroisse médiévale (C. Burgess, « Time and Place : The Late Medieval English Parish in Perspectives, pp.1-28

. En-europe, . De-manière-communale, and . La-campagne, aurait de ce fait pas eu la même spatialité que la paroisse-type continentale 103 (centripète ou formant d'un des deux gradients spatiaux observables), ce qui expliquerait alors aisément pourquoi, sans doute entre les XIII e et XV e s., ont été mises en place des processions paroissiales qui consistent à aller jusqu'aux limites du finage et appelées beating the bounds 104 . R. Hilton signale lui aussi que la communauté villageoise anglaise a été en quelque sorte « phagocytée » (la métaphore n'est pas de lui) par la communauté manoriale, qui certes subsume le caractère fréquemment polynucléaire de l'habitat (les villages se composant d'un bourg et de nombreux hameaux) : mais comme en même temps il y avait souvent plusieurs manoirs par village, c'est la paroisse qui, en définitive, assurait l'appartenance commune -ce qui explique sans doute pourquoi c'est à l'église paroissiale qu'étaient payées les amendes dues en cas d'infraction aux règlements locaux (les bylaws) du village de Wimeswold (Leicestershire), contrôlé par trois manoirs 105 . La raison de cette particularité de l'Angleterre (la faiblesse du vill) est usuellement rapportée à la vigueur du pouvoir royal anglais, et notamment à l'écrasement de [400] la révolte de 1381 106 -ce qui est évidemment bien trop court : d'où vient cette vigueur du pouvoir royal ? Pourquoi l'écrasement des Jacques, du Bundschuh, de l'Armer Konrad, de la Guerre des Paysans sur le continent n'y a-t-il pas 102 . B. Kümin, The Shaping of a Community?, pp.48-49

G. C. Homans, English Villagers of the Thirteenth Century, p.368, 1941.

S. Hindle, On trouve fréquemment dans la bibliographie (y compris chez Homans) l'idée selon laquelle cette pratique dérive de cultes antiques (romain ou germanique) de la fécondité, ce qui est évidemment indémontrable et n'est qu'un exemple du « continuationnisme » qui sape classiquement l'histoire des processions et est dénoncé par L. Kuchenbuch et alii, « La construction processionnelle?, « Beating the Bounds of the Parish? », art. cité, pp.163-166

R. Hilton, pour ce qui est de l'hétérogénéité morphologique et manoriale des villages et des paiements à l'église paroissiale de Wimeswold. Sur la paroisse comme cadre de réglement des affaires communes dans les villages divisés en plusieurs manoirs, cf. aussi B. Kümin, The Shaping of a Community?, op. cit., p. 53. 106 . B. Kümin, The Shaping of a Community?, Les communautés villageoises en Angleterre au Moyen Âge », dans Les communautés villageoises en Europe occidentale?, p.40

P. Blickle, K. Skizzen-einer-gesellschaftlichen-organisationsform, and O. Munich, dont les villages ont pu être assimilés au Mir russe, par l'existence d'un droit unifié à tout le royaume et à tous les niveaux (la common law), à l'inverse de ce qui se fait partout ailleurs, où l'on voit alors coïncider les communes avec des droits particuliers au sein de royaumes et principautés hétérogènes du point de vue juridique, Et que faire des bylaws, ces innombrables statuts locaux qui, à partir de la fin du XIII e s., et officiellement énoncés au nom de l'ensemble des tenanciers de tel ou tel manoir, prétendent réglementer les pratiques collectives locales (cf. W.O. Ault, Open-Field Husbandry and the Village Community. A Study of Agrarian By-Laws in Medieval England, p.115, 1965.

, ?) qui, en faisant disparaître la pertinence de la communauté manoriale (notamment pour le règlement des conflits), a aussi affaibli la communauté villageoise

, Ceci me semble cependant caractéristique non seulement de l'Angleterre mais aussi de l'ensemble de la « périphérie domaniale » de l'Europe (cf. J. Morsel, L'aristocratie médiévale, Ceci fait sens par rapport aux observations présentées en Introduction, notamment aux n. 20 et 24, à propos du « communalisme » (dont l'articulation, chez P, pp.46-53, 2004.

, Sur l'autonomie des producteurs du point de vue de l'usage des moyens de production dans le système seigneurial (et par opposition au système domanial) et sur le leurre des corvées et des redevances, cf. les travaux de M. Barceló et de J. Demade présentés en Introduction, p.24

B. J'utilise-ici-ces-deux-syntagmes-plutôt-que-«-villes, . Kümin, and . Qu, on voit bien en définitive que le problème n'est pas celui d'une forme agglomérée (comme le vill) mais du cadre local des fonctions communautaires, Les recherches récentes sur la formation des paroisses en Angleterre : similitudes et différences avec la France », Médiévales, vol.49, pp.33-44, 2005.

B. Kümin and «. Parish?, , p.24

, Cette question a d'ailleurs été [403] précocement au coeur d'un pan de la théorie communaliste, âprement discuté, celui de la « Réformation communale » 115 , qui réaliserait (enfin?) l'idéal chrétien déjà présent dans les premières communautés chrétiennes mais auquel les paroisses médiévales ne permettait pas d'advenir -entre autres à cause du problème de la désignation du curé. Cela dit, on remarquera que, du côté de la paroisse catholique, c'est aussi la période de la Réformation -en l'occurrence 112 . C'est le schéma gierkien Herrschaft/Genossenschaft déjà évoqué supra, n. 94. O. Bobineau, « Histoire du pouvoir de la paroisse catholique romaine : entre coopération et domination », dans B. Merdrignac et alii (dir.), La paroisse, communauté et territoire?, op. cit, distingue lui aussi deux formes de rapport entre curé et ouailles : la domination (« pouvoir sur ») et la coopération (« pouvoir avec, pp.113-126

, Si le cas de la Suisse est fondamental de ce point de vue, c'est aussi en raison de sa place dans la construction du modèle du « communalisme » -non seulement parce que le terme lui-même est d'origine suisse, mais aussi et surtout parce que les communautés suisses sont une référence

L. Dans-le-dictionnaire-historique-de-la-suisse,

P. Blickle-;-dans, R. Guggisberg, and G. G. , Oldenbourg, 1985 ; critiques synthétisées par T. Scott, « The Communal Reformation between Town and Country, Gemeindereformation. Die Menschen des 16. Jahrhunderts auf dem Weg zum Heil, pp.299-317, 1993.

. Dans-le-cadre-de-la-contre, Celle-ci restait en effet pensée (et c'était encore le cas dans le Corpus iuris canonici de 1917 117 ) comme une structure de face-à-face entre le curé et les fidèles, l'un actif et les autres passifs du point de vue du fonctionnement de la paroisse, par opposition assumée à la communauté protestante. Toutefois, en termes de droit public, la question se posait de savoir à qui appartenaient les biens de la paroisse (puisque les saints -bien mentionnés à Sermiers -ne pouvaient guère entrer en ligne de compte?) : ce problème est l'un des aspects de la querelle en France au début du XX e s. (qui s'est traduite par le transfert aux communes de l'entretien des églises), tandis que dans l'espace germanique, c'est avec l'introduction de l'impôt pour les églises, dans la seconde moitié du XIX e s., que la question de la paroisse [404] catholique s'est posée 118 . Du point de vue du droit public, la paroisse catholique allemande (Pfarrei en droit canonique, en l'occurrence subdivision du diocèse dirigée par le curé) devait donc constituer une Kirchengemeinde (terme usité en Allemagne), institution composée des fidèles de la paroisse et ayant en charge les biens ecclésiastiques locaux, à la manière d'une association, tridentine -qui est censée avoir enfin fait advenir la communauté paroissiale 116 . À l'arrière-plan de ce postulat historique, et donc de la distinction entre Pfarrei et Kirchgemeinde, se trouve cependant toute la réflexion juridique du XIX e s., en particulier l'élaboration d'un droit public par rapport auquel le droit canonique ne pouvait que se trouver en porte-à-faux, et avec lui la paroisse catholique, pp.119-121

B. Restif, ;. , and L. , Globalement, les XI e -XIII e s. auraient vu la mise en place du maillage et de la polarisation paroissiale, et les XVI e -XVII e s. l'identification totale des habitants à leur paroisse, c'est-à-dire à la figure des ouailles du troupeau -et c'est alors seulement que la qualité de pasteur du curé, La communauté paroissiale dans les statuts synodaux français du XVII e siècle », dans B. Merdrignac et alii (dir.), pp.129-135, 2000.

F. Coccopalmerio and . De, 359. 118 . G. Fischer, Finanzierung der kirchlichen Sendung. Das kanonische Recht und die Kirchenfinanzierungssysteme in der, vol.74, p.183, 1983.

G. Cornu, Cette définition n'est que l'un des sens juridiques donnés à « Institution », mais c'est celle qui correspond le mieux à l'Anstaltnotamment au sens wébérien, Vocabulaire juridique, 8 e éd. revue, p.499, 2007.

M. Schéma-que-connaissait-bien, .. S. Weber-(cf, . Breuer, . Bürokratie-und-charisma, W. Darmstadt et al., , p.10, 1994.

, Je fais ici référence au lien causal qu'établit Weber entre éthique protestante et esprit du capitalisme : M. Weber, Die protestantische Ethik und der Geist des Kapitalismus, 2 e éd, 2006.

B. Kümin-;-de, J. Dhondt, and . Les, 1 : « "Reformation"? should thus be taken to refer only to the early and repeatedly reversed changes under Henry VIII, Edward VI, and Mary Tudor » -c'est-à-dire les vicissitudes antérieures à la constitution d'une église anglicane spécifique à la fin du XVI e s. 124 . Il se réclame, pour ce qui est de la valeur heuristique de la notion de « solidarités » comme forme de sociation

, Staub ne cherche pas pour autant à faire de la paroisse un Verein : outre qu'il n'y a aucune raison de rester prisonnier de l'alternative Verein/Anstalt, il observe surtout la modestie des pratiques communautaires entre les paroissiens, à commencer par les pratiques de commémoration (memoria) 126 , raison pour laquelle il préfère fonder la dimension communautaire des paroisses sur les « solidarités paroissiales », en l'occurrence des solidarités actives au sein du cadre paroissial (solidarités parentales ou consensuelles -ici confraternelles ou professionnelles) 127 . Quant à ce fonctionnement solidaire (caractérisé par un investissement caritatif débordant le strict cadre canonique et théorique des oeuvres pieuses, Selon Dhondt, le terme général de « solidarités » désigne les actionnalité communautaire (Gemeinschaftshandeln), ce qui le conduit à parler de « communauté paroissiale » 125 . M, vol.12, pp.529-560, 1957.

, Par conséquent, la paroisse comme Gemeinde serait moins le résultat d'une rupture (celle de la Réformation) que l'aboutissement d'une transformation amorcée quelques siècles plus tôt 128 -même si le droit canonique n'en tient pas compte, on l'a vu, avant la fin du XX e s., et même si, à Nuremberg, cette Gemeinde se dissout dans la commune, la fin du Moyen Âge mais procède, selon M. Staub, du tournant pastoral des XII e -XIII e s

. Au, 768 : la paroisse a un rôle « essentiel pour conserver l'esprit de cohésion, de solidarité de tous les membres » du village), 4 (loc. cit.), 7 (solidarités agraires au village et solidarités religieuses à l'église paroissiale) et bien d'autres encore, sans que la notion soit véritablement construite, on reste néanmoins ici encore dans le cadre d'un système binaire, opposant le contrôle vertical et la solidarité horizontale, p.537

M. Staub, Les paroisses et la cité?, op. cit. 126 . Ibid, pp.247-248

M. Étant, . Staub-(le-caractère-«-communautarisant-»-de-la-memoria, K. Le-titre-de-l'ouvrage, and . Schmid, la faiblesse de la memoria au niveau paroissial, à l'inverse de ce qu'on observe dans les métiers, les parentèles ou les confréries, aurait dû le conduire à considérer que la paroisse n'était pas une communauté, au contraire des autres groupements où joue la memoria. Faute de cela (parce qu'il rejette la thèse wéberienne selon laquelle la paroisse-Gemeinde découle de la Réformation, alors qu'avant on aurait eu une paroisse-Anstalt), il doit d'une part adopter pour les groupements en question une autre qualification (celle de « solidarités », on l'a vu) afin de réserver la communauté à la paroisse ; par ailleurs il fait de la faiblesse de la memoria au niveau paroissial le signe de ce que la paroisse perd alors son efficacité communautaire antérieure (ce qui présuppose que celle-ci ait existé, Gedächtnis, das Gemeinschaft stiftet, 1985.

J. Dhondt, un basculement fondamental par lequel « se termine le moyen âge et s'amorce l'époque moderne » ; au-delà d'une telle périodisation (dont Dhondt reconnaît le schématisme), et du fait que le XII e s. fait de plus en plus figure, chez maint médiéviste, de siècle-charnière (ce qui renvoie sans doute moins à la nature de ce siècle qu'à la manière historienne de concevoir le changement : cf. mes observations introductives dans « "Communautés d'installés"? », art. cité.), on se rappellera cependant la disparition quasi-totale après la fin du XI e s. de la couche des terres noires qui constituait l, pp.530-532

. Panthéon-sorbonne, comme si s'était alors modifiée la nature des interactions dans les espaces concernés, 2011.

W. Le-verein-est, fondé sur une adhésion formelle qui me semble restrictive par rapport aux communautés d'habitants qui nous intéressent ici. propres pour assurer l'entretien de l'église et les services commémoratifs, ou d'un autre côté que la paroisse fonctionne comme cadre d'exercice du pouvoir seigneurial 130 n'est pas le signe de l'insondable diversité, c'est-à-dire irrationnalité de la société médiévale -mais du caractère biaisé de nos modes de découpage. L'intérêt du cas anglais n'est donc pas dans l'alternative implicite (Anstalt ou Gemeinde ?) sur laquelle son examen a [408] été mené mais dans le fait qu'il suggère que le critère morphologique (c'est-àdire la structure dispersée ou polynucléaire de l'habitat) retenu plus haut ne soit que superficiellement pertinent pour expliquer les cas où la paroisse fonctionne comme référence commune principale -ou plus exactement qu'il conduise à s'arrêter trop tôt du point de vue du questionnement. Car en fin de compte, y a-t-il jamais coïncidence entre une structure d'habitat et une structure paroissiale -soit que la paroisse regroupe plusieurs noyaux (plusieurs villages, ou plusieurs hameaux, ou un bourg et plusieurs hameaux -sans même parler des fermes isolées !), soit qu'elle ne couvre (en ville et peut-être certains villages) qu'une partie du noyau aggloméré ? N'est-ce pas dès lors notre tendance spontanée à assimiler d'une part communauté d'habitants et agglomération, d'autre part commune et circonscription paroissiale, qui nous conduit à une telle lecture subsidiaire pour des raisons morphologiques ? Le rapport paroisse/village (ou /ville) ne serait donc pas un bon moyen de saisir l'articulation entre communauté et paroisse. Mais on a vu aussi que le rapport (positif ou négatif) paroisse/seigneurie 131 , lui aussi très largement lu de façon rétrospective, n'est guère plus univoque et surtout qu'il est prisonnier d'une logique binaire. Par conséquent, si l'on s'efforce de ne pas se laisser piéger par la téléologie qui dote la communauté d'une espèce de nécessité, pourquoi fallait-il que soit exprimée tout de même une appartenance collective, même lorsque l'habitat était dispersé, Je ne retiens pas ici Verein car il n'y a aucune raison de considérer que la seule alternative possible soit wébérienne

, Le premier est d'ordre notionnel : qualifier la paroisse de « communauté paroissiale » ne rend pas compte des pratiques langagières médiévales dominantes, mais plutôt d'usages marginaux. Toutefois, le problème n'est pas dans le syntagme luimême, comme si l'enjeu était de coller au plus près au vocabulaire médiéval (indépendamment même de la question de la traduction des termes latins), mais, d'une part, [409] dans ses effets : un tel usage générique de « communauté paroissiale » interdit de s'interroger sur le sens des cas où la paroisse est effectivement qualifiée de communitas. D'autre part et surtout, ce genre de questionnement notionnel (peut-on ou non parler de « communauté paroissiale » ?) tend à orienter la réflexion vers la 130 . Cf. entre autres V. Corriol, « La famille et le village?, art. cité, p. 53-69 : « La communauté villageoise, telle qu'elle apparaît dans les rares textes où elle est mentionnée, semble finalement se calquer plus sur les structures seigneuriales et paroissiales que sur les structures d'habitat, de peuplement ou d'exploitation des terres ». C'est également la situation qu'observe Michael Gelting en Maurienne, ainsi que B. Kümin dans l'Angleterre des Tudor -ce qui la conduit à arrêter son étude v. 1560, considérant que « toute analyse allant au-delà devrait adopter des approches radicalement différentes » (The Shaping of a Community?, op. cit., p. 1) -ce qui me semble ne reposer que, Si l'on tente de faire un premier bilan de cet examen des rapports entre paroisse et communauté (la paroisse est-elle un double de la communauté d'habitants, voire une communauté, et plus précisément une Genossenschaft ?), plusieurs points doivent être retenus

, je veux parler de la lecture de la paroisse comme relais du pouvoir seigneurial (plus tard étatique), tandis que par « rapport négatif » je désigne des lectures inverses, Par « rapport positif » (hors de tout jugement de valeur)

, Un deuxième ensemble d'observations concerne les possibles biais liés à notre documentation, fondamentalement d'origine cléricale, et dans laquelle la paroisse apparaît presque inévitablement sous ses traits canoniques (notamment dans sa définition par rapport au centre, et comme un ressort -comme c'était déjà le cas pour la plebs du haut Moyen Âge 132 ) et donc de façon très statique puisque le discours clérical consiste à nier le changement, à faire comme si les formes du moment étaient toujours les mêmes qu'auparavant, définition de la nature de la paroisse -alors que ce qui compte est la nature des rapports sociaux qui peuvent être (ou non, et dans ce cas pourquoi) subsumés par la paroisse, p.133

, Le changement en question accompagne la conversion des homines en « habitants » (comme on le remarque bien à Sermiers) et conduit à une paroisse « appropriée », c'est-à-dire à laquelle s'identifient les habitants au lieu d'y être simplement affectés : c'est ce qui ferait désormais de la paroisse ce tissu de solidarités censé fonder sa nature communautaire (selon P. Blickle et B. Kümin, M. Staub, F. Mouthon, etc.). La continuité du mot parrochia [410] dissimule ainsi (on le sait bien désormais 134 ) un profond changement entre le haut et le bas Moyen Âge : non seulement du point de vue de l'échelle concernée, on l'a dit, mais aussi et surtout du point de vue de l'investissement social, en l'occurrence des paroissiens. Ces deux phases de formation paroissiale se traduisent possiblement, dans le Sévéragais ici étudié par J. Dumasy, par la paroisse sous contrôle châtelain ancien, et de grande taille, à Sévérac-le-Château, d'une part, et par les six paroisses du mandement de Laissac, d'autre part, auxquelles s'identifient au début du XIV e s. les communautés qui s'y forment, Avec un discours canonique ainsi verrouillé, on comprend bien dès lors que c'est dans les interstices, ou plutôt sur les marges, que se peut observer la nature du changement en cours, et qu'on pourrait peut-être qualifier de « communautarisation » de la paroisse, à savoir l'identification d'un ensemble d'habitants à une église. Cette « communautarisation » ne devrait cependant être comprise ni dans un sens communaliste, ni seigneurial/étatique, lectures qui procèdent toutes deux d'approches téléologiques, p.291, 2013.