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Article dans une revue Recueil Dalloz Année : 2020

Théorie des avantages matrimoniaux : l'horizon s'assombrit pour le régime de la participation aux acquêts

Résumé

[Cour de cassation, 1re civ. 18-12-2019 18-26.337].
1. L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 18 décembre 2019 est incontestablement un grand arrêt qui fera date en droit des régimes matrimoniaux. Cette décision, en retenant que la clause d'exclusion des biens professionnels constitue un avantage matrimonial révoqué de plein droit en cas de divorce, vient limiter sérieusement les possibilités d'aménagement des règles liquidatives du régime de la participation aux acquêts. Il n'est pas non plus sans incidence sur d'autres régimes conventionnels.

2. La situation d'espèce est la suivante : un couple se marie sous le régime de la participation aux acquêts. Son contrat de mariage prévoit qu'en cas de dissolution du régime pour une cause autre que le décès des époux, « les biens affectés à l'exercice effectif » de leur profession lors de la dissolution, « ainsi que les dettes relatives à ces biens », seront « exclus de la liquidation ». Une telle clause dite d'exclusion des biens professionnels est assez couramment stipulée en pratique, car elle permet de préserver l'outil de travail de l'époux qui serait finalement débiteur d'une créance de participation envers l'autre, en cas de dissolution du régime par divorce, séparation de corps ou liquidation anticipée de la créance de participation. En effet, il n'est pas rare qu'un entrepreneur ait investi l'essentiel de sa fortune dans son entreprise et qu'il ait, pendant le mariage, généré une plus-value importante. Cette clause lui évite de devoir vendre son entreprise pour apurer sa dette de participation. En l'espèce, le couple divorce et, au moment de procéder à la liquidation du régime matrimonial, l'ex-mari demande que la révocation de plein droit de la clause d'exclusion des biens professionnels figurant dans le contrat de mariage soit constatée sur le fondement de l'article 265 du code civil et que les biens professionnels de la femme soient, par conséquent, intégrés à la liquidation de la créance de participation.

3. La cour d'appel de Chambéry ne fait pas droit à cette demande. Elle considère que la clause d'exclusion des biens professionnels insérée dans le contrat de mariage des époux ne constitue pas un avantage matrimonial. Elle n'est donc pas anéantie par le divorce. La cour ordonne, en conséquence, l'exclusion de leurs biens professionnels du calcul de leurs patrimoines originaires et finaux. Elle retient que « la notion d'avantage matrimonial est attachée au régime de communauté ».

4. Cette analyse n'est pas partagée par la première chambre civile de la Cour de cassation qui, au visa de l'article 265 du code civil, casse et annule partiellement l'arrêt d'appel. Elle considère que « les profits que l'un ou l'autre des époux mariés sous le régime de la participation aux acquêts peut retirer des clauses aménageant le dispositif légal de liquidation de la créance de participation constituent des avantages matrimoniaux prenant effet à la dissolution du régime matrimonial. Ils sont révoqués de plein droit par le divorce des époux, sauf volonté contraire de celui qui les a consentis exprimée au moment du divorce. Il en résulte qu'une clause excluant du calcul de la créance de participation les biens professionnels des époux en cas de dissolution du régime matrimonial pour une autre cause que le décès, qui conduit à avantager celui d'entre eux ayant vu ses actifs nets professionnels croître de manière plus importante en diminuant la valeur de ses acquêts dans une proportion supérieure à celle de son conjoint, constitue un avantage matrimonial en cas de divorce ». La motivation est très claire : le régime de la participation aux acquêts peut être assorti d'avantages matrimoniaux, telle une clause d'exclusion des biens professionnels, qui lorsqu'ils prennent effet à la dissolution du régime matrimonial, sont révoqués de plein droit en cas de divorce, en application de l'article 265 du code civil. Les apports de l'arrêt sont considérables. Cette décision consacre d'abord la théorie des avantages matrimoniaux en régime de participation aux acquêts (I), avant de retenir de manière aussi contestable que dévastatrice l'application de l'article 265 du code civil (II).

Domaines

Droit
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Fichier non déposé

Dates et versions

halshs-02517094, version 1 (24-03-2020)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-02517094 , version 1

Citer

Thierry Le Bars, Laurence Mauger-Vielpeau. Théorie des avantages matrimoniaux : l'horizon s'assombrit pour le régime de la participation aux acquêts. Recueil Dalloz, 2020, 11, pp.635. ⟨halshs-02517094⟩
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Dernière date de mise à jour le 07/04/2024
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