, Tametsi numeros quoque suos habet oratio pedestris, non tamen lege definita et perpetua, sicut poema. (« [A tous les autres arts] vint s'ajouter un moyen de détendre et de reposer l'âme par l'harmonie des sons : la musique. Sous la musique se range la poésie dans son ensemble, Accessit his omnibus laxamentum et recreatio animi per harmoniam sonorum, quae est musica : sub quam poesis omnis uenit, quae concentu numerorum constat, pp.295-296

. Ibid, , p.298

. Ibid, , p.283

, Et l'assimilation de l'homme à la matière qu'il étudie s'accompagne parfois d'une assimilation de cette matière à l'intitulé de la discipline en question : la science du philosophe premier est, littéralement, « la philosophie première ou les profondeurs de la création » (« prima philosophia, uel intimum naturae opificium »). Ce que le traducteur français est contraint de rendre par une transposition : cette science « porte sur » la philosophie première, ou « sur » les profondeurs de la création. Ces décalages semblent procéder d'une « retusio » dont il est difficile de savoir dans quelle mesure exactement elle est voulue, mais qui consiste, en l'espèce, à ne pas distinguer le fait du droit. L'auteur du De disciplinis, lorsqu'il décrit les différents spécialistes, semble parfois les présenter sous un jour idéal, mais sans en avoir averti son lecteur au préalable. Or, ce n'est pas parce qu'un « spiritalis » doit s'absorber dans sa matière qu'il le fait nécessairement. On peut se demander si le rapport ambigu de Vivès à l'autorité ne vient pas de cette idéalisation du savant, ou de l'enseignant : d'un idéalisme qui pourrait expliquer bien des désillusions difficiles à surmonter, et qui serait une forme complexe d'idolâtrie. Car ces hommes qui font corps avec leur matière ressemblent fort à celui que Vivès appelle ensuite le « Divin Maître, L'art proprement dit se définit en effet comme une « collectio uniuersalium praeceptorum parata ad cognoscendum, agendum, uel operandum, in certa aliqua finis latitudine » 50 . À ce prix, la théonomie est bel et bien un art, puisqu'elle débouche sur des préceptes. Mais la théologie, qui ressemble beaucoup à la « consideratio diuinitatis », ne méritait-elle pas d'être traitée séparément ? Le propos de Vivès serait plus clair s'il avait précisé sur quoi porte au juste sa classification

. Ibid,

J. L. Vivès, On education, trad. par F, pp.41-43, 1971.

, De disciplinis, I, 1, éd. cit, p.298

, Il est assez significatif que, dans le De causis corruptarum artium, la même image lui serve à critiquer le poids de l'autorité dans la scolastique traditionnelle (I, 1, vol.II, p.44

, Lesquelles font partie du premier ensemble. La classification de Vivès suggère donc un mouvement qu'elle brouille tout de suite, en le démultipliant. Les catachrèses qu'emploie l'écrivain pour décrire le passage d'une discipline à l'autre sont à cet égard significatives : pour parvenir à la philosophie première, le regard de l'esprit doit descendre (« descendere ») ; mais il circule de çà de là dans les replis de toutes choses (« versari ») ; et lorsqu'il quitte l'exploration des causes extérieures pour la spiritualité, il passe de l'autre côté (« transcendere »). Son chemin n'est pas à proprement parler rectiligne, ni tout à fait cohérent, peut-être, que la hiérarchie générale menant de la nature vers Dieu paraisse se brouiller. La théologie, telle que présentée dans la préface

, Mais le programme qui s'y dessine n'est pas complètement distinct. Et l'impossibilité de séparer clairement le profane du sacré en est un signe. Le commentateur qui fait cette remarque ne dénie pas à l'ouvrage sa valeur ni sa puissance : car il a plaisir à le lire, et à faire partager ce plaisir, comme l'auront peut-être montré les larges extraits cités dans les pages qui précèdent. Mais il considère que cette valeur est avant tout esthétique. Plus que la censure, que le traité pédagogique, ou que l'encyclopédie, c'est l'oratio qui nous séduit, dans le De disciplinis : et c'est par une analyse proprement littéraire que les richesses de ce texte seront vraiment redécouvertes. Des passages tels que la classification des disciplines et des activités de l'esprit suggèrent cette relecture, De ces analyses se dégage une conclusion semblable à celles que permettaient de tirer une étude de la polémique ou du rapport aux autorités dans le De disciplinis : la structure apparente de la pensée vivésienne est incontestablement binaire, au risque parfois de la simplification, mais sa structure sous-jacente, à l'inverse, révèle des formes de trouble qui ne sont jamais tout à fait résolues