, Quoiqu'avec une once d'ironie -parce que les « longs dîners servis, discutés, analysés et savourés avec tant de solennité [l]'ennuyaient mortellement » -, l'écrivaine dépeint avec bienveillance la passion gastronomique de son parent, vous faites, d'un jour de liesse et de repos, une pesanteur de plus sur vos estomacs et sur vos esprits

G. Sand and . Correspondance, , vol.III, p.464

G. Sand and L. Daniella, éd. citée, chap. XXXVI, p. 432, le narrateur affirme : « Je ne suis pas gourmand, et je ne comprends pas qu'un homme soit l'esclave de son ventre

G. Sand, . Consuelo, and . Lxiii, , p.409

. Ibid, . Chap, and . Xi, , p.85

G. Sand and . Histoire-de-ma-vie, Idem pour la citation suivante. gourmandise exige un certain discernement 37 ». Elle est admissible, voire souhaitable, pourvu que l'on en trace les contours éthiques. C'est ainsi moins la gourmandise que Sand condamne -puisqu'il s'agit d'un domaine où le « bon goût » peut s'inculquer -, que la gloutonnerie : l'excès. La gourmandise est une affaire de modération et de juste mesure : elle doit être rationnalisée. Dès lors, est-ce encore de la gourmandise ? En fait, Sand s'est ralliée à l'entreprise d'une partie de ses contemporains, qui tentent de racheter un terme longtemps dévalué en le régulant. Brillat-Savarin est de ceux-là parmi les premiers : La gourmandise est une préférence passionnée, raisonnée et habituelle pour les objets qui flattent le goût. La gourmandise est ennemie des excès, vol.I, p.667

, George Sand apprécie ainsi, à titre personnel, les produits de qualité, et demande à maintes reprises à ses correspondants de lui en envoyer : Parlons mangeaille, car, aussi bien, j'ai oublié de vous remercier de vos envois

. Donc, je vous ouvre un crédit, pour que vous nous fassiez un envoi considérable de coquillages, avec quelques patates et quelques grenades 39

, non sans humour, a manifestement conscience de se laisser aller à un penchant gourmand condamnable a priori -mais auquel elle fait volontiers des entorses, ce dont témoignent les « festins de Lucullus 40 » organisés sans complexe à Nohant ou sa participation aux dîners Magny 41

G. Dans-une-perspective-déjà-hygiéniste, . Sand-valorise,-d'une, and . Part, Les aliments sont des remèdes et sa correspondance foisonne de références à tel ou tel régime en période de maladie, ainsi que de conseils prodigués à ses amis 43 . D'autre part, ce qu'elle blâme dans le comportement gourmand, c'est l'égoïsme, incarné par l'ex-gouvernante des Messieurs du Bois-Doré qui, « [n']étant plus forcée de savourer en secret les liqueurs et les friandises dérobées, [?] s'était livrée avidement à sa gourmandise 44 » tandis que « [p]eu lui importait que vingt-cinq bons soldats [?] attendissent à la porte, le ventre creux ». Au sein d'une société encore profondément inégale, les « bonnes et saines friandises bien préférables aux bonbons 42

. Ibid, , vol.I, p.1064

J. Brillat-savarin, , p.270

G. Sand and . Correspondance, XV, à Charles Poncy, Nohant, 17 X bre, vol.18, p.218

. Ibid, V. Xv, and . Borie, XX, à Lina Dudevand-Sand, p.701

A. Glinoer and V. Laisney, L'Âge des Cénacles, confraternités littéraires et artistiques au XIX e siècle, 2013.

G. Sand and . Correspondance, Antoine Scipion du Roure, Nohant, 30 décembre 1873, vol.XXIII, p.648

, Tel est par exemple le cas lorsqu'elle préconise « une bonne nourriture succulente, [et] du vin de Bordeaux » à Charlotte Marliani pour favoriser son rétablissement (ibid, p.348

G. Sand, Les Beaux Messieurs de Bois-Doré, vol.2, p.111, 1990.

, sentant bien que ce serait mal reconnaître l'élan fraternel de son amphitryon que de ne pas manger en sa compagnie, [?] se rassit non loin de lui, et se mit à dévorer ce pain, au prix duquel les mets les plus succulents qu'elle eût jamais goûtés à la table des riches lui parurent fades et grossiers

, annonçant déjà le binôme uni et soudé qu'ils viendront à former. La nourriture a toutes ses lettres de noblesse lorsque, d'une part, elle soulage la faim, et quand, d'autre part, elle scelle une relation fraternelle. Il n'est ainsi pas anodin que ce soit du pain que les protagonistes rompent ensemble : Consuelo et son comparse rejouent la Cène christique sur un mode laïc et républicain 50, Les compagnons redonnent sa force étymologique au terme (formé de cum et panis, désignant « celui avec qui l'on partage le pain »)

G. Sand, . Correspondance, M. Iii, and . Dudevand-sand, , p.452

G. Sand, Histoire de ma vie, éd. citée, vol.I

G. Sand, Les Maîtres sonneurs, éd. citée, Treizième veillée, p.189

G. Sand, . Consuelo, and . Lxiv, Idem pour la citation suivante, pp.411-412

F. P. Au-sujet-de-la-récupération-républicaine-du-christ-par-les-romantiques, L. Bowman, . Christ-romantique, L. Genève, ;. Droz et al., Une recherche en écriture, Paris, Honoré Champion, coll. « Littérature et Genre, GLINOER Anthony et LAISNEY Vincent, L'Âge des Cénacles, confraternités littéraires et artistiques au XIX e siècle, vol.25, pp.1866-1877, 1964.