La vente d'ordinateur avec logiciel préinstallé n'est pas une pratique déloyale : confirmation par la Cour de cassation - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Actualité juridique Contrat Année : 2017

La vente d'ordinateur avec logiciel préinstallé n'est pas une pratique déloyale : confirmation par la Cour de cassation

Véronique Legrand

Résumé


Sommaire :
Les ordinateurs vendus dans la grande distribution sont généralement plug and play, c'est-à-dire dotés de logiciels préinstallés pour une fonctionnalité immédiate, à la satisfaction de la plupart des consommateurs. Évidemment, en termes de prix, cela n'est pas neutre et les promoteurs du logiciel libre qualifient cette pratique commerciale de racket, utilisant le terme imagé « racketiciel » (« Non aux racketiciels », pétition lancée le 12 avril 2012 par l'Association francophone des utilisateurs de logiciels libres).

De puissantes associations de consommateurs, telle l'UFC (Union fédérale des consommateurs)-Que Choisir, se sont lancées dans une bataille juridique de longue haleine, pour faire reconnaître cette pratique déloyale et trompeuse. L'arrêt de la première chambre civile rendu le 29 mars 2017 met ainsi fin à un litige qui a commencé en 2008 entre cette association et l'enseigne Darty (TGI Paris 24 juin 2008, n° 06/17972, puis Paris, 26 nov. 2009, n° 08/12771, D. 2010. 9, obs. X. Delpech ; ibid. 790, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud). En effet, sont rejetés le pourvoi principal et le pourvoi incident formés contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 22 janvier 2015 rendu sur renvoi après cassation (Civ. 1re, 6 oct. 2011, n° 10-10.800, D. 2011. 2464, obs. X. Delpech ; ibid. 2886, chron. V. Legrand et B. Blin ; ibid. 2961, obs. Centre de droit de la concurrence Yves Serra ; ibid. 2012. 840, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud).

La Cour de cassation se prononce à nouveau sur la délicate question de savoir si la vente d'un ordinateur, tout équipé, pour un prix global, et sans offre alternative d'un appareil brut, est déloyale. Mais elle dispose désormais d'une trame de raisonnement développée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) (CJUE 7 sept. 2016, aff. C-310/15, AJ Contrat 2016. 484, note H. Aubry ; LPA 10 oct. 2016, p. 6, obs. V. Legrand ; D. 2016. 1813 ; ibid. 2017. 539, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; AJ pénal 2016. 491, obs. E. Raschel ; Dalloz IP/IT 2016. 558, obs. A. Lecourt), pour peaufiner son contrôle de la qualification d'une telle vente liée en tant que pratique déloyale, et plus particulièrement en tant que pratique trompeuse.

D'abord, elle confirme l'arrêt d'appel qui a caractérisé une omission trompeuse en retenant que :

Texte intégral :« La seule identification des logiciels préinstallés, ainsi que l'invitation faite au consommateur de se documenter par lui-même sur la nature et l'étendue des droits conférés par la ou les licences proposées, ainsi que sur les autres caractéristiques principales des logiciels équipant les ordinateurs offerts à la vente, ne constituent pas une information suffisante »,

ce qui était susceptible d'altérer le comportement économique du consommateur moyen et constituait donc une pratique trompeuse.

Ensuite, quant à l'absence de possibilité pour le consommateur d'obtenir le même ordinateur sans logiciel et l'absence de prix ventilé, la Cour de cassation approuve la cour d'appel qui a relevé :

« D'abord que la pratique commerciale litigieuse ne présentait pas un caractère déloyal, dès lors que les ordinateurs non équipés de logiciels préinstallés ne faisaient pas l'objet d'une demande significative de la clientèle, exception faite de celle, marginale, constituée par des amateurs éclairés [...], de sorte qu'aucun manquement de la société Darty aux exigences de la diligence professionnelle n'était démontré, ensuite, que cette pratique commerciale n'était pas trompeuse, y compris en ce qu'elle était caractérisée par l'absence de mention du prix des logiciels préinstallés, l'article 7 de l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information du consommateur sur les prix n'étant pas applicable au prix de chacun des éléments d'un même produit ».

Texte(s) appliqué(s) :
Code de la consommation - art. L. 120-1
Code de la consommation - art. L. 121-1

À retenir :
Le caractère déloyal de la vente d'ordinateurs plug and play s'apprécie sous le prisme de l'obligation d'information.

Les professionnels de l'informatique sont désormais tenus d'une obligation d'information très étendue sur les caractéristiques des logiciels intégrés aux ordinateurs et non pas seulement sur leur nomenclature. En revanche, ils peuvent continuer à présenter leur offre sous un prix global.
Fichier non déposé

Dates et versions

halshs-02217083 , version 1 (31-07-2019)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-02217083 , version 1

Citer

Véronique Legrand. La vente d'ordinateur avec logiciel préinstallé n'est pas une pratique déloyale : confirmation par la Cour de cassation : arrêt rendu par Cour de cassation, 1re civ. du 29-03-2017, n° 15-13.248 (FS-P+B+I). Actualité juridique Contrat, 2017, 05, pp.231. ⟨halshs-02217083⟩
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