, Et en effet Helvétius reprend l'argument trouvé dans Bayle, à propos de la stérilité des principes spéculatifs, mais cette fois pour lui faire apparemment servir la cause du prince éclairé : L'on vante sans cesse la puissance de la vérité, et cependant cette puissance tant vantée est stérile, p.59

, Pourtant la question de l'autorité réformatrice, de la source légitime de la réforme ne peut pas se contenter de cette réponse. C'est ici qu

, et pose que grâce à la première, apanage des jeunes gens et des pairs , on peut espérer des 60 'estime sentie : Il en est, si je l'ose dire, de la chute de ces vérités sur la terre, comme de celles d'une pierre au milieu d'un lac : les eaux séparées en point du contact forment un cercle bientôt enfermé dans un plus grand, qui lui-même environné de cercles plus spacieux s'agrandissant de moment en moment, p.62

, La métaphore est reçue sous la plume des philosophes. Les cercles concentriques redoublent ici le premier mouvement circulaire qui décrit De l'Homme, IX, 21, p.825

, De l'Homme, IX, 8 « De la lenteur avec laquelle la vérité se propage

, En morale [?] la seule chose réellement nuisible est la non-recherche, vol.8, p.783

, Qui prêche l'ignorance est un fripon qui veut faire des dupes, p.66

, Il s'agit bien de législation : c'est derrière « le rempart de ses lois », « quatre ou cinq » lois fondamentales, que l'Anglais peut « braver le pouvoir, insulter à l'ignorance, à la superstition et à la sottise, p.67

, Mais la réforme des lois n'est pas pensable ex nihilo. Tout viendra de la loi certes, mais il faut faire une place à la progression de la vérité, selon lequel les raisonnements spéculatifs ne se traduisent pas dans les moeurs trouve un nouvel usage : il sert à revendiquer la liberté intellectuelle, vol.13, p.801

, De l'Homme, VII, 4, note a, p.615

, De l'Homme, vol.II, p.247

, cas pour le moins rare à défaut d'être utopique, dans 68 lequel le législateur n'a pas à prendre en compte l'état des moeurs existantes. En revanche, si l'on parvient à comprendre comment des progrès de la vérité sont possibles

, On peut suggérer que c'est en réponse à cette difficulté qu'Helvétius reprend dans De l'Homme les thèses de De l'Esprit, en focalisant cette fois

, Cependant il ne s'agit pas non plus de réduire la politique à l'éducation : il ne s'agit pas d'une politique de la vérité au sens où il n'est pas question d'éclairer l'intérêt lui-même, de le rendre rationnel. L'homme demeure éternellement mû par un intérêt au plaisir physique : en ce sens il ne progresse pas, et la nature humaine n'est pas perfectible. Helvétius emploie d'ailleurs le terme avec parcimonie, Cette constance

, empirique des normes morales, n'est pas une thèse anodine : ramenant en

. De-l'homme and . Vii, , vol.11, p.640

, Il est souvent question de la « perfection », c'est-à-dire du « perfectionnement » des sciences et des arts, du 70 degré de perfection des organes des sens, et à quatre reprises seulement dans De l'Homme de la « perfectibilité » de l'esprit, vol.II, p.205

, La question du perfectionnement des sciences, qui n'est donc pas directement celui de l'individu humain, est aussi celle de la source légitime du changement, des Lumières populaires. En déplaçant un peu la formulation des questions, d'autres philosophes ayant vécu cet événement impensable qu

, Révolution, diront que c'est précisément le rôle de l'éducation nationale : faire progresser les Lumières dans le peuple

, Ancien Régime, où il n'est pas question de réformes législatives. C'est bien du rapport entre le savoir et le pouvoir, entre le progrès et la réforme, qu'il est question. La philosophie d'Helvétius appartient aux Lumières françaises, elle n'est ni celle des moralistes chez qui le pessimisme et l'anhistoricisme dominent, ni celle de la Révolution qui cherche à produire un homme nouveau. On peut désormais donner au nominalisme d'Helvétius toute son ampleur politique. La science de l'homme qu'il tente d'élaborer en philosophe, et non en théologien s'interrogeant sur la place de l'homme, est en effet une science de la législation. Or dire que cette science de la législation est une science de l'éducation au sens large, c'est bien accomplir le sens politique du nominalisme, et ce d'une manière tout à fait originale, Mais Helvétius ne dissocie pas les réformes législatives des réformes éducatives : c'est ce qui fait la force philosophique interne de son dispositif, et sa faible portée réelle au sein de l