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Article dans une revue Orients Stratégiques Année : 2016

La frontière comme analyseur

Résumé

Introduction La frontière comme analyseur Daniel Meier (PACTE/Sciences Po Grenoble) Depuis quelques années déjà, au Moyen-Orient les questions de frontières se sont vivement rappelé à nous au vu d'une actualité brutale faite d'exodes et de souffrances et inscrivant des processus de déliquescence étatique dans la durée. Le fait frontalier apparaît dans toute son épaisseur sociale, politique et géographique tant les enjeux qu'il articule sont nombreux dès que l'on pense aux « mouvements jihadistes », à la « souveraineté en péril » des Etats en faillite, aux « réfugiés du chaos syrien » ou aux « régimes autoritaires » qui érigent de nouvelles barrières frontalières. Et depuis 2014, l'apparition de l'organisation de l'Etat islamique (OEI) impose brutalement son autorité à cheval sur deux Etats, la Syrie et l'Irak, en clamant haut et fort la fin d'un ordre impérialiste, celui des accords aujourd'hui centenaires de « Sykes-Picot » (1916). Comme le montre bien l'ouvrage de James Barr 1 , les accords signés entre Mark Sykes et François-Georges Picot, respectivement conseiller diplomatique auprès du Premier ministre britannique et diplomate aux Affaires étrangères françaises, visaient à définir des zones d'influence/d'administration directe pour chacune des puissances sur les décombres de l'Empire ottoman alors aux prises avec la révolte arabe. Cette entente entre puissances marquait du sceau de la trahison un découpage effectué par devers le Chérif Hussein, gardien des lieux Saints de La Mecque et Médine auquel la Grande-Bretagne avait promis la création d'un grand royaume arabe une fois l'Empire ottoman liquidé grâce au soutien de ses troupes arabes. A la fin de la première guerre mondiale alors que l'Empire ottoman s'effondrait, la logique stato-nationale s'imposa progressivement, notamment grâce aux mandats que la SDN confia à la France et à la Grande-Bretagne, pour asseoir leur souveraineté sur leurs zones d'influence respectives. Or le processus d'établissement des Etats, que l'on parle des frontières de la Syrie, du Liban, de l'Irak, de la Transjordanie ou de la Palestine, pris un temps plus ou moins long et connu des variations parfois importantes par rapport aux tracés de Sykes-Picot. Dès lors, comme le rappelait Pierre-Jean Luizard dans son lumineux ouvrage 2 , l'OEI induisait assez largement en erreur ses auditeurs lors de sa destruction très médiatique de la frontière syro-irakienne à Yaaroubiya : cette frontière n'était pas le fruit de l'imposition de Sykes-Picot mais était issue du rattachement de la province de Mossoul à l'Irak par une opération militaire britannique (au grand dam des Français auxquels les accords Sykes-Picot avaient attribué cette région) après la découverte d'hydrocarbures dans le sous sol de cette région. En outre le message de l'OEI était autant à usage régional qu'international : il entendait légitimer l'entreprise du « califat » en délégitimant les gouvernants arabes qui n'avaient fait que ratifier ces frontières « coloniales » et redessinait de nouvelles lignes de fronts en en appelant aux masses musulmanes sunnites à l'échelle globale contre les Etats « impérialistes ».
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Dates et versions

halshs-01947529, version 1 (19-12-2018)

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  • HAL Id : halshs-01947529 , version 1

Citer

Daniel Meier. La frontière comme analyseur. Orients Stratégiques , 2016, Les frontières dans les monde arabe, 4. ⟨halshs-01947529⟩
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Dernière date de mise à jour le 21/04/2024
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