J. Fritz, «. Genèse, and . Genèses-selon-renart, Sur la présence massive des reprises scripturaires dans ce texte, pp.19-38, 2014.

A. Voir and . Pelletier, « La Genèse ad litteram. Sur l'interprétation des commencements bibliques, p.22

;. C'est-ce-qu'ont-montré-laurent-brun and . Regnart, Renart le Contrefait et son contexte littéraire », dans La Moisson des lettres. L'invention littéraire autour de 1300, éd. Hélène Bellon-Méguelle, Olivier Collet, Yasmina Foehr-Janssens et Ludivine Jaquiéry, vol.132, pp.412-427, 2011.

. Sur-ce-point, . Voir-en-particulier-silvère-menegaldo, and . Histoire-universelle, , pp.53-70

, Ce dispositif qui, pour ainsi dire, fait de Renart un témoin de l'origine évacue toute référence au Livre : la source scripturaire n'est plus médiatisée par un livre d'Aucupre fictif ou par les propos de quelques voisins ; à la Bible se substitue désormais le sermo Renardi 64 . Le personnage, en effet, n'est plus un animal. C'est ce que montre l'objection de Noble devant les propos qui viennent d'être cités ; le roi déclare qu'une telle parole est « folye » (v. 6004) : ??? comment porroit ce or estre ? / Depuis que Dieu, le Roy celestre, / Eüst fait ciel et terre et mer, / Fist il bestes, ne nul parler / Ne doit qu'elles fussent devant, / Ne qu'en terre fussent pessant, le locuteur raconte moins la Création du monde que sa participation aux événements primordiaux, pp.5979-5982

, Endossant une identité diabolique plus qu'animale, il est désormais « celui qui sépare », celui qui est à l'initiative de la révolte des anges 65 . Dans le dernier avatar renardien, la Genèse est donc racontée selon un nouveau point de vue, celui de Renart-Ange déchu. Elle est également racontée selon un déplacement « chronologique ». On pourrait tout d'abord parler d'une modification dans l'ordre de la narration : le récit commence non par la mention de la création du ciel et de la terre mais par l'évocation de la chute des anges. Certes, il ne s'agit pas exactement d'un autre épisode de la Genèse mais ce récit, En réalité, l'argument reposant sur l'ordre de succession dans la création (Dieu fit les animaux après la création du ciel

J. Scheidegger and L. Roman-de-renart-ou-le-texte-de-la-dérision, , p.356

, « Par mon art s'orguillirent anges ; / Par mon art sont du ciel estranges, pp.6025-6026

, Sur ce point, voir notamment Francis Dubost, et Jérôme Baschet, « Satan ou la majesté maléfique dans les miniatures de la fin du Moyen Age », dans Le Mal et le diable. Leurs figures à la fin du Moyen Age, éd. Nathalie Nabert, vol.12, pp.188-189, 1987.

, Se mon art n'eust esté et fust ; / Car Dieu s'en fust atant passés / Qui des anges ot fait assez. / Mais tantost que mon art coeuillirent, / Tantost dedens enfer cheÿrent ; / Paradis ne les polt tenir, / Quant mon art vauldrent acoeullir. / Leurs sieges demourerent vuys, / Quant de gloire furent hors mys. / Mais pour ses sieges recouvrer, / Vault Dieu le monde faire ouvrer, / Faire homme qui naturelment / Par sa semence deuement / Remplesist les sieges vuidiés, pp.6037-6051

, est que pour occuper les sièges de ces anges déchus que les hommes furent créés. Tandis que le Roman de Renart fait de la naissance de Renart-goupil un événement postérieur à la création d'Adam et Eve, Renart le Contrefait définit cette création de l'homme comme une simple conséquence du premier méfait de Renart-diable, la chute des anges. La réécriture de la Genèse, sur ce point, n'est pas dénuée d'une tentation dualiste. Face à Noble qui, au début de l'échange, est le garant d'une double orthodoxie, renardienne (il rappelle la nature animale de Renart) et scripturaire (il rappelle la chronologie de la Création), l'argumentation de Renart est subtile. Après l'annonce initiale et provocatrice selon laquelle son art précède le monde et l'homme, le locuteur cherche à obtenir l'adhésion du roi en s'appuyant sur des éléments de la doxa : les anges ont été créés et ils ont été créés beaux 70, A l'initiative de l'art de Renart, des anges se sont enorgueillis et, quittant le ciel pour l'enfer, ils ont laissé leurs sièges vides : conformément à une théorie alors ordinaire 69

, Dieu a fait toutes les choses mais il n'a pas voulu le péché 72 . Derrière de tels points qui autorisent les propos de Renart et confèrent à celui-ci du crédit auprès de Noble

J. Fritz, Genèse et genèses selon Renart : le matériau biblique dans Renart le Contrefait, p.36

«. Mais, , pp.6506-6534

G. Blangez, . Le, and C. Dans-le, nous-dit (la théorie des Sièges de Paradis) », dans Le Diable au Moyen Age, vol.6, pp.23-35, 1979.

». «-un-ange-déchu, E. Satan, . Carmélitaines, D. Paris, and . De-brouwer, Dans un exposé désormais classique, Eugène Mangenot signale plusieurs auteurs qui reportent la chute des anges avant la création de l'homme : « Démon », Dictionnaire de Théologie catholique contenant l'exposé des doctrines de la théologie catholique, pp.321-409, 1948.

. Ibid, Voir en particulier les v, pp.6412-6426

. Dieu-«-tout-fist, tout voit / Et scet comment tout aler doit ; / Fors que pechié, ce ne fist mie, pp.6936-6944

. Une-version-un-peu-hétérodoxe-de-la-genèse, D'une part, si Renart ne va pas jusqu'à se présenter comme un créateur, rien n'indique non plus qu'il soit une créature, c'est-à-dire que, comme les anges qui ont ensuite déchu, il ait d'abord été créé : « Or veëz, est bien apparant / Que mon art est avant et dure / Que oncques fut faicte Nature

. Certes and . De-satan, être pas de la même « nature » et d'être coéternel au Créateur 74 . La renardie, qui s'identifie au mal, semble être là de toute éternité, avant les six jours de la Création, et c'est d'elle que provient l'origine des démons : dans la Genèse selon Renart, existerait un principe du mal, « incarné » par Renart et antérieur à toute créature. En cela, la réécriture romane contrefait le récit biblique des commencements : elle l'imite et le détourne en refusant la non-substantialité du mal. Dans cette Genèse contrefaite par un nouveau simia Dei, Renart s'impose comme la figure de l'origine : par le déplacement énonciatif, ce personnage diabolique est à l'origine de la parole sacrée et il s'y substitue ; par un recul des commencements, il se situe dans un avant de la Création

. De, En retour, parce que les manuscrits romans accueillent l'histoire des origines, le principe sériel de composition semble chez ceux-ci s'estomper au profit d'une véritable « mise en ordre », que celle-ci soit de nature cyclique ou qu'elle se rapproche davantage du modèle de l'histoire universelle. Confrontée au récit des commencements, l'écriture vernaculaire s'en trouve transformée -de même que Renart, dont l'identité oscille entre créature d'Eve et singe de Dieu. L'identification au Créateur viendra plus tard. Dans une pièce truculente et riche en réminiscences de la littérature médiévale, écrite par Edmond Rostand, c'est cette fois Chantecler, le coq, qui est tout à sa fierté de chaque jour faire « [s]on "Fiat lux" » 75 : Et, lorsque monte en moi ce vaste appel au jour, / J'agrandis tellement toute mon âme pour / Qu'étant plus spacieuse elle soit plus sonore / Et que le large cri s'y élargisse encore ; / Avant de le jeter, c'est si pieusement / Que je retiens ce cri dans mon âme, un moment ; / Puis, quand, pour l'en chasser enfin, cette rencontre ne laisse en quelque sorte aucune des deux matières « indemnes ». Inséré dans l'ensemble renardien, le récit biblique est réécrit et cette transformation ressortit à deux modèles différents : l'apocryphe et la Genèse contrefaite, p.76

, Raillé pour cela par le merle, le coq définit avec emphase son « cocorico » matinal et quotidien comme un acte de langage créateur, dans un monde marqué par l'absence d'Adam. C'est alors sur le mode héroï-comique

M. Halary,

H. Marrou, , p.31

, Dans la reprise qu'il fait du récit de la chute des anges, jamais Renart ne se présente comme appartenant au groupe des anges devenus démons : voir par exemple Renart le Contrefait, éd. cit, pp.6025-6034

. Edmond-rostand, . Chantecler, . Pièce, E. Paris, and . Fasquelle, Je remercie Olivier Millet de m'avoir signalé cette référence, p.129, 1910.