Regards croisés sur l'œuvre d'Empédocle : Poésie didactique, épistémologie de l'imaginaire et échos scientifiques.
Résumé
L’approche historique de la science nous apprend que le savoir scientifique n’est pas une vérité absolue, qu’il se construit et évolue dans le temps, qu’à chaque époque les esprits humains développent des idées en fonction du contexte et en fonction des idées de ceux qui les ont précédés. Nous reconnaissons que « Si la signification même d’une théorie consiste dans les liens qui la rattachent au développement des théories qui la précèdent et celles qui en vont sortir, on ne comprendra vraiment la science, en une acception élevée, que par son évolution historique » (Tannery, 1990). Dans cette perspective, s’intéresser aux travaux d’Empédocle, ce philosophe du Vème siècle av. J.C. qui a mobilisé de très nombreux écrits depuis Aristote à nos jours, nous permet d’apprécier sa contribution au développement de la pensée scientifique. Par ailleurs, dans cette même perspective épistémologique, qui n’est pas moins une perspective didactique et culturelle, nous voudrions souligner la place et le pouvoir imaginatif de l’esprit humain dans le développement des sciences expérimentales. Plusieurs penseurs actuels (J. Dewey ; V. Hugo ; E. Claparède ; C. Baudelaire ; A. Einstein ; G. Bachelard…) soulignent l’importance de l’imaginaire, tant sur le plan épistémologique que didactique. Et conformément à l’univers d’Amitié chez Empédocle, nous dirions, avec A. de Rivarol, que « l'imagination est l'amie de l'avenir ». C’est l’imagination qui permet de développer des techniques expérimentales et informatiques. Ces techniques assistent d’aujourd’hui le cerveau du scientifique et prolongent et amplifient « artificiellement » son intelligence et ses capacités créatives. Si aujourd’hui l’expérience bénéficie d’une aura et d’une autorité, parfois complètement exagérées, donnant aux apprenants une image déformée de la science telle qu’elle se fait, à l’époque des grecs l’expérience avait un statut contraire à celui d’aujourd’hui. Elle était non seulement peu répandue par manque de matériel et d’intérêt, mais également mal perçue d’abord parce qu’elle est enregistrement de signes par les sens faillibles de l’être humain, mais aussi comme signe de faiblesse du penseur qui aurait recours à des artéfacts pour asseoir son raisonnement et convaincre. Ce qui serait intéressant, sur le plan didactique, c’est de montrer que les grecs ont pourtant produit des idées qui font encore parler d’elles aujourd’hui, c’est de comprendre le contexte qui a permis à de telles idées de naitre et de se développer.
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