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Chapitre D'ouvrage Année : 2017

La légation en Espagne de Francesco Guicciardini, entre expérience individuelle et processus de formation collectif

Jean-Marc Rivière
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 987637

Résumé

La légation en Espagne de Francesco Guicciardini, entre expérience individuelle et processus de formation collectif Jean-Marc Rivière, Centre Aixois d'Etudes Romanes-E.A. 854 La mission d'ambassade de Francesco Guicciardini en Espagne auprès du roi Ferdinand le Catholique, menée de janvier 1512 à novembre 1514, représente pour lui une première confrontation, aussi précoce que frustrante, à la pratique politique. Désigné le 17 octobre 1511 avec le titre d'ambassadeur (et non d'orateur ou de mandataire – le choix du titre a ici une importance cruciale), Guicciardini présente un profil inédit pour une telle mission, puisqu'il a alors seulement 28 ans et que, pour brillant qu'il soit, il n'a encore participé à aucun conseil de gouvernement. Si l'on s'en tient au critère qualifiant aux responsabilités publiques traditionnellement en vigueur à Florence, celui de la " reputazione " , cette synthèse de prestige social atavique et de renommée individuelle acquise par l'expérience de la chose publique, 1 il ne devrait pas, en théorie comme en pratique, être habilité à remplir une charge aussi prestigieuse. Indiquer cela nous plonge d'emblée au coeur d'une problématique majeure de la période républicaine florentine, à savoir le lien entre expérience individuelle de la politique et gestion collective de la cité. La question liminaire du choix de Guicciardini pour une telle mission a été analysée jusqu'à présent sous le double prisme de ses qualités individuelles et de son insertion particulière au sein de l'oligarchie : tout en étant le fils d'un homme, Piero, qui n'est jamais départi d'une certaine neutralité à l'égard de Piero Soderini, il est en effet le gendre d'Alamanno Salviati, opposant de taille au Gonfalonier de justice. 2 Qu'il ait, à titre personnel, un faible poids politique représente un avantage dans un tel compromis car, sans être une source de menace trop perceptible pour la faction populaire, il pourra être accusé à bon compte d'incompétence par Soderini, qui se défaussera ainsi sur lui de ses responsabilités en cas d'échec patent de sa mission. Dans une telle analyse, Guicciardini se trouve en même temps légitimé et fragilisé pour cette mission par son statut socio-politique. Ses hésitations, au moment d'accepter cette charge, montrent qu'il n'est pas dupe des risques encourus, 3 mais qu'il y voit un formidable accélérateur de carrière, à un moment de sa vie où rien ne le retient à l'intérieur de la cité. Aucun de ces arguments n'est cependant, en soi, décisif. C'est leur effet cumulatif qui permet de présenter Guicciardini comme le moins mauvais choix possible pour une telle mission – un choix qui s'impose donc moins qu'il n'apparaît comme le fruit de contingences conjoncturelles. Il manque toutefois un élément cristallisateur susceptible de donner à ces arguments hétérogènes la force de la nécessité et de justifier un choix qui, comme nous le verrons, surprend en définitive moins en lui-même que par sa temporalité. Dans ses Ricordanze, Guicciardini indique que sa désignation est intervenue au terme d'un débat qui a donné lieu à plusieurs votes improductifs, avant que son nom ne se dégage le 17 octobre 1511. 4 Même s'il reçoit là, selon ses propres mots, «un plus grand honneur que n'en a jamais reçu aucun jeune de notre cité», 5 il y a donc autour de sa personne une unanimité moindre qu'il ne le prétend par la suite dans son Oratio Accusatoria, où il parle d'un « consentement 1 Voir Barbuto, La " bottega della politica " , p. XXIII. 2 Voir à ce sujet Palmarocchi, Studi Guicciardiniani, p.60, ainsi que Cutinelli-Rendina, Entre diplomatie familiale, p. 232. 3 Voir Fournel, " Non essere un'ombra " , pp. 43-44 et M. Palumbo, Natura, pp. 17-18. 4 Guicciardini, Ricordanze, p. 69. Notons toutefois la rapidité d'ensemble du processus de désignation : la première occurrence au sein des Consulte e pratiche de la nécessité d'envoyer un ambassadeur auprès du roi d'Espagne apparaît le 13 octobre 1511, tandis que Guicciardini est désigné le 17 octobre. Voir Consulte, 1988, pp. 243-244. 5 «[…] e fattogli più onore che mai fussi fatto a giovane alcuno della nostra città», in Guicciardini, Oratio accusatoria, p. 150.
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Citer

Jean-Marc Rivière. La légation en Espagne de Francesco Guicciardini, entre expérience individuelle et processus de formation collectif. Italie et Espagne entre Empire, cités et États. Constructions d’histoires communes (XVe-XVIe siècles), 2017. ⟨halshs-01791037⟩
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