Virgile et la naissance de l'Ars notoria
Résumé
From the second half of the 12th century onward, Virgil, considered by the medieval tradition as a wise person or a philosopher, fins himself attributing a variable number of marvels. In the panel of the founding narratives of Virgil the magician, one presents a certain peculiarity : it is the one where the English clerk Gervase of Tilbury (Otia imperialia, c. 1214, III, 112) associates the poet with the discovery ‒ in the vicinity of Napoli ‒ of a real tradition of ritual magic, the Ars notoria, commonly used by numerous manuscripts from the 1220s onward, and which promises to give perfect knowledge to its user by the means of an angelic revelation. At first sight this association can seem fortuitous, because the Ars, placed in manuscripts under the patronage of Solomon and Apollonius [of Tyana], integrates at no time the poet of Mantua into the network of its authorities. However, it is nothing of the sort. As revealed by various intertextual links, it seems that the literary tradition represented by the Dolopathos by the cistercian monk John of Alta-Silva (end of the 12th c.), which made Virgil an expert in arts of the trivium and quadrivium (especially in astrology), as well as an extraordinary teacher, had a direct influence on the circle (probably bolognese) from which arises the Ars notoria. Gervase would be in reality only a well-informed reporter and he would have linked this tradition to the Neapolitan folklore. At a stage in the history of the text that the manuscripts do not allow us to know, the initial authority – Virgil – would thus have been disqualified in favor of a more common figure in magic context : Solomon.
À partir de la seconde moitié du XIIe siècle, Virgile, considéré par la tradition médiévale comme un sage ou un philosophe, se voit attribuer un nombre variable de merveilles. Parmi les récits fondateurs de la figure de Virgile magicien, un présente une certaine singularité : il s’agit de celui dans lequel le clerc anglais Gervais de Tilbury (Otia imperialia, v. 1214, III, 112) associe le poète à la « découverte » dans les environs de Naples d’une véritable tradition de magie rituelle, celle de l’Ars notoria, attestée par nombre de manuscrits à partir des années 1220 et qui prétend insuffler à son utilisateur la connaissance parfaite par le biais d’une révélation angélique. À première vue, cette association peut sembler fortuite dans la mesure où l’art en question, placé dans les manuscrits conservés sous le patronage de Salomon et d’Apollonius [de Tyane], n’intègre à aucun moment le poète de Mantoue dans le réseau de ses autorités. Toutefois, il n’en est rien. Ainsi que le révèlent divers liens intertextuels, il apparaît que la tradition littéraire incarnée par le Dolopathos du moine cirstercien Jean de Haute-Seille (fin du XIIe siècle), qui fait de Virgile un expert dans les arts du trivium et du quadrivium (notamment en astrologie) en même temps qu’un pédagogue extraordinaire, a eu une influence directe sur le milieu (probablement bolonais) d’où est issue l’Ars notoria, ce dont Gervais ne serait en réalité que le rapporteur bien informé et ce qu’il aurait rattaché au folklore napolitain. À un stade de l’histoire du texte que les manuscrits ne nous permettent pas pour l’heure de connaître, le modèle initial ‒ Virgile ‒ aurait ainsi été disqualifié au profit d’une figure plus commune en contexte magique à la croisée des XIIe et XIIIe siècles, celle de Salomon.
Loading...