Nigromancie et hérésie. Le De jurisdictione inquisitorum in et contra christianos demones invocantes de Nicolas Eymerich (O.P.)
Résumé
At the very beginning of his career as an inquisitor, in 1359, the Catalan of the Dominican Order Nicholas Eymerich writes a long treatise ‒ still unpublished ‒ intitled De jurisdictione inquisitorum in et contra christianos demones invocantes, which has an important place in the process of “hereticisation” of magic and invocation of demons which started under John XXII’s pontificate. Relieved of his inquisitorial duties by the king of Aragon Peter IV the Ceremonious et by the local hierarchy of the Church, Eymerich, who supports of the pontifical power, vigorously defends his jurisdiction and prerogatives in his opus. To turn the invocator of evil spirits into heretic, this articles shows that he does not use the bull Super illius specula (1326 or 1327) making the proceedings against magicians for heresy legal nor he based his doctrine on a demonological turning point, but he follows, without making any precise quotations, the arguments formulated by another Catalan, the jurist of the Carmelite Order Guido Terreni, when the latter answered to John XXII on this matter in 1320.
Au tout début de sa carrière d’inquisiteur, en 1359, le dominicain catalan Nicolas Eymerich rédige un De jurisdictione inquisitorum in et contra christianos demones invocantes qui s’avère être une pièce importante, quoique toujours inédite, dans le processus de qualification des pratiques magiques comme hérésie initié sous le pontificat de Jean XXII. Au moment où il écrit, Eymerich a été suspendu dans son office par décision du roi d’Aragon et de la hiérarchie ecclésiastique locale, peu enclins à satisfaire l’intransigeance de l’inquisiteur vis-à-vis de ces hérétiques d’un nouveau genre, et il s’agit donc pour lui de défendre avec véhémence sa juridiction et ses prérogatives. Pour affirmer le caractère hérétique des invocateurs de démons, Eymerich ne se fonde pas ni sur la bulle Super illius specula promulguée en 1326 ou 1327 ni sur une démonologie qui accroît les capacités de nuisance des mauvais esprits, mais il reprend à son compte, de manière masquée, l’argumentation développée en 1320 par le carme catalan Guido Terreni, l’un des rares experts consultés par Jean XXII alors favorables à l’'hérétisation' sans restriction des pratiques magiques.