« On n’est pas si mauvaises ! » Les arrangements des aides-soignantes en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) face aux épreuves de professionnalité
Résumé
Through in-depth ethnographic research, carried out by interviews and observations in two nursing homes for dependent elderly people, this article shows how nursing auxiliaries, despite difficult working conditions, manage to deal with the rules and constraints imposed on them so to make their daily tasks doable and tolerable. Nursing auxiliaries, led by an ideal model of how to accomplish their work, create common informal rules, despite the diversity of initial training and employment status. This search for a compromise between the desire to "do a good job” and the feeling of not receiving adequate means is, for them, a true "test of professionality". More generally, this reflects the challenges faced by professionals funded by public money in France, especially in the present context of budgetary restrictions and welfare state crisis.
Fondé sur une enquête ethnographique menée par entretiens et observation dans deux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), cet article montre comment les aides-soignants, en dépit de conditions de travail difficiles, « s’arrangent » avec les règles et les contraintes qui leurs sont imposées pour rendre leurs tâches quotidiennes faisables et supportables. Ces aides-soignants, portés par un idéal fort de réalisation de leur travail, produisent des normes informelles partagées malgré la diversité de leurs formations initiales et de leur statut d’emploi. Cette recherche de compromis entre la volonté de « bien faire leur travail » et le sentiment de ne pas recevoir les moyens pour y parvenir constitue pour eux une véritable « épreuve de professionnalité ». Plus généralement, celle-ci revoie aux épreuves que rencontrent les professionnels financés par l’argent public en France, spécialement dans le contexte actuel de restrictions budgétaires et de crise de l’État-providence.