Le savoir étymologique, enjeu scientifique et objet d’enseignement (fin XIXe-début XXe siècle)
Résumé
A partir des années 1880, le savoir étymologique, alors au cœur de débats définitionnels, méthodologiques et épistémologiques au sein de la communauté savante, est introduit dans le système d’enseignement primaire pour concourir à l’enseignement du français. Ce savoir participe à cette discipline scolaire en voie de construction. De l’introduction de ce savoir dans les programmes dans les années 1880 à sa disqualification dans les années 1920, on interroge, de manière contextualisée, la validité du concept de « transposition didactique » (Y. Chevallard) et de l’idée d’autonomie des savoirs scolaires par rapport aux savoirs savants (A. Chervel) en montrant les convergences et les divergences entre l’étymologie scolaire et l’étymologie savante. L’étude s’appuie sur un ensemble de travaux d’élèves de l’école primaire supérieure de filles Edgar Quinet dans le 9e arrondissement de Paris, datés de l’année scolaire 1906-1907 et conservés aux Archives départementales de Paris. Le contenu de ces travaux relevant du savoir étymologique scolaire est mis en regard des questionnements scientifiques contemporains, tels que la nature du savoir étymologique, les méthodes qui permettent d’établir une étymologie ou le débat autour de la réforme de l’orthographe française. On montre que l’introduction du savoir étymologique à l’école représente une tentative ratée de rapprochement d’un savoir de référence et du savoir enseigné. Par ailleurs, on détermine que les problèmes posés par les savants ont alors une résonance en milieu scolaire sans nécessairement passer par des vecteurs de scolarisation usuels comme les programmes ou les manuels scolaires. Enfin, on présente la manière dont le savoir étymologique s’inscrit de manière transversale dans la configuration du français à la période étudiée.