S. Le, explication, le choix de remplacer la danseuse par l'acrobate n'est pas neutre car le jongleur est une figure ambivalente. Prisé par les laïcs, il est décrié systématiquement par les autorités ecclésiastiques jusqu'au XIII e siècle 35

. Doter-la-fille-d, Hérodiade du corps de l'acrobate revient donc à

. Dans-les-images, Le geste, en effet, n'est jamais neutre car il reflète à l'extérieur (foris) les mouvements de l'âme (intus) Dans leur codification, théorisée par les clercs, il faut soigneusement distinguer les gestes (gestus) de la gesticulation (gesticulatio) qui rapproche du Diable. C'est pourquoi les histrions, présentés comme les plus honteux, sont les acrobates qui : « transformant corpora sua per turpes saltus et per turpes gestus » 39 . Si, d'après Hugues de Saint-Victor, le geste mesuré est l'expression de la domination des passions, la gesticulation

. De and . Le, jongleur se sert de son corps le rapproche de la prostituée : l'un donne à voir, l'autre s'offre et se vend, Die tanzende Salome in der Kunst von der christlichen Frühzeit bis un 1500, p.36, 1980.

V. C. Sur-ce-thème, S. Casagrande, and . Vecchio, Clercs et jongleurs dans la société médiévale (XII e -XIII e siècles À partir du XIII e siècle, dans la littérature mystique et mariale, la figure du jongleur évolue : son itinérance est comparée à celle des prêcheurs, pour capter l'attention des fidèles, Françoise d'Assise se présente comme un « jongleur de Dieu »? Il n'est plus le symbole du péché, Annales E.S.C., 34 e année, pp.913-928, 1979.

T. Abelard, I. Christiana, and P. , 178, col. 1210-1211 ; Honorius Augustodunensis, Elucidarium, PL. 172, col. 1148. 38 Honorius Augustodunensis, Elucidarium, PL. 172, col. 1148 : « Habent spem joculatores ? Nullam. » 39 Thomas Chobham, p.p, 1968.

. Hugues-de-saint-victor, X. De-institutione-novitiorum, and P. , 76, col. 938-943. Voir sur toutes ces questions

. Supplice-comme-dans-le-livre-d, images de Madame Marie, peint entre 1285 et 1290, en Belgique 52 . Lors de la mise à mort de Baptiste, Hérodiade désigne la tête du saint à Salomé qui porte le plat

. Au-xv-e-siècle and . Le-maître-de-marguerite, Orléans brosse également un portrait plutôt sombre de Salomé dans l'ouvrage Horae ad usum romanum 53 Les deux épisodes cruciaux du martyre de saint Jean-Baptiste ? le banquet d'Hérode et le supplice -sont peints dans des médaillons polylobés, situés dans les marges ornées. Ils complètent ainsi l'image principale du Précurseur en train de prêcher. Hérode et Hérodiade se regardent tandis que Salomé, encadrée de deux bourreaux, exécute une chorégraphie aux gestes très prononcés. Une certaine agitation semble régner au milieu des convives. Loin de la retenue qui sied à une jeune princesse, Salomé se livre à une danse extravagante : sa jambe gauche sort de sa tunique fendue et son bras droit au-dessus de sa tête évoque l'assurance des séductrices

. Dans-la-composition, Salomé entretient une proximité avec les bourreaux qui la rabaisse à leur rang et qui associe sa danse sensuelle à la mort Si le sort du malheureux Baptiste se joue à la table du couple royal, c'est le péché suscité par la danse qui entraîne la perte du saint. La seconde vignette illustre la décapitation du saint. À l'entrée de la prison, Salomé, accompagnée d'une servante que rien ne différencie d'elle, s'apprête à récupérer la tête de Jean-Baptiste (fig. 23)

. Pour-le-peintre, la danse de Salomé provocante et colorée est morbide puisqu'elle est visuellement liée aux bourreaux. La jeune femme est dépeinte comme froide et pragmatique : le plat posé sur le sol

À. Partir-du-xv-e-siècle, Hérode une connotation particulière : Salomé y est une servante maléfique qui apporte sur la table royale la tête du saint, immédiatement profanée par sa mère. Le chef de Baptiste se confond avec les autres plats posés devant les convives. Le cadre du repas, la tête nimbée du saint, le couteau dans les mains de la reine

. Personnage-certes-secondaire-au-moyen-Âge-dans-les-cycles-du-martyre-de-jean-baptiste, Salomé voit les concepteurs d'images accorder à sa représentation une attention étonnante. Son corps et ses gestes sont l'objet en effet d'une réflexion profonde sur la séduction de la chair

. Bnf, Nouvelle Acquisition français 16251, f° 57. L'inscription indique : « ensy c'om decole saint jehan baptiste

B. Paris, Horae ad usum romanum, f° 166, peint, à Rennes, 1156.