Résumé : La formation des adjectifs en –(a)ble précédés du préfixe négatif in– (ou l’un de ses allomorphes) quoique très ancienne, compte aujourd’hui parmi la plus vivante et la plus productive : les mots nouveaux ne posent aucun problème d’interprétation aux francophones, comme peuvent en témoigner les nombreux hapax et néologies observables en –(a)ble, que l’on rencontre çà-et-là, et qui ne paraissent pas choquer ; nous avons pu en relever un certain nombre d’occurrences dans nos corpus oraux orléanais, les ESLO : ingarable, incirculable, infinissable, inservable et qui ne sont pas a priori enregistrés dans les dictionnaires. Nous pouvons citer aussi quelques autres cas entendus récemment : (étudiant) doctorable ; (cheveux) impeignables ; (base de données) requêtable (échanges entre linguistes) ; (chenille) intuable (dans un stand agricole) ; (mot) inécrivable...
Notre but est de montrer que, dans l’usage, une partie des « formes adjectivales » en –ble se construisant avec le préfixe négatif in– prend un certain sens "superlatif/intensif" employé génériquement et ne renvoie pas nécessairement à une activité niée, à un procès démenti, sans idée de polarité, contrairement à la négation non-liée, de type adverbial, qui sélectionne exclusivement des emplois processifs. L'article montre également en quoi une approche compositionnelle au sens strict du terme paraît problématique dans le traitement de ces données.