Manger (et boire) dans les usines occupées du printemps 1936
Résumé
Avec celles de 1968, les grèves du Front populaire constituent l’un des épisodes les plus marquants et les plus étudiés de l’histoire du mouvement ouvrier français, élevé au rang de « mythes sociaux » . Si la chronologie des évènements est aujourd’hui bien connue, nos connaissances sur l’organisation pratique et technique de ces grèves demeurent néanmoins limitées. Et quand il s’agit d’aborder la question du ravitaillement, nous entrons cette fois dans une sorte de « no man’s land » de la recherche. Aussi s’intéresser à la nourriture dans les usines occupées de 1936 présente un double intérêt, scientifique d’abord au vu de l’état de l’art, et historique ensuite quand on pense que la triade du Front populaire était «Le Pain, la Paix, la Liberté» et que «Du travail et du pain !» était l’un des slogans des manifestations de ce printemps agité. Mais la question de la nourriture dans cette période de crise aggravée, où le chômage touche un million de personnes sans secours (sans compter les travailleurs à temps partiels), ne peut être limitée à son approche métaphorique et rhétorique. Elle demeure un besoin primaire. A ce titre, il nous semble donc pertinent d’appréhender l’enjeu du ravitaillement et de la nourriture dans cette lutte victorieuse de la classe ouvrière, en nous interrogeant sur les réseaux de solidarité, l’organisation des repas et enfin sur leur contenu. Cette approche est d’autant plus importante que les grèves de 1936 se singularisent par l’occupation des usines (9000 usines occupées pour le seul mois de juin) et que la prise des repas s’effectue alors sur le lieu de travail.
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