Les faïences à glaçure monochrome bleu-gris d’Ougarit (Syrie) - HAL Accéder directement au contenu
Communication dans un congrès Année : 2007

Les faïences à glaçure monochrome bleu-gris d’Ougarit (Syrie)

Résumé

Les objets en faïence monochrome bleu-gris présentent tous la particularité d’être recouverts d’une glaçure monochrome gris-bleu et la plupart possèdent un corps de même couleur. Cette technique est essentiellement connue en Égypte où elle avait été reconnue par A. Lucas dès 1962 (dénommée « Variant D »). Dans les années 1980, A. Kaczmarczyk et R.E.M. Hedges avaient distingué, au sein de la production égyptienne du Nouvel Empire, un sous-groupe caractérisé par des faïences colorées au cobalt (« Variant D2 »), et montré par ailleurs que ce cobalt, toujours accompagné de manganèse, de fer, de nickel, de zinc et d’aluminium, provenait probablement des aluns présents dans les oasis du désert occidental égyptien. L’étude des faïences d’Ugarit m’avait permis de reconnaître, sur la base d’un examen à l’œil nu, environ 2200 objets, pour l’essentiel des éléments de parure, recouverts d’une glaçure monochrome gris-bleu. Ce matériel a fait l’objet d’un classement en 19 types, les perles annulaires et les perles discoïdales crénelées représentant à elles seules environ 83 % du corpus. Les types reconnus sont les suivants : perle fusiforme côtelée, perle globulaire côtelée, perle-lanterne, perle d’espacement, perle à décor de rosace, perle-bouton à décor de rosace, perle-bouton en forme de dôme, perle-pendentif rectangulaire, perle-pendentif en forme de grappe de raisins, pendentif en forme de grappe de raisins, pendentif en forme de tête de lion, bague, scaraboïde, élément d’incrustation en forme de plaquette, figurine de chien assis, objet semi-hémisphérique, vase. Pour 2/3 des types, l’étude typologique et stylistique a permis d’établir de nombreux parallèles avec le matériel égyptien provenant de sites du Nouvel Empire : Amarna, Médinet Habou, Gourob, Kahun, Deir el-Medineh. Les parallèles proche-orientaux sont au contraire rares et concernent le plus souvent des sites du Levant méridional (Lachish, Megiddo, Tell Abou Hawam…) ou de Chypre. Dans les années 1980, cinq pièces en faïence d’Ugarit (deux pendentifs en forme de grappe de raisins, le pendentif en forme de tête de lion, une perle en forme de grappe de raisins et le fragment de vase) avaient été analysées par A. Kaczmarczyk. L’analyse par Fluorescence X avait révélé l’emploi de cobalt, corrélé aux mêmes éléments (aluminium, manganèse, fer, nickel, zinc), pour la coloration du corps et de la glaçure de ces objets. Nous souhaitions mener une étude plus détaillée sur cette catégorie de faïences, reposant sur un échantillonnage plus large de 25 pièces (représentant 12 types différents), toutes conservées dans les collections du Louvre. Ces objets ont été analysés par PIXE (Particule Induced X-Ray Emission) avec l’accélérateur de particules AGLAE et sous microscope électronique à balayage (MEB). Le cobalt est présent, comme élément chromophore, dans tous les spécimens. Il est associé à du nickel, du fer, du zinc, du manganèse et de l’aluminium, c’est-à-dire aux mêmes éléments que ceux observés avec le cobalt employé dans l’Égypte du Nouvel Empire, dont l’origine est probablement l’oasis de Kharga. Aucune trace d’arsenic, élément souvent associé au cobalt d’origine iranienne, n’a été détectée. L’étude archéologique et archéométrique des faïences à glaçure monochrome bleu-gris d’Ugarit a permis de proposer une origine égyptienne pour la plupart d’entre elles. Il convient de souligner à nouveau la forte proportion des formes typiquement égyptiennes : perles et pendentifs en forme de grappe de raisins, pendentif rectangulaire, bagues à décor hiéroglyphique, scaraboïde…, auxquels il convient d’ajouter le pendentif en forme de tête de lion et le fragment de vase étudiés par A. Kaczmarczyk. Le lieu de provenance en Égypte n’est pas forcément unique. Si l’origine égyptienne du cobalt semble évidente, on ne peut pas exclure le recours à plusieurs mines différentes, plus ou moins riches en manganèse et en zinc. Par ailleurs, les parallèles archéologiques orientent vers plusieurs sites égyptiens, même si celui d’Amarna offre les comparenda les plus nombreux. Il faut cependant souligner la présence au sein des faïences à glaçure bleu-gris d’Ugarit analysées d’un groupe moins important en nombre, comprenant des perles-boutons en forme de dôme et à décor de rosace. Ces éléments de parure, qui proviennent pour l’essentiel d’un même contexte de découverte, se distinguent d’un point de vue typologique et technique (structure et composition). Certaines pièces sont caractérisées de plus par un corps blanc ou blanc grisâtre. Pour ce groupe, on peut envisager l’hypothèse d’une production égyptienne avec une recette différente (avec peut-être l’emploi de fondants différents reflétés par des teneurs différentes en aluminium, sodium et potassium) ou celle d’une production locale « égyptisante », utilisant néanmoins des matières premières égyptiennes. L’analyse en laboratoire de l’ensemble du corpus de la faïence, riche d’environ 18.000 pièces, n’a jamais été envisageable. Il a donc été nécessaire de dégager des problématiques spécifiques afin d’opérer des sélections d’objets. C’est ainsi que j’ai décidé de m’intéresser plus précisément à la question des productions égyptiennes et égyptisantes, qui constitue l’un des enjeux de la recherche dans la mesure où Ugarit entretint des relations « privilégiées » avec l’Égypte. L’objet est-il une importation égyptienne, une copie locale réalisée à partir d’un matériau importé ou local, un objet produit par un artisan égyptien travaillant en Égypte, ou au Levant, ou encore un objet produit par un artisan asiatique œuvrant au Levant, ou en Égypte ? Mon choix s’est porté sur l’ensemble des objets en faïence monochrome gris-bleu, dont une part très importante présente de fortes affinités techniques et stylistiques avec le matériel égyptien du Nouvel Empire. Ce corpus, qui comprend plus de deux mille pièces, est unique au Levant. Ce travail s’est inscrit dans le cadre d’une collaboration entre le C2RMF, le Musée du Louvre (Département des Antiquités orientales), l’UMR 5133 Archéorient et la Mission archéologique syro-française de Ras Shamra-Ougarit.
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halshs-01265169, version 1 (31-01-2016)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-01265169 , version 1

Citer

Anne Bouquillon, Valérie Matoïan. Les faïences à glaçure monochrome bleu-gris d’Ougarit (Syrie). Neuvième Congrès International des Égyptologues , 2007, Grenoble, France. pp.207-220. ⟨halshs-01265169⟩
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Dernière date de mise à jour le 13/04/2024
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