Possession et appropriation dans "Les Maîtres fous" (Jean Rouch, 1957)

Nicolas Schmidt (1)

1 IHTP - Institut d'histoire du temps présent

Dans une ancienne colonie anglaise du Ghana, les hommes de la tribu Haouka pratiquent un rituel de possession : en transe, ils semblent désarticulés, insensibles à la douleur, l'écume à la bouche; font le sacrifice d'un chien, qu'ils mangent ensuite; miment par toutes sortes d'objets hétéroclites les cérémonies du colonisateur (défilés, parades salut au drapeau, etc.) dont ils incarnent les rôles, sur fond de cris, chants, musique ; puis, le lendemain, reprennent leur vie d’employés ou d’ouvriers, comme si de rien n’était. A travers l’exercice d’un culte, le film traite des rapports colonisateurs/colonisés à travers – domination et interdépendance ; libération ou normalisation – ainsi que les manières, pour ces tribus, de s’approprier une culture des plus éloignées de la leur. Le commentaire présente la particularité d’avoir été enregistré par le cinéaste ethnologue en direct pendant la première projection, tandis que le réalisateur a également adapté son tournage au rituel qu’il a filmé en se tenant corporellement, moralement et mentalement au plus près des personnes qu’il filme, suivant notamment leur rythme et leurs mouvements.

Mots clés: rituel de possession; transe; Jean Rouch; Haouka; Les Maîtres fous; La Boétie; gouvernance; anthropologie partagée; Léopold Sédar Senghor; Discours de la servitude volontaire

Domaines: Sciences de l'Homme et Société; Anthropologie sociale et ethnologie

Nicolas Schmidt. Possession et appropriation dans "Les Maîtres fous" (Jean Rouch, 1957). Sorciers et sorcières à l’écran, coordination par Corinne Vuillaume, L'Harmattan, pp.119-132, 2010, Champs visuels, 978-2-296-12071-6. ⟨halshs-01240390⟩