!. Silvia-:-dès-que-je-le-défends-sur-ce-ton-là and . Qu, est-ce que c'est que le ton dont vous dites cela vous-même ? Qu'entendez-vous par ce discours, que se passe-t-il dans votre esprit ? LISETTE : Je dis, Madame, que je ne vous ai jamais vue comme vous êtes et que je ne conçois rien à votre aigreur. Eh bien, si ce valet n'a rien dit, à la bonne heure, il ne faut pas vous emporter pour le justifier, je vous crois, voilà qui est fini

, D'une part, la bonne coopération du confident est nécessaire. Or, ici, Lisette, qui éprouve une attirance pour celui qu'elle prend pour Dorante mais craint de trahir les intérêts de sa maîtresse, est uniquement attachée à défendre celui-ci : elle refuse donc le rôle que lui donne Silvia, à savoir de partager son dégoût. L'implication personnelle du confident dans le noeud de l'action est donc un frein majeur à la bonne effectuation de la confidence

, Dorante (c'est-à-dire Bourguignon déguisé), mais ce faisant dévoile surtout son attirance pour

. Bourguignon-(c'est-À-dire-le-véritable-dorante, Si Lisette joue un rôle de révélateur, c'est malgré elle. Car c'est parce qu'elle ne comprend pas Silvia, qu'elle lui renvoie en miroir ses propos : la confidente n'est plus une oreille qui entend et comprend, mais un écho qui fait se révéler l'héroïne. Silvia, en effet

, Ce sont ainsi les pensées qu'elle suppose à Lisette qui démasquent les siennes. Le malentendu, l'incompréhension entre les locuteurs sert ainsi principalement à véhiculer l'implicite de l'échange. Le dévoilement de soi ne se réalise alors qu'à l'insu des deux interlocutrices : prises au piège de leurs représentations sociales, Lisette ne peut aucunement imaginer que sa maîtresse puisse éprouver des sentiments pour un valet, Silvia ne peut s'avouer qu'elle est attirée par le supposé Bourguignon. Ne se reconnaissant pas elle-même, son entourage ne la reconnaissant pas, l'héroïne se donne à connaître, Lisette dévoile non pas ce que la suivante veut dire mais ce qu'elle-même veut cacher

, Les dialogues entre un personnage et son confident ne servent donc pas seulement à faire connaître aux spectateurs ce qu'ils doivent savoir sur les pensées secrètes des héros. Elles leur font aussi découvrir dans quels replis de l'âme se cachent les secrets, avec quel degré de conscience un personnage peut connaître son moi. Ces échanges difractent donc une image complexe du sujet parlant : narcissisme du moi, amour-propre, culpabilité, pensées qui ne parviennent pas jusqu'à la conscience s

, Théâtre Complet, éd. Deloffre et Rubelin t. 1, vol.II, pp.820-821, 1996.

E. , mais aussi par ses silences : il se dévoile à travers ce qu'il dit comme à travers ce qu'il ne dit pas. Le dialogue dramatique est ainsi la scène du théâtre du moi. La critique et l'évolution du rôle de confident à la lumière de la vraisemblance théâtrale montre sur scène quelles représentations nous nous faisons des échanges où nous nous dévoilons. Il est accepté que l'aveu d'un secret crée un déséquilibre dans l'interaction, et que la confiance se manifeste dans des relations verticales. La dynamique du dialogue dramatique autorise provisoirement des renversements de rôles sur « l'échiquier taxémique », ainsi que le nomme Catherine Kerbrat-Orecchioni (1992 : p.108), de façon à provoquer les aveux les plus difficiles. Mais les quiproquo et les malentendus entre les personnages servent aussi à révéler que le dévoilement de soi ne se réalise pas seulement dans les situation de bonne coopération entre les interlocuteurs. Le dévoilement de soi peut se réaliser indirectement dans l'interaction, c'est-à-dire implicitement, La confidence à l'épreuve de la vraisemblance théâtrale : du dévoilement de soi à l'aveu malgré soi 16 son usage de la parole

, Le système de l'énonciation théâtrale, avec ses spectateurs assemblés pour voir et entendre des personnages qui se parlent, et parlant, se dévoilent, témoigne de l'intérêt du public pour découvrir, comme à travers un miroir, ces échanges où des personnages à l'image de personnes dialoguant parlent d'eux-mêmes. Plus que toute autre, les scènes de confidence montrent une fascination certaine pour le sujet et ses masques, pour l'intériorité et son ménagement dans la relation à autrui

, Il ne nous semble pas que, dans ce dispositif qui s'apparente à un tribunal, ce ne soit qu'une mise en procès de l'intériorité. Mais, dans le cas des oeuvres de ce répertoire, alors que les spectateurs immédiats vivent dans un régime de monarchie absolue

, La confidence à l'épreuve de la vraisemblance théâtrale : du dévoilement de soi à l'aveu malgré soi, p.17

D. ;. Marivaux and M. Kerbrat-orecchioni-catherine, Marivaux d'hier, Marivaux d'aujourd'hui, Le dialogue théâtral. -in P. Larthomas, Mélanges de langue et littérature offerts à Pierre Larthomas, pp.31-49, 1985.

. Mounin-(georges, 1970 : La communication théâtrale, Introduction à la sémiologie, Minuit. PAVIS (Patrice), vol.41, pp.63-88, 1984.

. Rollinat-levasseur-(eve-marie, SAFTY (Essam), 1992 : « Le confident et l'épreuve de la liberté d'action dans le théâtre tragique, vol.36, pp.97-109, 2000.

. Schaefer-(jean-marie, La Dramaturgie classique en France, Nizet. WORTH-STYLIANOU (Valérie), 1992 : « La querelle du confident et la structure dramaturgique des premières pièces de Racine », Littératures Classiques, vol.16, pp.230-246, 1950.