La messe rouge, entre Parlement et Sainte-Chapelle : un témoignage inédit sur la liturgie du début du XVIIIe siècle
Résumé
Chaque année, le lendemain de la St. Martin, le Parlement de Paris faisait sa rentrée en participant à une messe solennelle du Saint-Esprit. Se déroulant au sein même du Palais, dans la « chapelle de la Grand-Salle du Palais », cette cérémonie était naturellement placée sous la responsabilité du clergé de la Sainte-Chapelle. Les magistrats, en corps, y étaient revêtus de leur robe d’apparat rouge (symbole de l’autorité), d’où le nom de Messe Rouge donné à cette événement liturgique important. La musique y tenait une place remarquable, surtout depuis que Marc Antoine Charpentier s’y était signalé, en 1698, dans un « motet pour l’offrande de la Messe Rouge ». Or les circonstances particulières créées par la translation du Parlement à Pontoise, de juillet à décembre 1720, placèrent le Parlement aussi bien que la Sainte-Chapelle, dans un environnement inhabituel, mais obligés de restituer au mieux les lieux et la solennité liturgique de la cérémonie habituelle. C’est cette tension – au milieu des coutumières frictions de protocole – qui explique le récit, tout à fait extraordinaire par sa précision, d’un « mémorialiste » méconnu et tout récemment identifié : Jean Gilbert, sieur de L’Isle, quelquefois connu jusqu’à présent sous le nom de Delisle. Commis greffier en titre d’office depuis 1718, mais aussi irremplaçable secrétaire particulier du greffier en chef civil (François Roger Gilbert de Voisins avec lequel, justement, il n’a aucun lien de parenté, malgré les apparences), Jean Gilbert est un incroyable archiviste et journaliste. Précision des faits, des gestes, des noms de personnes, des lieux et des décors, sensibilité à la musique et à la liturgie font de son « Journal du Parlement de Pontoise en 1720 » (Arch. nat. U 747, édité tout récemment) une source sans doute unique de la liturgie de la Messe Rouge et de la musique qui fut créée dans ce cadre.
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