Pour une comparaison des utilisations atypiques des constructions verbales chez les locuteurs bilingues anglais/français et anglais/allemand. - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue ELIS - Echanges de linguistique en Sorbonne Année : 2013

Pour une comparaison des utilisations atypiques des constructions verbales chez les locuteurs bilingues anglais/français et anglais/allemand.

Résumé

Au sein du champ du bilinguisme, les études sur le phénomène de l'alternance codique constituent un domaine majeur de la recherche, en pleine expansion depuis trente ans, et qui a autant de visages qu'il peut exister de couples de langues. Par alternance codique, on entend l'utilisation alternée et fluide par les bilingues de leurs deux langues dans la même conversation (GARDNER-CHLOROS 2009). Ce phénomène protéiforme a fait l'objet de milliers d'articles, et constitue pour ainsi dire un carrefour des disciplines de la linguistique : des approches telles que celles de la sociolinguistique, la syntaxe, la sémantique, la pragmatique ou la morphologie sont nécessaires pour en donner une vue qui ne soit pas parcellaire au point d'être irrecevable. C'est cette approche plurielle qui informera nos analyses dans les pages qui viennent, dans la mesure où chacune étant une dimension intégrante de la production de langage, il nous paraît plus producti f de les traiter ensemble que séparément. Une grande partie de la recherche sur l'alternance codique est axée sur le verbe, ses compléments, et le traitement que peut leur réserver le jeu bilingue (MACSWAN, 2005). Dans la mesure où le verbe fournit le " noyau " de la phrase, cela peut se comprendre. Ce qu'il est permis de faire ou non autour d'un syntagme verbal a ainsi été l'objet d'un grand nombre d'hypothèses : on a écrit qu'un locuteur ne pouvait changer de langue entre un verbe et son objet, de par les relations de gouvernement qui les lient (BELAZI et al., 1994, DISCIULLO et al., 1986) ; que les mots grammaticaux ne pouvaient faire l'objet d'un changement de langue, et qu'on ne pouvait donc imaginer un passage d'une langue à l'autre entre un auxiliaire et un verbe lexical (JOSHI, 1985) ; ou, par exemple, que les locuteurs bilingues ne pouvaient changer de langue qu'aux points où les grammaires et syntaxes respectives sont similaires (POPLACK 1980). Quant aux conflagrations dans lesquelles un verbe se voit affublé d'une désinence issue d'une autre langue, elles ont souvent été considérées illicites, c'est-à-dire ne pouvant être produites spontanément par les locuteurs, et font encore débat (POPLACK , 1980, MACSWAN, 1999, SEBBA, 2009). Malgré cela, une analyse du traitement du verbe chez les bilingues fondée sur l'étude de deux corpus oraux nous conduit à postuler que c'est souvent l'inverse qui se produit. En effet, chez les locuteurs bilingues français/anglais et anglais/allemand dont la pratique discursive est analysée pour cette étude, le groupe verbal semble être un lieu privilégié du passage d'une langue à l'autre et, de plus, ce passage prend des formes diverses et qui sont souvent similaires d'un couple de langue à un autre. C'est peut-être là d'ailleurs que se situe l'un des éléme nts phares dégagés par cette étude, à savoir que dans deux paires de langues se retrouvent des tendances syntaxiques et grammaticales communes. Nous souhaitons ainsi montrer que les locuteurs bilingues peuvent faire un usage similaire d'outils différents pour arriver au même but --communiquer un message précis --, quelles que soient les langues parlées. Après avoir présenté la méthodologie de la recherche dans le domaine de l'alternance codique, nous prendrons pour exemples les cas où les grammaires des deux langues en jeu sont rendues compatibles entre elles par divers " bricolages " syntaxiques, produisant des énoncés qui, en regard de la grammaire de chaque langue, seraient fautifs. Nous poursuivrons en nous penchant sur des énoncés où la rencontre des langues permet d'associer des propriétés qui n'existent que dans l'une ou l'autre. Ceci sera également l'occasion d'analyser les conflagrations morphologiques, dans lesquelles des désinences de langue X sont associées à des bases verbales de langue Y. Nous montrerons qu'il n'existe pas de systématicité dans l'utilisation ou non de ces conflagrations par les locuteurs bilingues, ce qui tendrait à faire penser que l'alternance codique permet, toutes proportions gardées bien entendu, de s'affranchir du carcan de la grammaire pour se concentrer sur le lexical, bien plus qu'il n'est permis ou naturel de le faire dans le discours monolingue. Nous montrerons ainsi que l'usage contigu de deux langues mène souvent non pas à compartimenter les grammaires mais au contraire à profiter de la malléabilité de la langue pour les faire se rencontrer et fluidifier ainsi l'échange linguistique en mettant à profit les idiosyncrasies de chacune.

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Citer

Charles Brasart. Pour une comparaison des utilisations atypiques des constructions verbales chez les locuteurs bilingues anglais/français et anglais/allemand.. ELIS - Echanges de linguistique en Sorbonne, 2013, 1 (4), pp.1-22. ⟨halshs-01065143⟩
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