"L'imprimé à la Renaissance : repenser la culture de l'écrit ?"
Résumé
Les travaux de P. Zumthor ayant rappelé que la voix était, au Moyen Âge, « un facteur constitutif de toute œuvre dénommée ‘littéraire’ », il s’agissait d’examiner dans quelle mesure l’imprimerie engendre une nouvelle situation historique en offrant un autre « mode possible de réalisation de ces textes ». À travers le cas d’Érasme, dont l’œuvre est caractérisée par un « logocentrisme impérieux », on a tenté de mesurer dans quelle mesure la préférence était accordée à l’oral ou à l’écrit, ou plutôt à la voix ou à l’écriture. L’une des conclusions de cette enquête porte sur la mise en œuvre d’une « rhétorique de la présence » qui servirait à exorciser « l’étrangement » provoqué par l’imprimerie. L’analyse de l’adage « Festina lente » montre que, enracinée dans une éthique exigeante, l’écriture imprimée semble tout d’abord, contrairement aux pratiques médiévales décriées, porteuse d’intégrité et d’universalité. Mais les ajouts postérieurs révèlent une angoisse grandissante face à la prolifération des livres et aux interprétations multiples qu’ils suscitent, angoisse qu’Erasme et d’autres auteurs conjurent en construisant des narrations où peut s’éprouver, comme chez Marguerite de Navarre, la « possibilité d’un consensus », ou encore en en référant à Dieu pour réarticuler Parole et Écriture.