La construction du problème social de la dyslexie en France et au Royaume-Uni: acteurs, institutions et pratiques (de la fin du XIXe au début du XXIe siècle). - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Autre Publication Scientifique Année : 2012

La construction du problème social de la dyslexie en France et au Royaume-Uni: acteurs, institutions et pratiques (de la fin du XIXe au début du XXIe siècle).

Marianne Woollven

Résumé

La notion de dyslexie désigne une situation dans laquelle la maîtrise des compétences en lecture et en écriture est considérée comme problématique, dans des contextes socio-historiques où la scolarisation primaire et secondaire est la norme. Ce problème est défini par l'application de critères d'inspiration médicale et psychologique à des performances scolaires particulières. La thèse est consacrée à la construction sociale de la catégorie de dyslexie en France et au Royaume-Uni. Il s'agit de comprendre comment un concept abstrait dans un premier temps devient peu à peu incontestable, jusqu'à décrire des personnes bien réelles. La démarche empirique adoptée consiste alors à étudier les dispositifs - c'est-à-dire un ensemble de pratiques discursives et non discursives, d'architectures et d'objets - qui font exister la dyslexie dans les deux pays. Cela implique d'abord de repérer tous les éléments qui constituent ces dispositifs pour en démontrer la cohérence, avant saisir les rapports sociaux dans lesquels ils s'inscrivent, afin de comprendre ce qui rend l'existence de la catégorie socialement possible dans les deux pays. Le corpus empirique mobilisé pour ce faire est constitué de différents types de données (archives, documentation, entretiens, observations, etc.) analysées dans une perspective qualitative soucieuse des spécificités nationales. La première partie est consacrée à la construction de la dyslexie comme problème public : des premiers cas recensés d'élèves ayant des difficultés de lecture inexplicables à la fin du XIXe siècle, à la reconnaissance de la catégorie dans le droit au début du XXIe. Deux situations contrastées sont mises en évidence. Au Royaume-Uni, la dyslexie est un problème social qui a réussi : après la " découverte " par des médecins des cas de difficultés en lecture inhabituelles et inexplicables, les revendications en vue de leur reconnaissance ont été structurées autour d'une définition précise du problème et des solutions ont été proposées par un groupe d'acteurs dont les activités sont unifiées autour du problème. En France, par contre, la dyslexie est un problème social dont l'autonomisation, la publicisation et la consécration étatique sont très récentes. Longtemps circonscrit à des secteurs d'activité limités, il parvient à une reconnaissance par l'État à l'issue d'activités de revendications à très faible visibilité. En somme, le succès de la dyslexie dépend de la précision de la définition du problème, de son adéquation avec les solutions proposées et s'inscrit dans des configurations nationales marquées par le fonctionnement de l'école et de l'État. Dans la deuxième partie, on montre que la dyslexie n'a de sens qu'en rapport avec l'institution scolaire. La dyslexie permet d'étudier la place d'une logique psychologique à l'intérieur de l'institution scolaire. Ainsi, au Royaume-Uni la dyslexie est un problème scolaire car la logique psychologique dont elle dépend est reconnue comme légitime par les enseignants et peut être intégrée aux pratiques pédagogiques. En France, elle demeure un problème extrascolaire (la logique médicale par laquelle elle est identifiée est extérieure au travail des enseignants ; les dispositifs relatifs permettant sa reconnaissance demeurent des situations d'exception). La troisième partie est consacrée à l'étude des outils d'objectivation qui donnent consistance à la dyslexie. Cette étude permet de montrer que cette interprétation des difficultés en lecture s'appuie sur des schèmes d'interprétation du monde qui accordent peu de place aux rapports sociaux et davantage aux aspects psychologiques. Ces outils confèrent un caractère incontestable à de petits écarts qui autrement passeraient inaperçus au niveau individuel et permettent, à un niveau collectif de dégager des traits communs à ces personnes, tout en en gommant d'autres. En conclusion, cette étude de la dyslexie est une contribution à l'étude historique et sociologique des classifications. Dans chacun des pays considérés, la catégorie de dyslexie est révélatrice de la place accordée aux déterminants sociaux et du rôle social de l'école.

Domaines

Sociologie
Fichier non déposé

Dates et versions

halshs-00972280 , version 1 (03-04-2014)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00972280 , version 1

Citer

Marianne Woollven. La construction du problème social de la dyslexie en France et au Royaume-Uni: acteurs, institutions et pratiques (de la fin du XIXe au début du XXIe siècle).. 2012. ⟨halshs-00972280⟩
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