Rapport des femmes chirurgiens à la technique
Résumé
On connaît l'explication anthropologique selon laquelle les hommes se seraient assurés le contrôle des outils ou des instruments de production (et, avec lui, la domination sur les femmes), n'ayant pas celui de la reproduction (Tabet, 1979 ; Kniebiehler et Fouquet, 1980). Or la technique est un élément central de la pratique chirurgicale et force est de constater que les femmes chirurgiens sont encore des exceptions statistiques (Zolesio, 2010), comme dans d'autres formations scolaires (Marry et Daune-Richard, 1990) ou professions techniques (Marry, 2004 ; Gallioz, 2008). Bien souvent, pour les chirurgiens hommes, l'idée de voir une femme dans un métier aussi physique et technique, est considéré comme étrange (Domergue, Guidicelli, 2003). La technique joue ainsi comme argument d'exclusion des carrières féminines. Pourtant, les rares femmes qui investissent la chirurgie, à l'instar de leurs homologues masculins, font part précisément de leur attrait pour l'aspect technique comme une des raisons principales de leur vocation chirurgicale. On cherchera donc à reconstruire les conditions de possibilité de cette attirance pour la technique, attirance relativement atypique pour une femme. Il s'agira de revenir sur la formation technique et scientifique de ces enquêtées, sur leur origine sociale (avec une dominante des professions techniques chez les pères, souvent ingénieurs) et leur socialisation primaire. Ce faisant on éclairera d'une part la construction sociale du goût pour la technique, dénaturalisant celui-ci ; d'autre part on soulignera aussi les " dispositions techniques " spécifiques exigées par la matrice de socialisation chirurgicale, avec lesquelles ces femmes se retrouvent du coup en adéquation.
Domaines
Sociologie
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