Oubli, culpabilité, rupture de civilisation : les conceptualisations rétrospectives de la Révolution française pendant la Restauration
Résumé
Cet article se propose une lecture de la mémoire de la Révolution française dans la période de la Restauration. Deux stratégies discursives se font face : une revendication de l'oubli et une hantise de la culpabilité collective du peuple français. La culture politique de la France après 1815 est certainement l'un des exemples les plus frappants d'une tentative d'institutionnaliser un oubli collectif d'un passé récent. Il suffit de citer pour exemples le slogan officiel de la monarchie restaurée, " Unité et Oubli ", et l'article XI de la Charte constitutionnelle : " Toutes recherches des opinions et votes émis jusqu'à la restauration sont interdites. Le même oubli est commandé aux tribunaux et aux citoyens. " En même temps, un discours de la culpabilité collective du peuple français circule, notamment par le biais des anciens émigrants, des " ultras " monarchistes et du clergé. La France est présentée comme lieu où le mal a fait interruption dans l'histoire, ce qui nécessite un constant effort de commémorer et d'expier ce passé criminel afin de le conjurer pour toujours. Ces deux discours contradictoires qui se font face ne prennent leur sens que devant une image du cours " normal " de l'histoire dans lequel l'événement " anormal " de la Révolution n'a pas de place. Celle-ci est donc constituée comme une " rupture de civilisation ". Il s'agit de comprendre comment ces deux stratégies projettent une image d'elles-mêmes dans une histoire imaginée, dans un cas comme " histoire du salut " qui s'organise autour de la personne et la fonction royale, et dans l'autre cas dans une progression rationaliste héritée des Lumières.
[ http://cths.fr/ed/edition.php?id=5498 ]
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