De la sécurité de l'emploi à la flexicurité ? - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2009

De la sécurité de l'emploi à la flexicurité ?

Jérôme Gautié

Résumé

Les marchés du travail ont connu de profondes mutations depuis une trentaine d'années dans les pays de l'OCDE. Partout, selon des modalités et une intensité pouvant différer selon les contextes nationaux, la relation d'emploi traditionnelle a eu tendance à être fragilisée. Celle-ci était au fondement des " marchés internes " des grandes entreprises, qui structuraient, parfois sur l'ensemble du cycle de vie professionnelle, la carrière des salariés en termes de promotion et de progression de rémunération. Les marchés internes assuraient une certaine sécurité en contrepartie d'une disponibilité aux exigences de l'entreprise (notamment en terme d'organisation du travail) - et plus particulièrement dans les pays où les règles de protection de l'emploi contribuaient à formaliser cette sécurité. Ils constituaient ainsi des espaces dans lesquels les salariés, et ce d'autant plus qu'ils étaient anciens dans l'entreprise, étaient relativement protégés des fluctuations du marché. Avec le système de protection sociale, auquel ils s'articulaient de façon étroite, les " marchés internes " participaient ainsi à la " dé-marchandisation " du travail .
Or depuis le début des années 1980, de nombreux indices laissent penser que ces marchés internes ont été pour le moins déstabilisés, en même temps que les règles de protection de l'emploi ont été dénoncées comme génératrices de rigidités. Dans le nouveau contexte plus incertain et plus concurrentiel auquel sont confrontées les entreprises, la flexibilité de l'emploi apparaît comme une nécessité. Cependant, il ne s'agit pas de " re-marchandiser " simplement le travail, en laissant les travailleurs sans protection face aux aléas du marché. Il faut concilier flexibilité et sécurité, mais en promouvant la sécurité d'employabilité plus que la sécurité d'emploi. Cette dernière (la " job security ") renvoie à la capacité à garder l'emploi que l'on occupe à un moment donné, alors que la première (" employment ", ou " employability security ") renvoie à la capacité plus générale d'être en emploi, et notamment de pouvoir en retrouver un le plus rapidement possible si on perd celui qu'on occupait. C'est toute la problématique de la " flexicurité " (Tros et Wilthagen, 2004).
Celle-ci semble être devenu le nouveau modèle de référence - dont le Danemark serait la meilleure incarnation - de plusieurs institutions internationales, comme l'OCDE ou la Commission européenne, ainsi que de nombreux gouvernements européens. La flexicurité est souvent réduite au fameux " triangle d'or ", défini par le triptyque : faible protection de l'emploi - indemnisation généreuse du chômage - politique active de l'emploi dynamique (fondée notamment sur l'individualisation et l'activation). Mais c'est là une vision très réductrice, qui occulte en fait les véritables fondements de la réussite danoise (Barbier, 2005, Gautié, 2006). D'une part, il convient de ne pas se focaliser simplement sur le marché " externe " du travail, mais il faut aussi intégrer dans l'analyse les modes de fonctionnement des marchés " internes " et leurs évolutions - pour reprendre la distinction de Doeringer et Piore (1971). D'autre part, il est nécessaire d'étudier comment les principes généraux de la flexicurité peuvent renvoyer à plusieurs types de fonctionnement du marché du travail, et, plus largement, plusieurs types de modèles sociaux.
Nos nous proposons ici dans un premier temps d'interroger le dépassement supposé d'un modèle " ancien ", fondé sur la sécurité de l'emploi et l'ancienneté, et dans un deuxième temps de montrer comment les principes de la flexicurité peuvent s'incarner dans deux modèles sociaux différents.
Fichier non déposé

Dates et versions

halshs-00394909 , version 1 (12-06-2009)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00394909 , version 1

Citer

Jérôme Gautié. De la sécurité de l'emploi à la flexicurité ?. Bernard Conter, Philippe Lemistre, Brigitte Reynes. L'ancienneté professionnelle à l'épreuve de la flexicurité, Presses de l'Université de Sciences Sociales de Toulouse, pp.47-76, 2009. ⟨halshs-00394909⟩
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