L'introuvable focalisation externe - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Littérature Année : 1997

L'introuvable focalisation externe

Résumé

La définition de la focalisation externe a toujours posé problème: les considérations nombreuses et, surtout, fluctuantes, autour de ce soi-disant type "neutre", "objectif", "impartial" témoignent des difficultés à définir son statut. Ce qui frappe le spécialiste, c'est d'abord l'absence de critères constrastifs linguistiques discriminant les différents types de focalisation, cette absence se faisant particulièrement sentir pour la focalisation externe par rapport à la focalisation zéro. C'est ensuite une polarisation sur l'objet, les justifications de focalisations externes (personnage-objet-décrits-dans-leur- aspect- physique-extérieur) argumentant essentiellement à partir du contenu thématique de l'objet décrit, et rarement à partir de critères linguistiques, sinon pour faire remarquer que "le narrateur ne donne pas son avis"...
La thèse que nous entendons défendre considère que ces confusions massives dans le repérage des focalisations, dont nous allons donner quelques exemples, révèlent la faiblesse de la notion de foyer, à l'origine des focalisations. La recherche d'un énonciateur textuel auquel attribuer un point de vue amène à prendre ses distances avec l'existence d'une focalisation externe autonome, en raison de l'absence de focalisateur spécifique. Cette conclusion se trouve renforcée par l'examen du focalisé, au point qu'il paraît plus juste de parler de vision externe, subordonnée (tout comme son corollaire, la vision interne) tantôt au point de vue du personnage, tantôt à celui du narrateur.
On montrera que l'idée d'une focalisation externe comme foyer autonome est tout aussi mythique que l'idée d'un "récit" qui se raconterait de lui-même. En sorte que l'hypothèse d'un type neutre, assimilé par J. Lintvelt à la "caméra", est à ranger au rayon des illusions1. Certes, de même qu'il y a des textes où les marques énonciatives de la narration sont rares, il y a des textes où les marques du foyer du narrateur sont peu fréquentes et très sélectives. Mais la notion de focalisation externe rend mal compte de ces phénomènes qui concernent des visions spécifiques très instables, puisque l' "externe" y côtoie l' "interne". Au demeurant, ces visions externes ne sont pas l'apanage du narrateur 2 . Elles ne sont pas nécessairement neutres, objectives, et leur volume informatif n'est pas nécessairement limité, quantitativement; il ne l'est, qualitativement, que par l'ancrage spatio-temporel (ainsi que par le pacte de lecture, et par des stratégies communicationnelles qui laissent beaucoup de liberté à l'écrivain...) A terme, c'est l'ensemble du "paysage" qui se trouve bouleversé: nous ne sommes plus face à trois focalisations, mais face à deux focalisateurs, donc face à deux points de vue, celui du personnage et celui du narrateur.

Domaines

Linguistique
Fichier principal
Vignette du fichier
1997-Litterature_107_A._RABATEL.pdf (145.43 Ko) Télécharger le fichier
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)
Loading...

Dates et versions

halshs-00356287 , version 1 (27-01-2009)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00356287 , version 1

Citer

Alain Rabatel. L'introuvable focalisation externe. Littérature, 1997, 107, pp.88-113. ⟨halshs-00356287⟩
328 Consultations
3646 Téléchargements

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More