. Lourde, Histoire de la Révolution à Marseille?, op. cit, p.318

, Expression significative de Lourde, ibid, p.319

, Mieux encore l'extension du « mouvement du corps politique » jusqu'aux dernières extrémités renforce le « centre de la volonté », et contraint ainsi la chaîne patriotique, soumise aux « oscillations continuelles de tant d'intérêts », à s'inscrire dans l'horizon de « l'harmonie sociale ». Ainsi, le gouvernement révolutionnaire devient « le meilleur renfort du patriotisme » : il en termine avec l, Avec l'instauration du gouvernement révolutionnaire le fait de « communiquer du mouvement et de la vie au gouvernement, p.153

, ainsi un continuel « mouvement à contre-sens », les représentants en mission Barras et Fréron proclament, dès le 12 octobre 1793, que « la terreur est à l'ordre du jour » dans le but de « sauver Marseille et raser Toulon ». Puis ils enlèvent à Marseille son nom -elle devient Sans-Nom -et mettent la ville en état de siège. Ainsi leur arrêté du 29 nivôse an II (18 janvier 1794) et leur proclamation du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794) manient sans nuances la rhétorique terroriste à l'égard de Marseille 154 . Ils décident en effet que « le Nom de Marseille que porte encore cette commune criminelle sera changé » et que « provisoirement elle restera SANS NOM, et portera cette dénomination, La suite des événements à Marseille est bien connue. Considérant que « le fédéralisme est enraciné dans les coeurs

». Midi, . De, and . Qu, « au lieu de se faire oublier par une conduite républicaine, elle s'est encore dernièrement rendue coupable d'une nouvelle révolte », en l'occurrence l'opposition de la Commune, avec Isoard à sa tête, aux ordres des Représentants en mission. Enfin ils ajoutent : « Il faut dire ici la vérité tout entière, Marseille est la cause originelle

, Il ne s'agit plus d'entendre les patriotes de Marseille, d'agir de concert avec eux, mais de s'en faire connaître dans le contexte de la mise à l'ordre du jour de la terreur, étroitement associée à la justice révolutionnaire : « Connaissez-nous patriotes, jugez-nous par nos actions » s

, Il en ressort un débat, fort important pour notre propos, entre Moyse Bayle, autre représentant du peuple qui rappelle « tout ce qui lie indissolublement Marseille à la République » d'une part, Barras et Fréron, qui ne voient dans « l'esprit de Marseille » qu'« esprit d'égoïsme, d'intérêt, de cupidité, de fédéralisme, d'isolement, de domination » d'autre part

B. , Existe-t-il à Marseille une « classe de patriotes

, Toutes les expressions ci-dessus sont extraites du Rapport de Billaud-Varenne sur un mode de gouvernement provisoire et révolutionnaire prononcé à la Convention nationale le 28 brumaire an II

, Les arrêtés et les proclamations des représentants en mission en l'an II sont conservés en partie, sous forme d'affiches, aux Archives départementales des

, Dans la Proclamation des Représentants du Peuple français près les armées du Midi à la commune de Marseille, par Barras, Fréron

, Pourquoi alors lui enlever son nom, précisent nos représentants en mission dans une autre correspondance, acte qu'« on nous reproche si amèrement » 159 ? Tout leur argumentaire tient ici à la manière dont ils présentent « l'esprit de Marseille ». Selon eux, les Marseillais se considèrent comme « un peuple à part », ce qui alimente « une opinion fédéraliste » présentée dans les termes suivants : Tous les jours, les meilleurs patriotes d'ici, lorsque nous leur prêchons l'obéissance aux lois de la République, nous reprochent à la Convention de ne pas connaître les localités. Ils voudraient des lois pour eux seuls, Dans ces conditions « la patrie courait les plus imminents dangers » : il fallait donc déclarer la ville en état de siège

, Conscients de l'audace de leur point de vue, ils cherchent même à le fonder sociologiquement si l'on peut dire. A Bayle qui affirme que « la masse du peuple de Marseille a toujours été de bonne foi » -énoncé traduit par l'expression la masse à Marseille est patriote -et qu'en conséquence Barras et Fréron ont tendance à « envelopper dans la même proscription le patriote avec l'aristocrate », nos deux représentants rétorquent : Pourquoi se dissimuler que la classe la moins riche de cette commune regrette l'ancien régime

, Nous le répétons, c'est justement pour cette raison qu'il faut le changer. Peuton exprimer une idée plus fédéraliste ? C'est le nom de Français qu'il faut craindre de perdre. C'est le sein de la France qu

, A l'argumentaire qui met l'accent sur « l'esprit d'indépendance et d'insubordination » de Marseille envers la République s'ajoute alors, vu de la Convention nationale, un argument moins élaboré, mais tout aussi redoutable, « l'influence du climat, plus chaud qu'ailleurs » sur l'énergie des patriotes marseillais dont la chaleur « bien dirigée, peur servir utilement la liberté, mais, par un effet contraire, tourner au profit de ses ennemis

, Cela tient sans doute à ce que nos deux montagnards « minimalistes » ont une conception territoriale de la nation, qui situe en seconde ligne l'évaluation de l'énergie patriotique, tout en usant énergiquement, si l'on peut dire

M. Cf, J. Lapied, and . Guilhaumou, « La mission Maignet », Annales Historiques de la Révolution française, 1995/2. Et plus largement Michel Biard, Missionnaires de la République, 2002.

D. , Maignet recopie cette lettre dans l'un des registres de sa correspondance qui est conservé à la Bibliothèque Municipale de Clermont-Ferrand. Un double de cette importante correspondance se trouve aux Archives Départementales des

N. De-son, De fait, l'accueil favorable de la Convention nationale à l'adresse de la section 11 lui facilite cette tâche. En effet, à l'adresse des patriotes de la section 11 présentée le 21 décembre 1793 (30 frimaire an II), le Président répond dans les termes suivants : « La Convention rappellera le souvenir des anciens exploits civiques de votre commune

. Maignet and . Dans-un-discours-À-la-société-populaire-de-marseille, de pouvoir « rendre à votre commune un nom que ses habitants doivent regarder désormais comme un dépôt précieux », n'en demeure pas moins fort circonspect sur le réel attachement des Jacobins marseillais à la patrie

, Et il ajoute sur un ton plutôt véhément

, Un homme a-t-il rempli son devoir ? Laissons à sa conscience le soin de l'en récompenser [?] Si alors votre société eut présenté le centre de réunion, où tous les amis de la patrie eussent pu accourir ; une communication franche et amicale eût bientôt déjoué ces nouveaux complots de vos ennemis, Citoyens, voulons-nous être libres ? Voulons-nous être utiles à la patrie ? Soyons avares de louanges, p.166

, Si Maignet est beaucoup plus sévère dans son jugement lorsqu'il prononce un discours devant la société populaire d'Avignon 167 , il en profite quand même pour désigner avec précision les critères qui marquent l'appartenance à la classe des patriotes. Il s'agit ainsi d'instituer le patriotisme, donc de le réévaluer du point de vue des institutions civiles de l'an II, qu'il s'agisse de l'instruction publique, des secours réciproques, de la justice

, donc selon une procédure, certes liée à la loi des suspects, mais surtout qui diffère, ne serait-ce que par sa nécessaire expression dans le « langage austère » et laconique de la vérité, des formes antérieures, plus rhétoriques et plus pragmatiques, de sélection du bon patriote par ses discours et ses actes. A ce titre, nous avons jugé intéressant de présenter en annexe un extrait significatif de ce discours posant les bases d

, De fait, la position de Maignet est largement partagée par d'autres représentants du peuple

C. Bayle, Granet

, Voir le Rapport fait par le citoyen Barère au nom des Comités de salut public et de sûreté générale sur la section 11 de Marseille, et sur les patriotes qui se sont réunis à elle dans les journées du 22 au 24 août, 16 germinal an II (5 avril 1794). A ce rapport est adjoint la pétition au nom de la section 11

, Barère décrit la résistance des sans-culottes de la section 11, « section patriote » par excellence, y compris par les armes, aux progrès de « l'aristocratie méditerranéenne » qui « travaillait avec des couleurs patriotiques à faire la contre-révolution », AN, AD XVIII, ce rapport

, Discours prononcé par le citoyen Maignet à la société populaire de Marseille, le premier ventôse l'an second de la République

, ADBdr, 100 E 32. * Nous quittons donc en fin de trajet l'espace proprement pragmatique du cri patriotique pour entrer de plein pied dans un espace ontologique où les notions de patrie, patriotisme, patriote sont appréhendées dans leur manière propre d'être signifiées, nommées par rapport à leur nature sociale, vertueuse, ce qui évite tout réduction à leur seule légitimation par l'action permanente. Dans cette perspective, les concepts de nation et patrie se rapprochent jusqu'à l'indistinction par leur valeur à la fois instituante et subjective, de même les expressions de « mouvement patriotique » et de « mouvement national » se confondent. Nous nous retrouvons par là même dans un monde patriotique de tonalité plus vertueuse, Discours prononcé à la société populaire d'Avignon, dans la séance du 10 floréal, vol.29

, Certes cette vertu quasi-héroïque, associée à la violence exercée sur les personnes suspectes, peut nous faire froid dans le dos, une fois passé les épisodes totalitaires du XXème siècle. Du moins convient-il de marquer, s'il est nécessaire de notifier notre distance à un tel événement régénérateur

, A ce titre, une question demeure lancinante, bien audelà du projet national de l'an II d'une patrie régénérée : Sait-on bien ce qu'est un patriote ? En connaît-on la définition exacte et précise ? Sommes-nous fixés sur l'idée que présente le mot patriote ? 174 . Peut-on vraiment distinguer le « faux patriote » du « vrai patriote » par une série de traits comme nous le propose longuement l'auteur du discours où se formule cette interrogation ? Ne sommes-nous pas confronté, une fois la dynamique révolutionnaire éteinte, à l'absence d'une réalité politique -seul critère vraiment distinctif de l'action patriotiquesignifiée dans l'exergue de ce discours : « O Marseillais ! quand reprendrez-vous l'énergie qui caractérise le Républicain ?, Terminons alors sur un constat des révolutionnaires eux-mêmes : la révolution demeure infinie dans sa lutte contre ses ennemis, vol.175

. Ici, comme partout ailleurs, nous exigerons ce celui qui viendra nous parler patriotisme qu'il nous offre pour la garantie de ses sentiments une conduite dans tous les temps

, Discours prononcé à la Société Populaire régénérée de Marseille, le 10 Pluviôse l'an 3 de la République Française, une, indivisible et démocratique. Par le citoyen Dalmas-Verneuil, Artiste du théâtre Brutus et membre de la société, 2076.

. Iii and F. De-la, et qui plus est en association avec « le cri général ». Soit l'exemple suivant : « Le patriotisme doit reprendre une nouvelle énergie ; l'écrivain courageux doit faire entendre les accès de la vérité, vol.42, p.1573

, Nous lui dirons : lorsque le mot patrie était encore inconnu, lorsque nous ignorions jusqu'à son nom, la nature était la même, elle nous dictait de grands devoirs

, L'accomplissement de ces devoirs devait nous préparer à ceux qui nous seraient imposés, quand enfin la connaissance de nos droits nous aurait inspiré le désir de les recouvrer

S. Dans-ta-vie-privée and S. Dans-ta-vie-publique, l'opinion de tes concitoyens t'accusait, même sous un gouvernement corrompu, nous ne te condamnerons pas sans d'autres examens, mais nous exigerons, pour croire à ta régénération patriotique, pour nous convaincre que tu t'es lavé de tous les vices que l'on avait remarqué en toi, même sous le régime royal, des preuves bien plus fortes que nous n'en demanderons à celui qui, ami constant de la vertu et de la probité

, de s'affubler du bonnet rouge 176 . L'on demandera dorénavant à celui qui se permettra d'en couvrir sa tête, ce qu'il a fait pour se décorer de ce signe auguste de la liberté. L'on voudra savoir quels motifs l'ont porté dans la révolution [?] L'épuration, parmi tous ceux qui se sont dits jusqu'à présent patriotes, en affichant cependant des moeurs si différentes, Le temps est enfin venu, où il ne suffira plus, pour être rangé dans la classe des patriotes

, on ait pu si longtemps regarder comme patriotes des hommes qui partout ailleurs auraient été traités comme les plus vils aristocrates ! Le patriotisme n'est-il donc pas l'assemblage de toutes les vertus ? Y a-t-il de patrie pour l'homme improbe ? Sa patrie est partout où il peut faire des dupes ; sa patrie sera là où se trouvera celui qui l'achètera plus chèrement ; sa patrie sera là où la bassesse, où ses vices lui fourniront plus de moyens de parvenir, Quelle étrange idée s'est-on formé du patriotisme dans ces contrées

, le règne de l'égalité ; le premier profite des succès que le peuple obtient dans cette lutte, pour se tirer de cette égalité que la fortune avait mise entre lui et les sansculottes. L'aristocrate voudrait conserver un rang que les préjugés lui avaient donné ; le patriote à argent veut en obtenir un que la sage nature lui avait refusé. L'aristocratie consentirait plutôt à voir l'univers entier tomber dans le chaos, que de renoncer à ses vains titres ; le faux patriote voterait volontiers la destruction de la République, s'il ne devait que partager le bonheur du peuple [?] Exigez de tous vos candidats deux qualités qui se garantissent mutuellement, Quelle différence met-on donc entre cet homme et un aristocrate ? Ce dernier combat pour ne pas laisser établir

. Ainsi-le-consolateur, dans une rubrique intitulée Modes de la manière dont « le peuple attache une idée de patriotisme à des choses qui n'y ont pas le moindre rapport », en l'occurrence le bonnet de laine rouge. Il ajoute : comment peut-on « spéculer sur le patriotisme en bonnets