'Ars naturans', ou l'immanence du principe : l'automate et la poétique de l'illusion au XVIe siècle - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2006

'Ars naturans', ou l'immanence du principe : l'automate et la poétique de l'illusion au XVIe siècle

Résumé

La culture de la Renaissance, de façon particulièrement nette dans Italie de la seconde moitié du XVIe siècle, a vu s'affirmer à de multiples reprises des positions sur la création artistique qui rejoignent l'idéal condensé par Ovide à propos de Pygmalion : le plus grand maître est celui qui parvient à un art si bien dissimulé dans l'œuvre qu'il donne l'illusion de la vie. En d'autres termes, un art semblant produire de la nature, ‘ars naturans'. Interrogeant une série de formulations allant dans ce sens, l'enquête se propose de dégager, à partir du modèle de l'automate qui fut l'un de ses paradigmes privilégiés, certaines des racines classiques de cette conception de la création et d'en éclairer la portée décisive sur le plan théorique. Selon les approches aristotéliciennes de Francesco de' Vieri (1586) et Bernardino Baldi (1589), l'automate manifesterait exactement la finalité commune à l'art et à la nature, mais en estompant leur frontière ontologique dans la mesure où l'œuvre, afin de donner l'illusion d'une reproduction du vivant, dissimule en elle-même son principe de mouvement – qui en réalité lui est extérieur –, comme s'il lui était immanent. Dans le dernier quart du siècle, cette idée d'un art camouflé à l'intérieur de l'œuvre trouvera une expression décisive dans la pratique et la théorie poétiques du Tasse, revendiquant l'ambition de l'artiste à se faire démiurge et suggérant un renversement de la ‘mimèsis' (la nature semble imiter l'art) que transpose également l'architecture des grottes rustiques. Une telle approche renvoie à la question de la nature comme art divin, abordée par Marsile Ficin à travers le modèle de l'automate et en fonction des positions stoïciennes du ‘De Mundo' pseudo aristotélicien. D'autre part, le statut théorique de l'automate chez Vieri et Baldi s'articule étroitement à l'émerveillement (‘meraviglia'), pour en faire une machine rhétorique propre à capter le visiteur. C'est en fait à une matrice d'ordre théâtral que se rattache la poétique de l'illusion ainsi mise en place dans la seconde moitié du XVIe siècle, à la faveur d'une relecture de la ‘Poétique' d'Aristote. Le rapprochement opéré entre automate et spectacle manifeste en particulier l'intérêt essentiel porté par l'esthétique de l'époque dite maniériste à l'égard des capacités émotives de la représentation et le postulat qu'elle suppose d'une adhésion subjective et immédiate du spectateur à ce qu'on lui montre, la fiction qu'elle entretient d'un regard qui se laisserait piéger par ce qu'expose la scène ou l'image. Avec la rêverie sur un art qui produirait tout seul de la fausse nature, variation sur le thème mythique de l'artiste de génie insufflant la vie à sa sculpture que l'égide d'Aristote, bouclier contre le platonisme, contribua à forger, s'instaurait le dialogue moderne entre poétique et esthétique.
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  • HAL Id : halshs-00138529 , version 1

Citer

Hervé Brunon. 'Ars naturans', ou l'immanence du principe : l'automate et la poétique de l'illusion au XVIe siècle. Maulnes und der Manierismus in Frankreich, 2001, Aix-la-Chapelle, Allemagne. pp.275-304. ⟨halshs-00138529⟩
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