La métaphonie en napolitain: évolution et fonctionnement synchronique

Michela Russo (1, 2)

1 SFL - Structures Formelles du Langage
2 UP8 - Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis

Les processus métaphoniques suscitent l'intérêt et méritent qu'on s'emploie à en approfondir la connaissance parce qu'ils sont des processus d'action phonologique anticipative à distance et opérant du faible au fort: de la voyelle atone à la voyelle tonique, et que de plus ce ne sont pas des phénomènes se laissant simplement réduire à un phénomène phonologique homogène, assimilatif par exemple. En ce qui concerne le phénomène étudié en napolitain, je propose une interprétation sur des bases nouvelles qui diffère de l'analyse couramment admise. Cette interprétation est que la métaphonie napolitaine est fondamentalement une évolution spontanée, que bloquent les voyelles non hautes (c'est-à-dire, en termes de phonologie par éléments, les voyelles contenant l'élément A). L'analyse que je propose considère que les vocalismes "métaphonique" et "non métaphonique" sont deux développements du vocalisme sous-spécifié sous-jacent; le développement "métaphonique" est le développement non-marqué (qui se manifeste sans apport du contexte), le développement "non-métaphonique" est induit par la présence de l'élément A dans le contexte (élement lexicalisé par ex. dans le féminin). Le développement est différent selon que le contexte fournit ou non un élément A (c'est à dire une spécification d'aperture vocalique). Diachroniquement j'admets que le vocalisme "métaphonique" correspond à une évolution spontanée tandis que le vocalisme "non-métaphonique" correspond au bloquage de cette évolution par un contexte vocalique "non haut" (contenant l'élément A) d'une part. J'admets que les représentations lexicales sont sous-spécifiées et donc que les éléments viennent automatiquement (par défaut) s'associer aux éléments lexicalement présents.
L'analyse que je propose se développe à la fois comme une analyse phonologique et morphologique. Modification du développement par défaut de la voyelle tonique, la "non métaphonie" est donc très tôt morphologisée et je l'analyse comme un procédé de morphologie non-concaténative: l'élément A est un morphème "fusionnel" actif et il est "co-syllabé" avec le radical; il ne linéarise pas par rapport à sa cible, la voyelle tonique. La morphologie interne ou apophonique qui porte le signe des relations de flexion est le réflexe du morphème A.

Mots clés: Napolitain médieval; métaphonie et apophonie; théorie des Eléments; sous-spécification

Domaines: Linguistique

Michela Russo. La métaphonie en napolitain: évolution et fonctionnement synchronique. Conférence invitée dans le cadre des Réunions parisiennes du GDR 1954 «Phonologie » (organisateurs : Nick CLEMENTS et François DELL), Jun 2002, Paris (EHESS), France. ⟨halshs-00117975⟩