Territoire flou, territoire approprié : les «bassins» et leur coordonnateur - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Journées du réseau RAPPE "Les territoires de l'éducation et de la formation : construire, coordonner, évaluer l'action publique locale", LEST-IREMAM, Aix-en-Provence, 26-27 mai 2005 Année : 2005

Territoire flou, territoire approprié : les «bassins» et leur coordonnateur

Résumé

La dimension territoriale du système éducatif "à la française" n'est, en soi, pas une nouveauté (Van Zanten 2002). Mais l'amplification considérable de la scolarisation dans les années 1950 - ce qu'on a pu appeler la "première explosion scolaire" (Cros 1961) - et sa mise en système progressive dans le cadre de la planification nationale occulte la dimension locale des normes et des pratiques dans une appréciation quantitative d'ensemble sur la gestion des flux. C'est pourquoi il faut attendre l'orée des années 80 et les lois socialistes sur la modernisation administrative pour que "la proximité" devienne un moyen pour améliorer l'efficacité du service public, et une figure de style obligée dans la rhétorique du management public. Le transfert des compétences au profit d'unités locales sous tutelle du Ministère - les rectorats et les inspections académiques - ou d'unités publiques indépendantes du ministère de l'Education, mais dont les pouvoirs sont clairement encadrés par l'autorité centrale - les collectivités locales - permet d'atténuer les disparités scolaires interrégionales. S'il perdure d'importantes différences entre les départements d'une même académie, "la tendance générale est bien au resserrement des écarts à l'intérieur d'une forte progression d'ensemble" (Robert 1993). Il n'est pourtant pas sûr que la même cause (autonomisation relative des entités éducatives locales) conduise aux mêmes effets (égalisation relative des indicateurs de résultats) lorsqu'on passe des académies aux établissements. C'est en tous cas l'inquiétude précoce que laisse transparaître le chapitre 9 du rapport Prost remis en novembre 83 à Alain Savary, concernant la difficile relation "formation-emploi" : pour que l'enseignement ne se présente plus "en ordre dispersé" face à l'emploi, le rapport conseille la création de "bassins de formation" sur le modèle des bassins d'emploi, qui regrouperaient les lycées et collèges d'un même secteur, éviteraient le doublage de formations et ajusteraient leurs demandes en fonction des besoins de l'environnement. Outre l'amélioration de la carte scolaire des formations, ces bassins constitueraient de véritables interlocuteurs face aux nouveaux pouvoirs régionaux mis en place par les lois sur la décentralisation. Les démarches d'intercommunalité inspirent à leur tour le rapport Lesourne de 1988, qui revient sur le développement de bassins mettant en synergie plusieurs établissements secondaires.Orientation plus éclairée des élèves, meilleur ajustement de l'offre de formation à l'emploi local, insertion plus rapide des jeunes, articulation avec les politiques de la ville... : la rhétorique du "partenariat" et le référentiel du "réseau" apparaissent comme autant d'injonctions à l'engagement territorial. Injonctions pressantes certes, mais pas pour autant réglementaires - la circulaire du 20 juin 2001, qui définit le cadre général des missions et de l'organisation des bassins de formation et d'éducation, laisse en fait cet objet administratif sans assise juridique véritable. Face à cette plasticité du dispositif, les chefs d'établissement se sont très diversement mobilisés. Cet article vise à rendre compte d'une enquête menée dans une grande ville du Sud-Est sur les différentes formes d'interprétation de la "dynamique intermédiaire" dont le bassin est supposé être le support : à partir d'une série d'entretiens et d'observations non-participantes à des réunions de différents types (coordination d'établissements, colloque inter-bassins, journée de bilan académique sur le fonctionnement des bassins locaux), nous nous efforcerons de dresser une typologie de la variété des postures des chefs d'établissements du secondaire rencontrés, en montrant quelles variables explicatives nous semblent pouvoir rendre intelligible la différenciation des positionnements. Inversement, le dispositif de bassin peut se trouver à son tour modifié, voire débordé par les modes d'engagement coordonnés qu'il participe à produire. Ainsi, le sens géographique du bassin ne se départit pas de son sens institutionnel, et l'appropriation qui en est faite renvoie non seulement à une référence identitaire (comme c'est le cas des établissements ZEP visités), mais aussi à un travail politique dans lequel le bassin se trouve saisi non seulement comme objet administratif ou comme instrument de l'action publique, mais aussi comme un enjeu de pouvoir dans la régulation intermédiaire qu'il vient appareiller.
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Dates et versions

halshs-00008098 , version 1 (23-01-2006)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00008098 , version 1

Citer

Hélène Buisson-Fenet. Territoire flou, territoire approprié : les «bassins» et leur coordonnateur. Journées du réseau RAPPE "Les territoires de l'éducation et de la formation : construire, coordonner, évaluer l'action publique locale", LEST-IREMAM, Aix-en-Provence, 26-27 mai 2005, 2005, pp.12. ⟨halshs-00008098⟩
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