La " question rom " en Europe aujourd'hui : regards croisés et mises en perspectives - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Etudes Tsiganes Année : 2011

La " question rom " en Europe aujourd'hui : regards croisés et mises en perspectives

Jean Rossetto
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 771806
  • IdRef : 031352243

Résumé

Ces dernières années, les Roms ont acquis une " visibilité nouvelle " (Asséo, 2003, p. 173) en Europe. Les progrès de l'anti-tsiganisme, la multiplication des actions et des discours de rejet ou, au contraire, de soutien, l'implication croissante de la société civile, la mise en place récente d'une politique européenne d'inclusion des Roms concourent, en effet, à renforcer l'idée qu'il existerait une " question rom ", à laquelle il s'agirait de répondre par des mesures adéquates : le contrôle, voire la mise à l'écart, pour les uns, l'intégration ou l'inclusion, pour les autres. Mais qu'est-ce que la " question rom " ? De notre point de vue, ce n'est pas un donné, c'est-à-dire un ensemble de problèmes objectifs qui existeraient indépendamment de ceux qui les formulent, mais un " problème public " tel que défini par Joseph Gusfield, c'est-à-dire un " état de fait [qui forme] un enjeu de réflexion et de protestation et une cible pour l'action publique " (2003, p. 71). Partant de cette hypothèse, nous avons décidé de réunir dans le cadre d'un colloque international organisé à Tours en mars 20112 des chercheurs, des doctorants provenant de différentes disciplines, et des acteurs associatifs pour confronter leurs points de vue au sujet de la " question rom " en Europe aujourd'hui. Il s'agissait en particulier de comparer les conditions de possibilité et les processus de catégorisation à l'oeuvre dans la construction de la " question rom ", et de s'interroger sur les effets de la catégorisation. Quelle qu'en soit la forme (étiquetage, définition des publics de l'action publique, etc.), la catégorisation peut en effet être assimilée à un acte performatif, en ce sens qu'elle peut immédiatement influencer le cours de l'action publique, les conduites des individus ciblés, sans oublier les pratiques et les représentations au sein de la société dominante. Les recherches historiques sur la " question tsigane " à la fin du XIXe siècle et dans la première moitié du XXe siècle invitaient par ailleurs à mettre en perspective la " question rom " en Europe aujourd'hui : s'agit-il d'un simple décalque de la " question tsigane ", au sujet de laquelle Henriette Asséo et d'autres chercheurs comme Ilsen About, Emmanuel 1 Olivier Legros, UMR CITERES (CNRS, Université de Tours), Equipe Monde arabe et Méditerranée, URBA-ROM, et Jean Rossetto, Equipe d'accueil GERCIE (Université de Tours). Nous remercions Tommaso Vitale pour sa relecture attentive et critique d'une première version de ce texte. 2 " La ''question rom'' en Europe aujourd'hui. Enjeux et modalités de la construction de problèmes publics émergents ", colloque organisé par URBA-ROM, l'Unité mixte de recherche CITERES 6173 (CNRS/Université de Tours) et l'équipe d'accueil GERCIE 2110 (Université de Tours). L'ensemble de la documentation ainsi que les enregistrements sont disponibles sur le site d'Urba-Rom : http://urbarom.crevilles-dev.org/. Filhol, Marie-Christine Hubert ou Leonardo Piasere ont pu montrer qu'elle avait constitué un point d'appui pour le développement des démocraties européennes 3, et même pour la " modernité européenne " (Piasere, 2011) ? Ou ne faut-il pas, à l'inverse, souligner l'originalité des processus en cours, ne serait-ce qu'en raison de l'introduction de référentiels nouveaux, tels que la citoyenneté européenne, le multiculturalisme ou les droits de l'homme ? Cette nouvelle livraison d'Etudes tsiganes, qui reprend plusieurs des contributions présentées à ce colloque, est subdivisée en deux parties. Dans un premier temps, sont évoquées des situations nationales. Les trois premières contributions concernent la période actuelle. Grégoire Cousin s'intéresse aux débats et controverses politiques qui déboucheront en 2008 sur la déclaration de l'" état d'urgence nomades " (Emergenza nomadi) en Italie, tandis que Pierre Cabrol et David Dumeau, d'un côté, et Claire Fernandez, de l'autre, axent leurs contributions respectives sur les catégorisations juridiques et administratives en cours : les pratiques policières visant les ressortissants bulgares et roumains dans l'agglomération bordelaise, pour les premiers, la mise en oeuvre du droit des minorités au Kosovo, pour la seconde. Les deux contributions suivantes adoptent quant à elles une approche historique. Ida Al Fakir explicite le rôle de la médecine sociale dans la catégorisation des " Gypsies " dans la Suède de l'après-guerre ; et Gabriele Roccheggiani étudie l'évolution de la figure du " Tsigane-nomade " en Italie, depuis sa genèse, à la fin du XIXe siècle. La seconde partie de ce dossier est consacrée à la perspective européenne. Martin Olivera s'attache tout d'abord à déconstruire la catégorie " Roms " instaurée par les institutions européennes de concert avec la Banque mondiale et l'Open Society Institute (OSI) qui est financée par le milliardaire américain d'origine hongroise, George Soros. Les trois contributions suivantes examinent le lien entre la mise en oeuvre du droit des minorités au sein de l'Union européenne (UE) et la " question rom " à partir des années 1990. Yana Kavrakova étudie l'influence de la vision européenne du " problème rom " sur les conceptions de l'élite politique bulgare qui est de fait invitée à reconsidérer ses catégories d'action en fonction de la grille interprétative imposée par les institutions européennes. Roberta Medda-Windisher analyse ensuite l'impact de la convention-cadre pour la protection des minorités sur la situation des groupes désignés comme roms dans les Etats qui ont ratifié la convention à partir des rapports officiels produits dans le cadre de cette politique européenne. Enfin, Serena Baldin aborde un sujet peu abordé jusqu'alors, à savoir l'impact de la protection des minorités sur les droits politiques des Gens du voyage, des Travellers et autres groupe nationaux désignés comme tsiganes et désormais regroupés au sein de la méta-catégorie " Roms ". 3 A ce sujet voir notamment ASSEO H., 2007, " L'invention des " Nomades ", en Europe au XXe siècle et la nationalisation impossibles des Tsiganes " dans Noiriel G. (dir.), L'identification. Genèse d'un travail d'Etat. Paris, Belin. Coll. Socio-histoires, pp. 161-180. Ce dossier s'achève par une série d'entretiens réalisés par Olivier Legros avec trois représentants d'associations roms basées en France : Saimir Mile, pour La Voix des Rroms, Nedzmedin Neziri, pour l'Union des Roms d'ex-Yougoslavie en diaspora (URYD) ; et Sasha Zanko, pour l'Union française des associations tsiganes (UFAT). Lors des entretiens qui ont été restitués ici, les militants associatifs étaient invités à exposer leurs points de vue sur trois thématiques : les processus de catégorisation ; l'action
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Citer

Olivier Legros, Jean Rossetto. La " question rom " en Europe aujourd'hui : regards croisés et mises en perspectives. Etudes Tsiganes, 2011, 46, pp.4-25. ⟨halshs-01015515⟩
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