La réforme de l'internat de médecine de 1982 et ses effets sur les choix professionnels des médecins - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport De Recherche) Année : 2001

La réforme de l'internat de médecine de 1982 et ses effets sur les choix professionnels des médecins

Résumé

Reprenant les grands principes d'une première loi-cadre élaborée en 1979, la loi du 31 décembre 1982 a posé les bases du système actuel, en instaurant un concours national d'accès aux filières de spécialité et un résidanat de médecine générale, aboutissant à un doctorat portant qualification de médecine générale ou spécialisée. Le nouveau concours a conservé l'appellation d'internat, bien que sa vocation ne soit plus celle de l'ancien internat des hôpitaux, qui visait à pré-recruter le corps des praticiens hospitalo-universitaires. C'est désormais l'accès global aux spécialités qui se trouve régi par la loi du concours. L'analyse des conséquences de ce changement est au cœur de la recherche qui a été menée par notre équipe. Plusieurs hypothèses ont été formulées au départ, relatives, notamment, à une probable exacerbation de la division de la profession en segments étanches et inégalement légitimes. Chemin faisant, d'autres questions ont été soulevées, notamment en matière d'incidences sexuées de la réforme ou d'effets pervers sur les disparités régionales de développement sanitaire. En effet, les tendances démographiques générales témoignaient du peu d'incidences positives de la réforme sur l'équilibrage structurel et géographique de l'offre de soins. En outre, l'objectif de " valorisation de la médecine générale " méritait d'être interrogé, puisque le protocole de sélection faisait reposer l'orientation des étudiants en grande partie sur un " rang de classement ". Toutes ces observations justifiaient la réalisation d'une recherche ad hoc afin, notamment, de mieux comprendre, au-delà du " constat d'échec ", les mécanismes mis en œuvre à l'occasion de la réforme. Méthodologie L'enquête de terrain a été réalisée sur trois sites : les facultés de Lariboisière-Saint-Louis (Paris), Marseille et Nantes. Dans chaque université, un échantillon d'étudiants a été tiré de manière aléatoire à partir des listes d'inscrits en PCEM2 en 1973, 1975, 1978, 1980, 1984 et 1986. Les parcours des 1080 étudiants ainsi sélectionnés ont été relevés à partir de leurs dossiers et des procès-verbaux d'examens. Ce fichier a été complété par des données de carrière fournies par le Conseil national de l'Ordre des médecins et par les résultats des concours de l'internat nouveau régime, fournis par le Centre inter-universitaire de traitement de l'information (CITI II). Ces données ont été exploitées sous une forme anonyme et ont été complétées par des études de documents et des entretiens auprès d'une cinquantaine de médecins, dont plus de quarante étaient issus de l'échantillon statistique. Les effets induits de la réforme portent sur trois champs principaux : 1/ Les politiques universitaires et les stratégies étudiantes : au-delà des changements prévus au cours du troisième cycle, la réforme a contribué à modifier les deux premiers cycles des études. 2/ La structure du corps médical : selon leur université, les étudiants n'ont pas les mêmes chances de réussir le concours de l'internat, et les distorsions géographiques dans la répartition entre généralistes et spécialistes en sont accrues. À ces effets locaux, la concurrence entre les étudiants contribue à favoriser les plus proches des milieux universitaires et médicaux. Comme pour les concours des Grandes Écoles, le concours de l'internat fait barrage à la démocratisation de l'accès aux spécialités. En outre, les femmes apparaissent comme les grandes " perdantes " de la réforme, puisqu'elle s'orientaient, sous l'ancien régime, en majorité vers la médecine spécialisée et qu'elles deviennent aujourd'hui surtout omnipraticiennes. 3/ De l'éclatement d'un diplôme à la division d'une profession : le corps médical est, depuis la réforme, plus divisé que jamais. L'enquête rend bien compte de l'état permanent de concurrence dans lequel les étudiants se socialisent durant leurs études. En conséquence, l'écart se creuse entre des généralistes stigmatisés par " l'échec à l'internat " et des spécialistes considérés comme " l'élite " des étudiants en médecine. En outre, la standardisation des modes d'apprentissage, la prégnance des critères hospitaliers rendent plus difficile pour les étudiants une pratique ambulatoire centrée sur la clinique et à l'occasion de laquelle ils sont confrontés à des exigences économiques contredisant les principes selon lesquels ils ont été formés.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-00847791 , version 1 (24-07-2013)

Licence

Paternité - Pas d'utilisation commerciale - Pas de modification

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00847791 , version 1

Citer

Anne-Chantal Hardy-Dubernet, Michel Arliaud, Chantal Horellou-Lafarge, Fabienne Le Roy, Marie-Anne Blanc. La réforme de l'internat de médecine de 1982 et ses effets sur les choix professionnels des médecins. [Rapport de recherche] Laboratoire d'économie et sociologie du travail (LEST); Laboratoire Georges Friedmann. 2001, pp.200. ⟨halshs-00847791⟩
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