La non-motivation des décisions judiciaires dans l'ancien droit : principe ou usage ? - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Revue historique de droit français et étranger Année : 2004

La non-motivation des décisions judiciaires dans l'ancien droit : principe ou usage ?

Serge Dauchy
Véronique Demars-Sion
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 919719

Résumé

The absence of reasons given for decisions, which is one of the main characteristics of Ancien Regime justice, is generally inferred from the interdiction made by the royal decrees since the 14th century to disclose the secrets of deliberations. But can one really establish a causal link between them ? In fact, no royal decree or any other normative prescription explicitly forbade the judges of Parliament to give the reasons for their judgments. The author of the Style de la chambre des enquêtes only advised the judges against the practice of disclosing the reasons for their decisions. The Style thus adopted the warnings repeated by the Decretalists since the early years of the 13th century. Therefore, not revealing the rationes decidendi appears to be a common use rather than a firm principle of ancient French law. That use had been imposed by Parliament : first because it was a guarantee for the independence of its members, afterwards - and mainly - because it ensured the courts great liberty, especially because it allowed judges to find a solution outside the formal legal sources. It is because of these reasons - despite the fact that the absence of ratio decidendi constituted a major obstacle to the assertion of a "jurisprudence of the sovereign courts" - that the use persisted until the Revolution.
La non-motivation des décisions, une des principales caractéristiques de la justice d'Ancien Régime, est généralement déduite de l'interdiction faite par les ordonnances royales, depuis le XIVe siècle, de révéler le secret des délibérations. Mais peut-on réellement établir un lien de cause à effet ? En réalité, aucune ordonnance royale ou autre texte à caractère normatif ne défend explicitement aux conseillers du Parlement de motiver leurs jugements. Tout au plus l'auteur du Style de la chambre des enquêtes déconseille-t-il aux magistrats de livrer les raisons qui ont pu déterminer leur décision. Ce Style ne fait d'ailleurs que reprendre à son compte les mises en garde répétées par les décrétalistes depuis le début du XIIIe siècle. La non-motivation apparaît donc davantage comme un usage que comme un principe de l'ancien droit. Cet usage, c'est le Parlement qui l'a imposé : d'abord parce qu'il garantissait l'indépendance de ses membres, ensuite et surtout parce qu'il assurait une grande liberté d'appréciation permettant aux cours de trouver une solution en dehors des sources formelles du droit. C'est pour ces raisons, et en dépit de l'obstacle que constituait la non-motivation pour l'affirmation d'une jurisprudence des cours souveraines, que cet usage se maintiendra jusqu'à la Révolution.

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  • HAL Id : halshs-00678392 , version 1

Citer

Serge Dauchy, Véronique Demars-Sion. La non-motivation des décisions judiciaires dans l'ancien droit : principe ou usage ?. Revue historique de droit français et étranger, 2004, 82 (2), pp.171-188. ⟨halshs-00678392⟩

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