Penser les êtres -- plantes et animaux -- " à l'indienne " - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2009

Penser les êtres -- plantes et animaux -- " à l'indienne "

Résumé

Why did Europe develop botany and zoology, whereas India did not? In a brilliant and fascinating work on animals in Indian ecology and medicine, Francis Zimmermann studies and analyses the "styles of thought" in the Indian and the Western, Greco-Latin tradition, in order to find an answer to this question. More concretely, Zimmermann studies, on the one hand, the "scales of beings" found in Indian texts, especially in Ayurveda, the Indian system of health and longevity, and, on the other hand, the origins of Western botany and zoology for which he uses especially H. Daudin's study on the methods of classification in botany and zoology, from Linnaeus to Lamarck. The present article critically investigates two positions for which Zimmermann argues in his book. First, following the suggestions of Daudin, Zimmermann finds that two aristotelian ideas have opened the way that led European thought from theology to the natural sciences: (a) the idea of a hierarchy of beings (on the basis of a hierarchy of their mental functions); and (b) the idea of continuity. Second, on the basis of a survey of ancient Indian sources, Zimmermann concludes that in India the classification was always ethical, juridical and religious. However, passages from texts of the philosophical schools of Vaises ika and San khya, analysed in this article (§3.1-4.1), clearly show that the latter position is untenable. In subsequent paragraphs it is further shown that it cannot be maintained that Western Antiquity, that is, Aristotle, had ideas, concepts and a rigour of thought that were absent in India. A review of the conditions of the development of botany and zoology in the 17th and 18th century further reveals that there is an important difference between the West and India that has been entirely neglected by Zimmermann. The work and thought of Linnaeus presuppose an international community of scholars that cannot exist without a means of communication, namely printing, that was absent in brahmanical and Hindu India whose texts Zimmermann studies. It is further analysed how the difference between India and the West is not absolute but a matter of the balance between different ways of fixing and transmitting texts, each of which has profound implications for the organisation of knowledge in the text. These different ways include: various ways of oral fixation (e.g. in poetry), handwritten texts, and, since the 15th century in Europe, printing. The "style of thought" regarding living beings - plants and animals, including man - thus appears as heavily conditioned by the means of knowledge transmission, which makes the explanatory device of a postulated "Indian mind" or "Indian mentality" entirely inappropriate, even if we may recognise, impressionistically, a special "way of thinking" in the ancient Indian works at our disposal.
Pourquoi l'Europe a-t-elle développé la botanique et la zoologie, lorsque l'Inde ne l'a pas fait? Dans un ouvrage brillant et passionnant sur les animaux dans l'écologie et la médecine indiennes, Francis Zimmermann étudie et analyse les " styles de pensée " dans la tradition indienne et dans la tradition occidentale (gréco-latine), afin de trouver une réponse à cette question. Plus concrètement, Zimmermann, étudie, d'une part, les " échelles des êtres " trouvées dans les textes indiens, en particulier dans l'Ayurveda, le système indien de la santé et de la longévité, et, d'autre part, les origines de la botanique et la zoologie occidentales pour lequel il utilise en particulier l'étude de H. Daudin sur les méthodes de classification en botanique et en zoologie, de Linné à Lamarck. Le présent article enquête sur deux positions adoptées et défendues par Zimmermann dans son livre. Tout d'abord, suivant les suggestions de Daudin, Zimmermann constate que deux idées aristotéliennes ont ouvert la voie qui a conduit la pensée européenne à partir de la théologie aux sciences naturelles: (a) l'idée d'une hiérarchie des êtres (sur la base d'une hiérarchie de leurs fonctions mentales), et (b) l'idée de continuité. Deuxièmement, sur la base d'une enquête sur les sources antiques indiennes, Zimmermann conclut que, dans l'Inde, la classification a toujours été éthique, juridique et religieux. Pourtant, des passages de textes des écoles philosophiques du Vaisesika et du Sankhya, analysées dans cet article (§ 3.1 à 4.1), montrent clairement que la dernière position est intenable. Dans les paragraphes suivants, il est en outre montré qu'il ne peut pas être maintenu que l'Antiquité occidentale, c'est à dire, Aristote, avaient des idées, des concepts et une rigueur de pensée qui étaient absents en Inde. Un examen des conditions du développement de la botanique et de la zoologie dans le XVIIe et XVIIIe siècle révèle en outre qu'il existe une différence importante entre l'Occident et l'Inde qui a été entièrement négligé par Zimmermann. Le travail et la pensée de Linné présupposent une communauté internationale de chercheurs qui ne peut pas exister sans un moyen de communication, à savoir l'imprimerie, qui était absent dans l'Inde brahmanique et hindoue dont Zimmermann étudiait les textes. Une analyse subséquente concerne la caractère non-absolu de la différence entre l'Inde et l'Occident: il s'agit plutôt d'une équilibre entre les différentes façons de fixation et de transmission des textes, chacune ayant de profondes implications pour l'organisation des connaissances dans le texte. Parmi les différentes façons il y a: différentes façons de fixation orale (par exemple, dans la poésie), textes manuscrits, et, depuis le XVe siècle en Europe, l'imprimerie. Le " style de pensée " au sujet des êtres vivants - les plantes et les animaux, y compris l'homme - apparaît donc comme fortement conditionné par les moyens de la transmission des connaissances, ce qui rend le dispositif explicatif d'un "esprit indien" ou une "mentalité indienne" tout à fait inapproprié, même si l'on peut reconnaître, de façon impressionniste, un "mode de pensée" dans les anciennes œuvres indiennes à notre disposition.
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Citer

Jan E.M. Houben. Penser les êtres -- plantes et animaux -- " à l'indienne ". N. Balbir et G.-J. Pinault. Penser, dire et représenter l'animal dans le monde indien, Champion, Paris, pp.311-329, 2009, Bibliotheque de l'Ecole des Hautes Etudes, t. 345. ⟨halshs-00673171⟩
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