La responsabilité auctoriale dans l'écrit de recherche : une question de 'partage' de la prise en charge énonciative
Résumé
A côté d'une pratique de l'exemple qui privilégie les énoncés décontextualisés et souvent restreints au cadre phrastique, l'étude présentée vise à analyser en quoi une approche menée au niveau du texte et dans un genre spécifique peut éclairer la notion de prise en charge en linguistique. Elle porte sur le genre de l'article de recherche à partir d'un corpus d'articles français de deux disciplines de sciences humaines, les Sciences du langage et les Lettres , et s'intéresse à la construction dans le texte d'une responsabilité auctoriale ; trois phénomènes caractéristiques du genre sont retenus, qui interrogent la prise en charge énonciative, le il impersonnel, le je et le nous académique, et les interrogatives directes. Nous commencerons par tenter de mieux cerner la notion de prise en charge autour des problèmes qu'elle pose, et qui fondent la diversité de ses conceptions. A partir des approches polyphoniques en linguistique, nous introduisons alors la notion de figure de l'auteur ; elle doit concilier la polyphonie de tout énoncé et l'idée d'une instance qui se présente dans le texte comme l'origine et le garant d'un dit cohérent, vis-à-vis duquel il est possible de demander des comptes à son rédacteur. Les phénomènes retenus parmi l'ensemble de ceux qui servent la construction d'une telle figure montrent qu'elle demeure foncièrement hétérogène, au niveau linguistique, et que l'opposition entre prise en charge et non prise en charge doit céder la place à une analyse en termes de " partage ", c'est-à-dire à la fois de distinction et de mise en commun dans la prise en charge du dit.