La voie de la technocratie et de la rationalisation au sortir de la Première Guerre mondiale : le rapport d'Étienne Clémentel (1919)
Résumé
Ministre du commerce durant la première guerre, Étienne Clémentel remet en 1919 un rapport de près de 3000 pages sur l'organisation de la production française. Cette source administrative forme un objet à part entière de l'histoire de l'économie, mais aussi de l'histoire politique de la France en guerre, de l'histoire intellectuelle, sociale et culturelle de la IIIe République, et précisément de l'un de ses épisodes technocratiques les plus intense. L'entreprise s'avère ainsi celle d'une légitimation de l'extension des prérogatives du département du commerce, de l'exigence des administrateurs techniques de l'État de devenir les acteurs centraux de la reconstruction industrielle. Ce rapport marque l'évolution d'une pensée, celle d'une culture de gouvernement qui se constitue au fil de l'action et se concrétise par la création d'un véritable ministère de l'économie industrielle. Cet article propose d'explorer les conditions de production et les motivations qui président à la réalisation de ce rapport. Ce dernier apparaît alors comme l'une de ses manifestations du désir d'édifier une économie rationnelle qu'appellent de leurs vœux les partisans d'une technocratie auxquels le Ministre s'est allié pour la circonstance. Il aura ainsi créé l'opportunité d'une consolidation des compétences techniques et du rôle des experts au sein des instances gouvernementales, des commissions, comités et offices dédiés. C'est en tout cas ce que les technocrates cultivent et tentent de prolonger en invoquant la nécessité de poursuivre en temps de paix, et sur le modèle des actions engagées lors du conflit, la rationalisation de l'État et de ses pratiques en matière d'économie.
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